dans les sables mouvants de « Hécube, pas Hécube »

Eric Génovèse, Elissa Alloula, Séphora Pondi and Denis Podalydès in “Hecube, not Hécube”, June 10. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE

Tout s’est passé très vite le 23 mai dans la salle de répétition de la Comédie-Française : « J’aimerais que nous jouions à partir du prologue et jusqu’au texte », a suggéré Tiago Rodrigues aux acteurs, qui ont immédiatement enchaîné les scènes à un rythme soutenu. Une semaine plus tard et un étage plus haut, dans la salle Richelieu, la même équipe a pris le temps cette fois de démêler les lignes une à une. Maintenant, il y a beaucoup de lignes dans Hécube, pas Hécubela première pièce écrite (et mise en scène) par le directeur du Festival d’Avignon pour la troupe de la Comédie-Française.

Dans un prologue, quatorze scènes et un épilogue, Hécube, pas Hécube va et vient du poème d’Euripide au drame humain né sous la plume de l’auteur portugais. Un croisement d’écritures anciennes et contemporaines auquel l’artiste ajoute cette touche personnelle qui est devenue sa marque de fabrique : le théâtre dans le théâtre. « C’est l’histoire d’une actrice qui joue une tragédie alors qu’elle en vit une dans sa vie. » Tiago Rodrigues relie le destin d’Hécube, reine de Troie qui réclame justice pour le meurtre de son fils, à celui de Nadia, une comédienne qui porte plainte pour maltraitance envers son enfant autiste. Le passage d’une héroïne à l’autre est le nerf d’un spectacle qui pourrait bien entraîner le public vers une profusion de cliffhangers émotionnels.

Lire le résumé : Article réservé à nos abonnés Tiago Rodrigues boucle un premier Festival d’Avignon de grande qualité

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« Hécube nous permet de saisir la puissance de l’amour inconditionnel d’une mère pour son fils, explique le dramaturge. Ce qui m’intéresse, c’est de découvrir comment une comédienne qui connaît cette tragédie par cœur peut mieux encaisser les coups du sort, comment le théâtre peut aider dans la vie. » Elsa Lepoivre est à la fois ces mères en colère, dont la dignité ne cède rien au pathos. Autant dire qu’il lui faut sans cesse se démarquer sans jamais se perdre, quitte à frôler une forme de schizophrénie. Ce jeu de ping-pong exige une concentration de chaque seconde : « Quand j’aurai construit mon voyage de A à Z en jalonnant chacune de ses étapes, alors je pourrai plonger dans l’émotion, la laisser déferler puis la contenir la seconde suivante avant, encore une fois, de la pousser à l’extrême. », dit l’actrice.

Tirez sur le stress

Fin mai, à Paris, elle doit encore mémoriser un texte livré quelques jours auparavant par l’auteur. Une livraison tardive, à laquelle les acteurs du Français ne sont pas habitués. “J’arrive toujours le premier jour des répétitions avec mon texte, je consacre mes week-ends à apprendre ma partition”, explique Elsa Lepoivre. Pas question donc de relâcher l’attention. Cette légère dose de stress ajoute du piquant au travail. Denis Podalydès a beau tout savoir (ou presque) du théâtre, il l’apprivoise lui aussi “l’inconfort” ce qui génère, dit-il, un morceau « parfois émouvant ». Cette instabilité le stimule, même si le défi lui fait peur. :« À un moment donné, je dois faire semblant de lire sur mes paumes ouvertes le rapport très technique des plaintes déposées au tribunal, ce passage me terrifie. » Le député marche sur une trajectoire parallèle à celle empruntée par Elsa Lepoivre. Il porte sur ses épaules les rôles d’Agamemnon et de procureur. Ou les deux avocats que les mères affrontent.

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