Kent Nagano se souvient de nous avec tendresse

Kent Nagano se souvient de nous avec tendresse
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Les concerts de la semaine à l’Orchestre Symphonique de Montréal (OSM) sont confiés à Kent Nagano, son chef émérite, dont la popularité n’a en rien diminué. Son concert associant Les noces de Stravinsky et du Symphonie héroïque de Beethoven a rempli la Maison symphonique et a mis en valeur les qualités du chef d’orchestre en termes de rigueur et de clarté.

Il est presque ironique de voir Kent Nagano revenir parmi nous dans le Symphonie héroïque de Beethoven, l’œuvre avec laquelle Rafael Payare, lors de son premier concert test, a marqué les esprits, lors d’une soirée qui a finalement conduit à sa nomination.

Le propre des chefs-d’œuvre, c’est qu’ils peuvent donner lieu à diverses versions valables. Kent Nagano a choisi un orchestre plutôt réduit, une cinquantaine de musiciens réunis sur le devant de la scène. Le mouvement vraiment impressionnant est le premier, avec un vrai mordant et un véritable impact, mais en même temps une transparence et une lisibilité polyphonique admirables. C’est un Beethoven vif, translucide, fourmillant de détails, avec des bassons bien visibles et des nuances ciselées.

Nous attendions un Défilé funéraire particulièrement poignant, car Kent Nagano a perdu mardi un ami proche, le musicologue et directeur artistique allemand Dieter Rexroth, qui a été important dans sa carrière en Allemagne et qui a également travaillé dans l’ombre comme son très discret conseiller musical tout au long de son mandat à l’OSM, comme l’orchestre nous l’a confirmé hier. Mais ces circonstances personnelles n’ont en rien affecté ce que nous avons entendu. Là Défilé funéraire était déterminé et laconiquement fatal.

Temporalité

Dans le Finalle chef d’orchestre fait jouer un concertino au petit fugato Depuis le début. C’est une option possible dans les éditions récentes des partitions et c’est plutôt une bonne idée. Mais Final est plutôt une construction « mécanique » très solide et n’a pas tout à fait le souffle du 1euh obturateur. La coda est cadrée sans excitation ; la performance musicale est censée générer une forme de pouvoir.

En revanche, ce qui est toujours aussi incompréhensible de la part d’un tel musicien, c’est son insensibilité totale à « rythme », que l’on pourrait traduire par « temporalité dramaturgique », d’une œuvre symphonique. Le dernier souffle deHéroïque se succède attaque Ou quasi-attaque des mouvements III et IV. Là encore, une frange d’un certain « public de Nagano » applaudit chaque mouvement et, comme exprès, au lieu de maintenir la tension après le Scherzo et de passer à autre chose, le leader laisse cette minorité active applaudir le petit mouvement de 5 minutes et se retourne pour encourager la chose. On l’a déjà vu, et dans des circonstances pires (un arrêt totalement interdit, entre leAdagietto et le Final de la 5e de Mahler à Lanaudière!); nous ne nous y habituerons jamais vraiment. J’ai hâte d’y êtreHéroïque de Yannick Nézet-Séguin à l’OM en octobre prochain : du moins on n’est pas sûr de ne pas subir une extinction musicale aussi détestable.

En première partie, Kent Nagano a réalisé Les noces de Stravinsky dans la version française de Ramuz. Nous n’avons aucune affinité avec cette version, certes justifiée dans une métropole francophone, mais qui présente l’inconvénient de nous permettre de comprendre des propos d’un crétinisme sans limite. Et, qu’on le veuille ou non, l’œuvre a été écrite en russe. Cela coule en russe.

C’est peut-être notre propre habitude de la langue russe dans cette œuvre, mais les revirements, les éclats sont tellement avancés dans Les noces : ils tombent bien, phonétiquement, en russe et paraissent un peu lents en français. En tout cas, chapeau au chœur pour s’être ainsi affranchi du pensum et félicitations à celui qui a présidé à une si parfaite répartition des solistes. Le changement de Matt Boehler à la place de Rafal Pawnuk aurait mérité une annonce au micro, car cette basse de dernière minute était excellente et drôle. Nous avons également été heureux d’entendre la mezzo Ema Nikolovska dans un registre plus cuivré et sérieux que lors de son récital à Bourgie. Elle est impressionnante.

L’interprétation de Kent Nagano est très cérébrale, minutieuse et orientée vers la taille et la mise en œuvre rythmique. Cela ne rend pas vraiment l’atmosphère de folie exubérante de la fête, de ce niveau supérieur où la complexité de la partition devient un défi avec lequel on joue, en lâchant prise et en prenant des risques. Mais il vaut mieux “tenir le coup” Les noces plutôt que de se lancer dans un désordre confus.

L’héroïque Symphonie n°3 de Beethoven par Kent Nagano

Stravinsky : Le Mariage. Beethoven : Symphonie no 3. Louise Kemény, Ema Nikolovska, Andreas Conrad, Matt Boehler, Chœur de l’OSM, Olga Gross, Pamela Reimer, Brigitte Poulin, François Zeitouni (pianos), Hugues Tremblay, Serge Desgagnés, Corey Rae, Nicolas Lapointe, Ralph O’Connor, David Therrien-Brongo, Joshua Wynnyk (percussions), Orchestre Symphonique de Montréal, Kent Nagano. Maison symphonique, mercredi 10 avril. Reprises jeudi et vendredi.

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