C’est encore l’apanage des jeunes marques indépendantes, mais l’émergence d’une offre cosmétique directement liée aux problèmes hormonaux spécifiques des femmes, jusqu’ici ignorée des discours marketing, se démocratise sur tous les marchés.
” On assiste à l’émergence d’une libération de la parole, principalement féminine, concomitante au mouvement Meetoo. Ce phénomène a ancré socialement le droit de parole des femmes et a fait avancer la société d’un point de vue collectif sur leurs problématiques. “, expliquer Anne Cécile Guillemot, co-fondatrice de l’agence Dynvibe.
Pour comprendre les marchés, cette agence spécialisée en Social Intelligence collecte et analyse les données produites spontanément par les consommateurs sur les réseaux sociaux ou les moteurs de recherche.
Forte de cette expertise, l’agence a pu constater qu’en dépit des différences culturelles, la plupart des pays font état d’un ensemble de signaux en faveur de nouvelles attentes de la part des femmes. Des attentes souvent portées et relayées par des influenceurs ou des changemakers, porte-parole de leur propre expérience. Ménopause, grossesse, cycles ovariens, infections urinaires, sécheresse vaginale, cheveux blancs,… ces sujets exclusivement féminins, jusqu’alors ignorés, sont désormais abordés au grand jour.
” Le sujet de la ménopause est l’incarnation forte de ce « dont on ne parlait pas avant », pourtant toutes les femmes sont concernées, avec des symptômes qu’elles ne parviennent pas toujours à expliquer. Ces épisodes de vie créent des souffrances que les générations actuelles ne veulent plus endurer seules. Il y a un besoin qui se fait sentir mais les professionnels de santé n’apportent pas forcément de réponse, ou n’assument pas ce rôle d’accompagnement. “, continue Sarah Lagier, Analyste Market Insight chez Dynvibe.
Les femmes peuvent aujourd’hui trouver ce soutien, cette écoute, auprès de nouvelles marques de beauté, pour la plupart pure player, apparues sur différents marchés ces dernières années. Aux États-Unis, Blume affirme vouloir établir une nouvelle norme en matière de soins de la peau, des soins du corps, des règles et de la puberté. Avec sa marque Stripes, Naomi Watts se fait ambassadrice d’une ménopause positive à travers une gamme de produits de soins pour la peau, les cheveux et le vagin.
MiYé écoute les symptômes
En France, MiYé (le bon ami en provençal), créé en 2021 par Caroline de Blignières et Anna Oualid vient d’accueillir les Laboratoires Pierre Fabre à son capital, signe supplémentaire de l’attention portée à cette lame de fond. Dès sa création, la marque de beauté in & out dédiée au bien-être hormonal rencontre immédiatement son public avec son premier produit [My] Female Hormonal Balance, toujours un best-seller à ce jour.
” Nous avons décidé de soutenir les femmes ayant des problèmes de déséquilibre hormonal car le marché ne les traite pas ou les traite mal. L’idée est de parler aux femmes, de la puberté à la ménopause, avec des routines simples et sécuritaires. » explique Caroline de Blignières.
Après avoir interrogé pendant deux ans des experts, endocrinologues et gynécologues en France et aux Etats-Unis, les fondateurs ont constaté une connaissance très hétérogène des solutions. Adepte du bien-être au naturel et préoccupée par la menace des perturbateurs endocriniens, Caroline de Blignières met alors à profit ses 15 années d’expérience en santé/beauté et dans le développement de produits cosmétiques et de compléments alimentaires pour travailler sur une offre naturelle, en cohérence avec le métabolisme féminin.
” Plutôt que de catégoriser par âge, nous avons souhaité réaliser des produits par symptômes, qui reflètent souvent plusieurs causes. Les tempêtes hormonales que peuvent être l’endométriose, le post-partum ou la périménopause provoquent des symptômes souvent courants comme la sécheresse vaginale, les bouffées de chaleur, l’inconfort intestinal, l’irritabilité, que nous traiterons avec les mêmes plantes. », précise le co-fondateur.
A travers cette approche transversale, la marque propose un mix de soins et de nutricosmétiques, comme le gel intime hydratant et rééquilibrant qui booste la lubrification naturelle avec un extrait breveté de muguet bleu, le sérum capillaire anti-chute densifiant pour lutter contre la chute des cheveux. cheveux denses, l’Huile Régénérante, la Brume Oxygénante SOS ou encore, en micronutrition, les Essentiels Sérénité, etc.
Seuls ou associés, ces produits sauront apaiser les symptômes les plus courants : sautes d’humeur, douleurs menstruelles, inconforts intimes, ballonnements, seins serrés, dominance en œstrogènes… qui peuvent rythmer les phases de la vie d’une femme en fonction de sa situation hormonale.
Transformation des mentalités
Malgré les premières interrogations suscitées par son lancement il y a trois ans, la startup a rapidement rencontré son marché, et affiche aujourd’hui un taux de rachat de plus de 40%, avec un profil de consommateur particulièrement transgénérationnel. En plus du site marchand qui représente plus de 60% des commandes, MiYé est distribué via Joli Moi, au Bon Marché, chez Mademoiselle bio, Monoprix Espace santé, Oh My cream !
” Le rapprochement avec Pierre Fabre va permettre d’activer également le réseau de pharmacies, mais surtout d’aller plus loin dans l’accompagnement scientifique », note le co-fondateur.
Un succès rapide qui reflète l’évolution évidente et accélérée des mentalités depuis trois ans. ” La fin de l’ère des tabous est un phénomène très récent » assure Anne Cécile Guillemot pour Dynvibe. ” Nous sommes en train de renverser les fausses croyances, notamment sur les hormones, car les consommateurs d’aujourd’hui ne veulent plus se soumettre à des diktats, ils veulent être actifs dans leur vie et leur bien-être. La tendance est commune à toutes les régions du monde et cela se reflète dans l’offre », précise-t-elle.
Un constat partagé par Caroline de Blignières. ” Avec MiYé nous souhaitons aider les femmes à redevenir actrices de leur bien-être hormonal, c’est un sujet que l’on néglige beaucoup trop au cours de nos vies, alors même que cette connaissance intime du corps est essentielle. », conclut-elle. Aux sages…
