Lundi, à Matignon, le Premier ministre a annoncé le passage en force du projet de financement de la sécurité sociale par l’activation de l’article 49.3. Une décision consciente, précipitée par la fin des négociations avec Marine Le Pen. Histoire d’un changement.
Budget, 49.3, censure. Et la crise ? En quelques heures, le sort du gouvernement de Michel Barnier était scellé. Et c’est finalement le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui aura déterminé le sort de Michel Barnier, piégé jusqu’au bout par Marine Le Pen et le Rassemblement national.
Tout commence ce lundi 2 décembre, à 13h45, dans l’enceinte du Palais de Matignon. Autour du Premier ministre se trouvent les présidents du groupe de base commune (Ensemble, Les Républicains) à l’Assemblée nationale et au Sénat. Avant le vote décisif du projet de loi, le chef du gouvernement a réuni les forces vives de son camp pour discuter de la marche à suivre. Un entretien impacté par un simple coup de téléphone.
En pleine intervention, Michel Barnier interrompt la réunion, rapportent les participants à BFMTV. Un appel entrant sur son téléphone. Il retourne le téléphone et le montre au public. L’écran affiche : « Appel entrant Marine Le Pen ».
«Excusez-moi», dit Michel Barnier. Il part aussitôt prendre au téléphone le chef des députés du Rassemblement national.
« Bonnes et mauvaises nouvelles »
Au bout du fil, un adversaire à qui il a déjà proposé deux concessions. D’abord la suppression de la surtaxe sur l’électricité le 28 novembre. Puis, quelques heures seulement avant cet appel, une suppression sur le remboursement des médicaments. Un point fixé par Marine Le Pen comme l’une des deux lignes rouges restantes pour éviter la censure.
Après cet appel, Michel Barnier revient vers ses invités. Il explique aux participants que Marine Le Pen lui a annoncé « une bonne et une mauvaise nouvelle ». La bonne nouvelle, c’est qu’elle renonce à réclamer une mesure sur les cotisations patronales. Le mauvais ? Outre les médicaments, elle souhaite un revirement du gouvernement sur le report de l’indexation des retraites.
Au retour de Michel Barnier, le ton change. Tous les participants sont unanimes :
« Michel Barnier nous fait comprendre que ça suffit. Que les négociations sont terminées.
La chute inévitable ?
Michel Barnier comprend alors que Marine Le Pen ne lâchera rien, quoi qu’elle fasse. Et quoi qu’il propose, cela ira jusqu’à la censure. Il a dit, en substance, « chaque fois que j’abandonne quelque chose, elle demande autre chose », témoignent les participants.
Chute du gouvernement, censure du budget : quelles pourraient être les conséquences pour le secteur immobilier ?
Le négociateur, artisan des discussions difficiles sur le Brexit, n’a pas réussi à convaincre le parti d’extrême droite. C’est à ce moment qu’il a été décidé d’activer l’article 49.3. Dans un message aux forces du parti, il l’annonce sobrement :
« Comme vous l’imaginez, nous sommes dans un moment grave. (…) J’ai décidé de demander des comptes à notre gouvernement sur les conclusions du CMP sur le PLFSS. Je le ferai cet après-midi après avoir cherché jusqu’au bout des compromis dans un esprit de dialogue”, signe-t-il “amicalement”.
Une décision provoquant inexorablement le dépôt de motions de censure, et sa chute ? Réponse ce mercredi, à 16h
Anne Saurat-Dubois avec Tom Kerkour