vêtements neufs vendus dans les friperies

Alors que l’inflation fait mal aux ménages québécois, de nouveaux vêtements portant encore leurs étiquettes d’origine se retrouvent dans les friperies, une tendance croissante avec la croissance des achats en ligne et l’avènement d’entreprises comme Shein.

Au Comptoir Emmaüs, rue Saint-Vallier Est à Québec, Bibianne Nickner est responsable du tri. Elle reçoit régulièrement des vêtements neufs qui n’ont jamais été portés.

« Quand j’ai commencé ici en 2012, nous recevions principalement des vêtements d’occasion et quand j’ai repris, en 2022, j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de vêtements neufs avec encore l’étiquette, achetés en ligne. C’était épouvantable. Je n’avais jamais vu ça”, a déclaré M.moi Nickner qui a pris une pause entre deux périodes pour travailler comme préposé aux bénéficiaires.

La mode flash mise en avant

Selon Myriam Laroche, cofondatrice de Collectif Détour, une agence-conseil spécialisée en développement durable du textile et de l’habillement, la fast fashion (ou mode flash) est à l’origine de la surconsommation de vêtements au Québec comme ailleurs.

« La fast fashion, c’est Shein, H&M, Zara, Forever 21. Sur Shein, vous pouvez acheter une robe pour moins d’un café au lait », dit-elle.

De gauche à droite, Jana Theresa Schmidt, responsable des collaborations et partenariats au Comptoir Emmaüs à Québec, Myriam Laroche, cofondatrice du Collectif Détour, et Bibianne Nickner, responsable du tri au Comptoir Emmaüs de la rue Saint-Vallier Est.

Photo Diane Tremblay

Plusieurs pays commencent à légiférer pour lutter contre le gaspillage vestimentaire. C’est notamment le cas en France, qui a adopté une loi interdisant la destruction des vêtements invendus. En Suède, le gouvernement a introduit une taxe sur les vêtements non recyclés pour encourager leur réutilisation.

Augmentation inquiétante

Au Québec, selon les plus récentes données de Recyc-Québec, on estime que 81 000 tonnes de vêtements ont été éliminées en 2021. En incluant toutes les catégories de matières textiles (peluches, chaussures, sous-produits textiles, etc.), ce non moins de 292 000 tonnes ont été détruites. Plus inquiétant encore, cela représente une augmentation de 80 % au cours de la dernière décennie.

Selon Myriam Laroche, cofondatrice du Collectif Détour, la fast fashion est à l’origine de la surconsommation de vêtements, au Québec comme ailleurs.

Photo fournie par Le Comptoir Emmaüs

«Pendant la pandémie, nous avons commencé à acheter davantage de fast fashion en ligne. Étant donné qu’il est souvent plus coûteux de retourner des vêtements qui ne vous vont pas, de nombreux vêtements neufs ou presque neufs finissent dans des brocantes », souligne M.moi Le rocher.


Chez Zara, cette tunique était vendue 79,90$, chez Emmaüs, elle sera vendue 12$.

Photo Diane Tremblay

“La vraie solution est de réduire la quantité de vêtements neufs que nous fabriquons, mais cela va à l’encontre des marques et des détaillants qui veulent faire plus de ventes chaque année”, explique-t-elle.

Or, près de 95 % des textiles mis au rebut peuvent être revendus ou recyclés, assure M.moi Le rocher.

« En 2000, nous avons produit 50 milliards de nouveaux vêtements dans le monde. Quinze ans plus tard, ce chiffre atteignait 100 milliards. À la lumière de ces données choquantes, nous avons des doutes sur ce qui nous attend en 2025. La nouvelle industrie du vêtement avance à une vitesse vertigineuse et ses impacts environnementaux sont colossaux », a poursuivi l’intervenante.

À l’approche du Jour de la Terre, le 22 avril, Mmoi Laroche tient à sensibiliser le public aux effets des déchets textiles.


Le service de tri du Comptoir Emmaüs à Québec reçoit régulièrement de nouveaux vêtements comme ceux-ci, qui portent encore leurs étiquettes d'origine.

Pyjama bébé, jamais porté.

Photo fournie par Le Comptoir Emmaüs

Quelques chiffres

  • 64 000 tonnes de matières textiles ont été valorisées en 2021 par les brocantes, les centres ressources, les centrales de dons, etc.
  • Pour réduire le gaspillage vestimentaire, le Comptoir Emmaüs a envoyé l’année dernière 31 971 kg de vêtements à une organisation partenaire au Pérou qui vient en aide aux personnes souffrant d’exclusion sociale.
  • 14,6 milliards de dollars, c’est le montant dépensé par les ménages québécois en vêtements et chaussures en 2023 (+20,5 % par rapport à 2021).
  • 30 % des achats en ligne en 2023 concernent des vêtements, chaussures et accessoires.
  • 51 % des achats en ligne au Québec en 2023 ont été effectués sur le site Amazon.

(Sources : Recyc-Québec, Comptoir Emmaüs, NETendances et ISQ)

Avez-vous des informations à nous partager sur cette histoire ?

Écrivez-nous au ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Le chiffre d’affaires de Vicat a augmenté de 7,9% au premier trimestre avec la zone Amériques
NEXT Tesla, les résultats contrastés de l’industrie