Le procès pénal du négociant en matières premières Trafigura et de son ancien directeur opérationnel s’est ouvert lundi à Bellinzone. C’est la première fois qu’une entreprise comparaît devant le Tribunal pénal fédéral pour des faits de corruption à l’étranger.
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2 décembre 2024 – 20h03
(Keystone-ATS) Trafigura, l’un des principaux négociants mondiaux en matières premières et société mère de la société belge de zinc Nyrstar, aurait versé 4,3 millions d’euros à un haut responsable de la compagnie pétrolière nationale angolaise Sonangol, via un compte bancaire à Genève. Ce manager, considéré comme un fonctionnaire angolais par les autorités suisses, aurait également reçu 604 000 dollars en espèces et bénéficié du paiement de son séjour à l’hôtel par Trafigura.
Ces paiements, effectués entre 2009 et 2011, auraient permis à Trafigura d’obtenir de lucratifs contrats de stockage et de transport de pétrole pour le compte de la Sonangol. Le ministère public fédéral (MPC) estime que Trafigura a réalisé un bénéfice de 143,7 millions de dollars sur ces contrats.
En parallèle avec le Crédit Suisse
Dès le premier jour du procès, les avocats de Trafigura ont fait un parallèle avec une décision récente dans l’affaire du Crédit Suisse, où la condamnation de la banque aux trois voiles a été annulée après le décès d’un ancien employé. “Sa mort rend impossible de déterminer si la banque a enfreint la loi sans violer la présomption d’innocence du défunt”, a déclaré la cour d’appel.
Myriam Fehr Alaoui, avocate de Trafigura, a évoqué le cas de l’ancien PDG de Trafigura, décédé en 2015. Elle a demandé au tribunal : « Comment une entreprise peut-elle être tenue pour responsable d’une infraction qui aurait été commise par une personne dont la culpabilité n’a pas été établie et ne pourra jamais être établie, sans violer le principe fondamental de la présomption d’innocence ? »
L’autre avocat de Trafigura, Jean-François Ducrest, a demandé l’annulation du témoignage d’un ancien membre du conseil d’administration, obtenu en échange d’une réduction de peine. « Dès le début, tout était défectueux », a-t-il soutenu.
Le procès devrait durer plus de trois semaines. Trafigura risque une amende de 5 millions de francs, ainsi que le remboursement des bénéfices indûment perçus. L’ancien directeur des opérations risque une peine de cinq ans de prison, avec possibilité de faire appel. Selon son avocat, Daniel Kinzer, il nie toutes les accusations.
Le responsable angolais qui aurait reçu les pots-de-vin était également présent au tribunal lundi, tout comme un intermédiaire suisse.