50 millions versés à la Barbade

50 millions versés à la Barbade
50 millions versés à la Barbade

Le fisc vient de perdre une bataille importante contre la famille de l’ex-magnat de la gestion des déchets Lucien Rémillard, devenu « résident fiscal non domicilié » de la Barbade. La Cour canadienne de l’impôt vient de valider le paiement de plus de 50 millions de dollars que lui a fait sa fiducie familiale, évitant ainsi une dizaine de millions d’impôts, plus les intérêts.


Publié à 1h01

Mis à jour à 6h00

La dispute durait depuis cinq ans entre Ottawa et les Rémillard. La décision du juge Guy Smith permet de déduire des revenus de la fiducie les millions versés au patriarche, dont il est bénéficiaire avec ses fils Maxime et Julien.

En 2013, l’homme d’affaires a vendu sa société de décharge RCI Environnement au géant américain des déchets Waste Management pour environ 300 millions.

La même année, Lucien Rémillard déclare avoir cessé de vivre au Canada pour devenir résident de la Barbade, un paradis fiscal notoire. Ensuite, la fiducie lui a fait un gros paiement de 30 millions.

En 2015, Rémillard vend le luxueux hôtel Saint-James, dans le Vieux-Montréal, pour 24 millions. Ensuite, le trust Historia lui a fait un autre versement de 20 millions.

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PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES -

Les 24 millions obtenus lors de la revente de l’hôtel Saint-James en 2015 ont été versés à l’actif du trust Historia, qui a versé au total 50 millions à Lucien Rémillard.

La fiducie a alors réduit son revenu imposable d’un montant équivalent aux deux versements (plus de 50 millions). Cette déduction a permis d’économiser 17 millions de dollars en impôts fédéral et québécois.

Petite consolation pour le fisc : la loi prévoit un impôt de 15 % à Ottawa lors du versement d’un dividende à un non-résident, dans le cas d’un pays ayant une convention fiscale avec le Canada, comme la Barbade. En 2013 et 2015, le trust Historia a donc dû retenir 7,5 millions sur les versements à Rémillard, qui a donc reçu à l’époque des chèques totalisant 42,5 millions.

Le Québec, pour sa part, n’a pas perçu un sou d’impôt sur cette somme.

Une dizaine de millions d’impôts perdus

Manque à gagner total pour le fisc : 9,5 millions, en plus des intérêts de plus de 3 millions, selon les calculs de -.

L’avocat fiscaliste d’Historia Trust, Paul Ryan, a assisté - comprendre certains points techniques de la décision, mais a réservé ses commentaires, étant donné que les délais de recours n’ont pas expiré.

Le procureur de Justice Canada au dossier, Vlad Zolia, a refusé de répondre à nos questions et nous a référé au service des communications du gouvernement. Revenu Canada a cependant catégoriquement refusé de fournir une quelconque explication permettant d’en comprendre la cause. Ottawa n’a pas non plus voulu dire s’il avait l’intention de faire appel.

Résident de la Barbade

Depuis 2013, Lucien Rémillard affirme ne plus vivre au Canada et être devenu résident fiscal de la Barbade.

En 2015, Ottawa a entamé un audit de son lieu de résidence, notamment en envoyant des demandes d’informations aux États-Unis, en Suisse et à la Barbade. Lucien Rémillard a tenté d’empêcher ces démarches, mais en 2022, la Cour fédérale a refusé d’annuler les procédures.

Dans sa décision, le juge explique qu’un vérificateur de Revenu Canada a également contacté le Groupe de travail international conjoint sur le partage d’informations et la collaboration. Cette organisation de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) tente « d’identifier les contribuables qui prétendent émigrer afin d’éviter de payer des impôts », souligne-t-il.

Dans une lettre adressée à Revenu Canada en 2017, l’ancien avocat de Rémillard a déclaré que son client est un « résident non domicilié » de la Barbade. Lors de ses séjours dans le pays, « il réside aux résidences principales ou secondaires de ses fils », a-t-il également déclaré au fisc, selon le jugement de 2022.

Revenu Canada lui a alors demandé « d’expliquer ce qu’est un résident non domicilié à la Barbade », précise la décision, sans préciser quelle réponse le fisc a reçue.

La plus récente décision sur le paiement de 50 millions du juge Guy Smith affirme qu’Ottawa nie toujours que Rémillard soit un résident fiscal de l’île des Caraïbes.

Selon les informations de -Le contrôle de Revenu Canada à ce sujet s’est toutefois terminé en 2023, alors que le juge était en délibéré.

L’impact d’une convention fiscale

«Ce qui fait mal, c’est l’interposition d’un paradis fiscal», estime Guy Goulet, professeur de fiscalité à l’Université du Québec en Outaouais. Si le bénéficiaire avait été en France par exemple, il aurait au moins contribué aux services publics ailleurs. »

Les dividendes d’origine canadienne versés à des non-résidents sont imposés à 25 % en général, mais seulement à 15 % s’ils sont situés dans un pays avec lequel le Canada a une telle convention.

L’entente de la Barbade avec Ottawa a donc permis à Rémillard d’économiser 5 millions d’impôts sur son dividende de 50 millions, affirme M. Goulet. « On pourrait se demander pourquoi le Canada a signé une telle convention. »

Apprendre encore plus

  • 148
    Nombre d’enseignants du primaire ou du secondaire qui peuvent payer la somme de 12,7 millions en impôts et intérêts que les Rémillard ont économisés grâce à leur victoire à la Cour canadienne de l’impôt

    Source : Institut de la statistique du Québec

 
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