Québec | Un soin de rajeunissement qui apporte de la puissance

(Baie-Comeau) « Le courant est fort par endroits ! », raconte un employé d’Hydro-Québec en cette fraîche matinée de septembre. Ses paroles n’ont rien à voir avec une quelconque charge électrique ; ils font plutôt référence à la puissance des tourbillons en aval du complexe Manic-2. Assis dans un conteneur, devant une courtepointe d’écrans, cet opérateur de sous-marin manœuvre le petit submersible d’Hydro-Québec avec un levier de commande aux allures de manette de jeu vidéo.

L’appareil semblable à un film Titanesque navigue habilement dans les eaux froides et sombres de la rivière Manicouagan et tente une incursion dans une sortie de la centrale, appelée Jean-Lesage. «Pour des raisons de sécurité, nous préférons désormais le sous-marin aux plongeurs qui devaient faire ce travail», explique Marc-André Marcoux, chargé de projet de développement énergétique des centrales électriques à Hydro-Québec.

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PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Un employé d’Hydro-Québec exploite un sous-marin pour évaluer l’état des composantes de la centrale Manic-2.

L’opération vise à évaluer l’état des composants des grosses canalisations en vue du remplacement de six des huit groupes turbine-alternateur de la centrale dans les années à venir. Car Manic-2 s’apprête à accueillir un projet d’envergure qui lui permettra d’ajouter 20 % de puissance (245 MW), l’équivalent de ce qui est nécessaire pour alimenter 88 000 foyers. « Mais changer les turbines demande de la préparation. Disons que ce n’est pas comme ouvrir le capot d’une voiture, retirer le moteur pour en installer un nouveau», explique M. Marcoux.

L’ensemble du site doit être adapté. «Lors de la construction de la centrale, les turbines étaient installées avant que les murs et le toit de la centrale ne soient surélevés», se souvient Steeve Gagnon, directeur de la production et de l’entretien de la centrale. Résultat : pour changer ces immenses structures, les équipes vont devoir manœuvrer dans un espace limité.

Déjà, à l’extérieur, des dizaines de salariés s’affairent à adapter les structures pour les travaux préparatoires. À l’intérieur, la nouvelle machinerie nécessaire pour soulever, manipuler, retirer et insérer d’énormes structures est fonctionnelle. «En fait, il faut préparer le chantier avant de commencer les vrais travaux préparatoires», poursuit M. Gagnon. L’opération d’augmentation de puissance de la centrale s’étalera sur huit ans : deux années de travaux préparatoires suivies d’une année de travaux de remplacement de chacune des turbines.

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Les salariés au travail en prévision des travaux de remplacement des groupes turbine-alternateur qui augmenteront de 20% la puissance de la centrale Manic-2

Plus d’électrons avec les mêmes installations

Manic-2 n’est pas le seul complexe qui va subir un rajeunissement dans les années à venir pour augmenter sa puissance. Pour répondre à la demande croissante en électricité, Hydro-Québec revisitera sept centrales hydroélectriques. L’objectif : augmenter le nombre d’électrons produits à partir d’une même quantité de ressources.

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Six groupes turbine-alternateur similaires à celui-ci seront remplacés dans les années à venir à Manic-2.

Pour accroître la puissance des installations existantes, plusieurs options étaient sur la table. «Nous aurions pu augmenter la hauteur de la chute ou nous organiser pour augmenter le débit d’eau entrant dans les turbines», explique Marc-André Marcoux. Mais dans le premier cas, il aurait fallu augmenter la hauteur du barrage et noyer davantage de territoire. La deuxième option nécessiterait le remplacement d’importantes canalisations.

Hydro-Québec a plutôt décidé de remplacer les groupes turbine-alternateur par de nouvelles technologies plus efficaces. Dans son plan stratégique, elle souligne également l’importance d’investir des sommes substantielles pour redonner de l’éclat à un réseau et des infrastructures « exploités à la limite de leurs capacités ».

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Steeve Gagnon et Marc-André Marcoux d’Hydro-Québec expliquent les travaux qui se dérouleront sur huit ans à la centrale Manic-2.

D’ici 2035, l’entreprise publique estime pouvoir ajouter 2 000 MW d’électricité à son réseau d’installations existantes. Un gain substantiel qui représente 5% de sa capacité actuelle (37 000 MW), soit l’équivalent de la consommation moyenne de 720 000 foyers.

Travaux en cours

Les travaux de remplacement ont débuté à trois centrales, soit Carillon, La Tranchée et Rapide-Blanc. À la centrale des Outardes-2, à une vingtaine de kilomètres de Baie-Comeau, les travaux préparatoires vont également bon train. «Nous prévoyons qu’il y aura entre 150 et 200 employés sur le site lors des phases de remplacement», précise Karine Gagné, responsable du projet de remplacement à la centrale des Outardes-2, située à une vingtaine de kilomètres de Baie-Comeau.

Consommation d’électricité prévue d’ici 2050

La décarbonation et la croissance économique reposeront sur l’électrification, en particulier dans les secteurs à forte intensité énergétique des transports et du chauffage des bâtiments. La consommation électrique du Québec devrait augmenter de 60 TWh d’ici 10 ans et plus que doubler d’ici 2050, selon les prévisions d’Hydro-Québec. Pour répondre à cette demande, l’entreprise prévoit ajouter 9 000 MW de puissance d’ici 2035, soit l’équivalent de trois de ses plus grandes structures : Robert-Bourassa (LG-2), Manic-5 et le complexe de la Romaine. Près de 2 000 MW proviendront du remplacement des groupes turbine-alternateur.

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Déjà, une équipe d’Hydro-Québec coordonne les activités des sous-traitants travaillant à la préparation du chantier. Des remorques sont entassées à une centaine de mètres de la centrale et un stationnement a été aménagé près de la route 138. «De là, des navettes pourront amener les travailleurs sur le chantier», précise M. Gagné.

Un peu en retrait, Hydro-Québec a érigé un immense dôme blanc équipé d’un système de chauffage et de ventilation. C’est ici que les employés du fabricant de turbines GE Renewable Energy assembleront les dernières composantes des structures qui seront transportées par barge depuis Montréal.

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Le dôme blanc où travailleront les employés du turbinier GE Renewable Energy pendant les années de remplacement à la centrale des Outardes-2.

Au total, plus de 400 personnes convergeront vers les trois chantiers de réparation non loin de Baie-Comeau : Outardes-2, Manic-2 et Manic-3. «On essaie d’embaucher des gens d’ici, mais c’est sûr que certains viendront de l’extérieur», précise M.moi Gagné, soulignant que les logements sont rares dans cette ville de la Côte-Nord. Le taux d’inoccupation des logements y oscille depuis des années autour de 0,5%.

Le remplacement des groupes turbine-alternateur dans sept centrales électriques au cours de la prochaine décennie marque, pour Hydro-Québec, le retour de grands projets qui mobiliseront des centaines de travailleurs.

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La machinerie nécessaire au retrait, à la manutention et au remplacement des groupes turbine-alternateur – actuellement installés sous le plancher – est déployée dans la centrale des Outardes-2.

L’entreprise publique prévoit d’ajouter jusqu’à 2 200 MW supplémentaires en construisant « de nouvelles centrales hydroélectriques, y compris des centrales de pompage-turbinage ». Hydro-Québec a lancé une étude préliminaire au printemps 2023 pour évaluer le potentiel de la rivière Petit Mécatina.

 
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