Découvrir la décolonisation de l’Angola à travers une série ? Pourquoi pas. Les profanes apprendront certainement quelque chose sur l’histoire de ce pays, mais ce n’est pas l’essentiel. Bien sûr, la mini-série en trois épisodes de Sérgio Graciano parle aussi de l’influence du Portugal sur l’Angola et ses habitants, de l’exploitation de ses ressources, de l’indépendance et de ses conséquences, mais elle invite surtout au voyage, dans l’espace et en mots.
Nous suivons le Dr Ruy Duarte De Carvalho, anthropologue et poète (il s’agit d’une adaptation de sa trilogie littéraire les fils de Prospero)qui vit en Angola depuis des décennies. Son père José Julio y était déjà allé. Ainsi, lorsqu’un homme âgé prétend connaître l’emplacement des “English papers”, des documents ayant appartenu à son père, l’érudit lusophone n’hésite pas à se lancer dans l’aventure en compagnie de son fidèle cuisinier, Jonas Trindade.
Silence et belles paroles
Mais on est loin de ça Tintin au Congo : Jonas n’est pas le compère natif, mais un personnage complexe, à qui la série consacre le premier épisode. Amoureux des classiques grecs, il incarne aussi la mémoire du pays, passant d’aide-cuisinier au service des colons à résistant, puis à homme libre… avant de s’engager auprès d’un leader, dans une relation qui évoque parfois amitié. Merci à lui, mais aussi à Severo, un « sous-produit de la colonisation » présenté plus tard, revisitons le XXe siècle, couvrant la dictature portugaise, la révolution des œillets, les guerres des années 1990…
C’est le paradoxe de la série, qui interroge la colonisation en arrière-plan, mais laisse en suspens la résolution des questions qu’elle pose. Les relations de domination sont évoquées mais jamais décidées : on laisse le soin au spectateur de le faire.
Comme si la poésie, présente aussi bien dans la voix du narrateur que dans celle de Ruy, mais aussi dans les personnages secondaires, nous appelait à contempler la beauté du monde affranchie de la morale. Les mots donnent parfois lieu à de délicieuses invectives : « Je préfère la compagnie des moustiques à celle des banquiers. Les deux nous sucent le sang, mais les moustiques sont plus honnêtes. »
Mais si la parcimonie est importante, les silences le sont encore plus. Beaucoup de sentiments passent uniquement par le regard, par ailleurs centré sur les Angolais eux-mêmes, blancs mais surtout noirs. Lorsqu’un Européen filme l’Afrique, c’est suffisamment rare pour être souligné.
journaux anglais, Jusqu’à 20h55
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