La Haute-Garonne rurale, fief de la gauche où prospère le RN : Actualités

La vague RN a peut-être frappé ici aussi, à Cazères – 41 % aux élections européennes, au cœur de la campagne haut-garonnaise – mais beaucoup refusent encore, dans les allées du marché, les tracts distribués par le candidat du Rassemblement national. . Jusqu’à cette main qui prend les devants et s’en empare.

L’affiche en poche, Luc Cassedanne, 58 ans, préfère ne pas dire tout haut pour qui il votera dimanche, au premier tour des législatives anticipées, mais ce sera « pour un grand changement » et « plus pour à droite qu’à gauche», sourit-il d’un air entendu.

Lui et sa femme Carine ont fui il y a quelques années l’Essonne et son « insécurité » pour s’installer dans un village de campagne, à une demi-heure de Toulouse, sans parvenir à chasser leurs angoisses. Puis est venue une peur, celle d’être déclassés. « Nous, la classe moyenne, nous disparaissons », a déclaré samedi Carine Cassedanne.

Sécurité et pouvoir d’achat : ce sont les thèmes de campagne qui, avec l’immigration, ont placé le RN en tête dans 93% des communes le 9 juin.

Nettement battu en 2022 par le socialiste Joël Aviragnet, Loïc Delchard (RN) récidive pour cette campagne éclair.

Sur ce marché où le député sortant, cette fois sous l’étiquette Nouveau Front populaire, est également venu distribuer des tracts accompagné de la populaire présidente de région Carole Delga, le candidat du RN a provoqué des réactions hostiles. « Ça pue la merde », crie une jeune femme. « Ça me dégoûte », lance un passant, viennoiserie sous le bras.

– Virage à droite –

Pour Louis Aliot, maire RN de Perpignan ayant vécu dans les environs de Cazères, les raisons du virage à droite de ce bastion du PS sont à chercher chez les « anciens électeurs socialistes » ou « les jeunes dont les parents, grands-parents-parents ont voté socialiste ». » et « qui basculent au RN ».

“Dans cette ruralité, il y avait une gauche patriote, attachée aux traditions, aux valeurs du patriotisme. Elle a muté”, analyse pour l’AFP l’homme fort du RN dans la région.

Vincent Gaudin, le remplaçant de Loïc Delchard, en fait partie. Sa carte PC, conservée jusqu’à ses vingt ans ? Un « héritage familial », vite rangé quand il « a commencé à s’intéresser un peu à la politique ».

Ancien délégué syndical, il affirme avoir alors compris que la gauche et les syndicats « étaient là plus pour leur nourriture » que pour défendre les travailleurs.

Soukaïna Vigneres, coach professionnelle de 42 ans vivant dans un village à une trentaine de kilomètres de Toulouse, était plutôt favorable au Parti socialiste mais envisage actuellement de voter pour Bardella dimanche.

Depuis le parking d’un supermarché discount de Castelnau-d’Estrétefonds, cette maman pressée de faire en sorte que « la glace des enfants ne fonde pas », raconte sa « lassitude » de gauche. “Nous constatons qu’il n’y a pas eu beaucoup de changements dans ce qu’ils proposent.”

– « Colère froide » –

« N’étant pas au pouvoir, le RN laisse grandir tous les espoirs. On entend ‘Ce sont les seuls qu’on n’a pas essayés'”, analyse le politologue Emmanuel Négrier.

Parmi les électeurs rencontrés sur le marché de Cazères, Joël Aviragnet a décelé une « colère froide », un « damné pour damné » qui porte les électeurs vers les vagues RN enflées. « Il faut leur donner de l’espoir », a-t-il dit.

Dans cette partie de la Haute-Garonne parsemée de champs de maïs, les nombreuses personnes en situation de précarité ressentent un « sentiment d’abandon très fort », raconte Carole Delga.

La faute à un pouvoir macroniste « qui est tout ce que les gens des campagnes ne sont pas (…) c’est à dire la culture de la main tendue, de ne pas juger, de travailler, de ne pas beaucoup parler… »

Face à cette ruralité, les agriculteurs de Haute-Garonne ne sont pas épargnés par ce basculement vers l’extrême droite. Une figure locale du puissant syndicat agricole FNSEA a par exemple défrayé la chronique en se substituant à un candidat LR soutenu par le Rassemblement national.

Installés sur une crête entre deux coteaux de Saint-Frajou, Thierry et William Salles, deux frères céréaliers proches de la retraite, gardent un oeil sur leur moissonneuse et détaillent les raisons du désespoir qui les a poussés à voter RN.

« Paris et Bruxelles » concentrent leur colère. Les normes européennes étouffantes, les contrôles à répétition, les démarches administratives à accomplir, ils énumèrent toutes ces critiques qui ont alimenté la fureur du monde agricole en début d’année.

Et puis il y a cette « injustice » ressentie par les campagnes envers les citadins.

Pourtant, souffle William d’une voix triste, « dans la ville, ils ont leur réalité. La nôtre est de faire vivre les autres, mais la leur n’est pas forcément de nous laisser vivre. »

 
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