Rencontre avec deux banquiers centraux

Les taux d’intérêt bas d’avant la pandémie ne reviendront pas de sitôt et l’imprévisibilité doit désormais faire partie de l’équation économique


Publié à 00h51

Mis à jour à 6h00

Les banques centrales sont en passe de gagner leur guerre contre l’inflation, mais elles doivent rester en alerte face à la nouvelle normalité de l’économie mondiale, plus complexe et plus incertaine que jamais.

Deux banquiers centraux, le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, et le président de la Banque fédérale d’Allemagne, Joachim Nagel, ont présenté mercredi les leçons qu’ils ont tirées du plus récent épisode inflationniste à la Conférence de Montréal.

La première leçon est que l’inflation fait mal. “C’est quelque chose que nous savions déjà, mais beaucoup ont connu l’inflation pour la première fois”, a déclaré Tiff Macklem. L’inflation est notre ennemi commun. »

Si le gouverneur de la Banque du Canada n’a pas eu la vie facile ces deux dernières années, son homologue allemand a vécu une expérience encore plus difficile.

PHOTO MARIKA VACHON, LA PRESSE

Le président de la Deutsche Bundesbank, Joachim Nagel

Joachim Nagel a pris ses fonctions en janvier 2022, alors que l’inflation était considérée comme « transitoire » par les banques centrales. Un mois plus tard, la Russie envahissait l’Ukraine, faisant monter en flèche les prix de l’énergie. Le taux d’inflation a culminé à plus de 10 % dans la zone euro en 2022.

Comme son homologue canadien, Joachim Nagel estime que restaurer la stabilité des prix est ce que les banques centrales peuvent faire de mieux pour une économie. La tâche de la Banque centrale européenne (BCE) est très compliquée, a-t-il rappelé. « Il y a 20 pays et 26 personnes autour de la table » (dont les dirigeants de la BCE).

La BCE et la Banque du Canada sont les deux seules banques centrales parmi les pays du G7 à avoir amorcé une baisse de leur taux directeur.

La Réserve fédérale américaine, aux prises avec une inflation tenace, a décidé mercredi de maintenir son taux et ne prévoit qu’une seule réduction d’ici la fin de l’année.

L’inflation est tenace et sa trajectoire future est impossible à prévoir, a reconnu Joachim Nagel. “Il est encore trop tôt pour le savoir”, a-t-il déclaré. Des recherches supplémentaires sont nécessaires et pour dissiper l’incertitude, il faudrait surtout mettre un terme à la guerre en Ukraine. »

Depuis les récentes élections européennes, avec la montée de l’extrême droite, les sources d’incertitude sont encore plus grandes, selon le président de la Bundesbank. Les politiques budgétaires des gouvernements, en Europe comme ailleurs, peuvent contrecarrer le travail de la politique monétaire, a-t-il déclaré.

PHOTO MARIKA VACHON, LA PRESSE

Tiff Macklem, gouverneur de la Banque du Canada

Tant en Europe qu’au Canada, les banques centrales ne pourront pas crier victoire. “Le travail n’est pas terminé”, a déclaré Tiff Macklem. “Nous ne sommes pas en pilote automatique”, a ajouté son homologue allemand.

Les taux d’intérêt devraient continuer de baisser, mais beaucoup moins vite qu’ils n’ont augmenté, a répété le gouverneur de la Banque du Canada. Surtout, personne ne devrait s’attendre à ce que les taux reviennent au niveau très bas d’avant la pandémie.

Nous devrons avant tout apprendre à tolérer davantage d’incertitude, notamment en raison des guerres et du changement climatique. Il ne faut pas rester paralysé et attendre que l’incertitude disparaisse, car cela n’arrivera pas, estime Tiff Macklem.

 
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