A 79 ans, cet auteur franco-américain d’environ 160 livres est l’invité d’honneur du Salon du livre jeunesse de Montreuil.
Les écrans sont « un poison » selon la reine de la littérature jeunesse, Susie Morgenstern, qui écrit sans relâche et n’entend pas, à 79 ans, ralentir le rythme frénétique des publications. Auréolé de la Grande Ourse, prix suprême du Salon du livre jeunesse de Montreuil qui s’ouvre mercredi près de Paris, ce Franco-Américain est l’auteur d’environ 160 livres.
Un de vos éditeurs nous a dit que vous aviez publié 10 livres en 12 mois. Combien d’heures par jour travaillez-vous ?
Susie MORGENSTERN. – Je me lève très tôt et je suis à mon bureau à 6h30, 7h00… Et je travaille jusqu’à 7h00. Je mange, je cuisine. Je passe des appels téléphoniques. Mais je suis assis de 7h à 19h. Il y a aussi beaucoup d’e-mails.
Tu ne vas pas ralentir ?
J’accélère. Publier autant n’est pas le bienvenu. Mais je ne sais pas, je suis une machine. J’accélère comme quelqu’un qui sait qu’il n’a pas tout le temps possible. Et je suis très loin d’être perfectionniste. J’écris, j’écris. Au-dessus de mon bureau se trouve le slogan que Nike m’a volé : Just do it. Faites ce que vous avez à faire. C’est une vie très heureuse quand on fait ce que l’on aime faire.
Si vous regardez en arrière, quel est votre livre préféré ?
C’est toujours ce sur quoi je travaille. C’est ce qui m’excite. Certains dont je ne me souviens même pas. Le livre qui a lancé ma carrière était probablement Les grosses pommes de terre (1979). On en a parlé dans les médias. Cela ne s’est pas bien vendu mais nous en avons parlé. Et ce livre pour adultes, Mes 18 exilés (une autobiographie en 2021). C’était phénoménal pour moi d’être interviewé, car personne n’interviewe les auteurs pour enfants.
Comment voyez-vous l’évolution de vos lecteurs, qui grandissent dans des conditions différentes par rapport à il y a 40 ans ?
Très différent. Je viens de devenir arrière-grand-mère, donc je m’intéresse beaucoup aux enfants en ce moment. Mon arrière-petit-fils est très différent de mes enfants. Et la terreur des enfants aujourd’hui, ce sont les écrans. C’est terrifiant de voir que les enfants ne lisent pas. Je peux moi-même faire défiler des vidéos, regarder les choses les plus idiotes et me rendre compte qu’une heure s’est écoulée.
Pourtant, le succès de ses livres montre qu’il y a de la place.
Oui, ils vendent. Et je suis tellement heureuse de dédicacer des livres et de voir des enfants les emporter. Mais la France est, comme on dit, une exception culturelle. Je ne sais vraiment pas ce qui va se passer. Je pense que nous sommes confrontés à une crise terrible, celle des écrans. Il faut faire quelque chose, je ne sais pas quoi. L’interdiction et la confiscation ne réussiront pas. Nous avons besoin d’une idée qui les fasse sortir des écrans. C’est du poison.
Au Festival de Montreuil, la préoccupation première est de promouvoir la lecture.
Oui, Montreuil est fantastique. Je suis la reine du 9-3. Je vais dans toutes ces écoles et j’aime ces enfants. Et ils lisent. Quand ils savent que l’auteur arrive, ils lisent et c’est génial.