ce que l’on sait de la disparition de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal – Libération

ce que l’on sait de la disparition de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal – Libération
ce que l’on sait de la disparition de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal – Libération

Le romancier de 75 ans aurait été arrêté samedi 16 novembre à son arrivée à l’aéroport d’Alger. Emmanuel Macron s’est dit “très préoccupé” par la disparition de l’écrivain, connu pour ses positions très critiques envers le pouvoir algérien.

Depuis six jours, son téléphone sonne en vain. La voix calme et pensive de Boualem Sansal ne répond plus. Selon plusieurs médias français, le romancier et essayiste franco-algérien a été arrêté samedi 16 novembre à son arrivée à l’aéroport d’Alger. Il aurait été arrêté par des membres de la direction générale de la sécurité intérieure algérienne et devrait être présenté devant le procureur de la République.

Le président français Emmanuel Macron, qui a personnellement naturalisé l’écrivain cette année, a déclaré qu’il “très inquiet” par sa disparition, affirmant que le “Les services de l’Etat sont mobilisés pour clarifier sa situation”. Cela intervient dans un contexte de fortes tensions dans les relations diplomatiques entre Paris et Alger. La reconnaissance par la cet été de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental a provoqué la colère de l’Algérie, sponsor historique des indépendantistes du Front Polisario, qui réclament un référendum d’autodétermination sur ce territoire contesté.

Voix critique et indépendante

A 75 ans, cet homme aux longs cheveux grisonnants incarne une voix critique majeure envers le pouvoir algérien. Malgré la censure, il dénonce sans relâche l’autoritarisme d’Alger et la montée de l’islamisme, qui font de lui une figure redoutée des autorités. Né en 1949 à Theniet El Had, dans le nord du pays, cet ingénieur de formation est dans le collimateur des autorités depuis plus de deux décennies. En 1999, son premier roman Serment des barbares (Gallimard) attire l’attention en raison de ses critiques à l’égard de la gestion de l’Algérie post-indépendance, qu’il estime en proie à la corruption, aux violences ethniques et aux inégalités sociales.

Alors qu’il travaillait comme haut fonctionnaire au ministère de l’Industrie, il a été démis de ses fonctions en 2003 après avoir pris des positions publiques contre le régime. Figure de la littérature francophone contemporaine, il a publié une dizaine d’ouvrages, dont le village allemand (Gallimard, 2008), dans lequel il fait un parallèle entre nazisme et terrorisme islamiste, et 2084 : la fin du monde (Gallimard, 2015) qui lui vaut le Grand Prix du roman de l’Académie française.

Malgré les risques auxquels il est confronté, Boualem Sansal reste profondément attaché à son pays natal. Il continue à vivre longtemps à Boumerdès, ville portuaire située à une cinquantaine de kilomètres à l’est d’Alger. Il a refusé l’asile offert par la France et l’Allemagne pour rester une voix critique et indépendante en Algérie. L’essayiste se rend néanmoins régulièrement en France, où il s’est récemment installé pour des raisons liées à l’état de santé de son épouse. Il venait de trouver un appartement près de la ville de Versailles.

« Esprit libre »

Selon les informations de Indiquerles récentes déclarations du romancier aux médias Frontières aurait pu motiver son arrestation pour “Atteinte à l’intégrité territoriale”. « Lorsque la France colonisa l’Algérie, toute la partie occidentale de l’Algérie faisait partie du Maroc : Tlemcen, Oran et même jusqu’à Mascara. […]. Lorsque la France colonise l’Algérie, elle s’établit en protectorat au Maroc et décide, arbitrairement, de rattacher tout l’est du Maroc à l’Algérie, en traçant une frontière. a-t-il notamment déclaré.

L’arrestation de Boualem Sansal intervient alors que les journalistes et écrivains sont de plus en plus réprimés par les autorités algériennes. Le roman Houris de l’auteur franco-algérien Kamel Daoud, prix Goncourt, a récemment été interdit au Salon international du livre d’Alger en raison de l’évocation de « décennie noire », période marquée dans les années 1990 par des violences extrêmes entre le gouvernement algérien et les groupes islamistes armés. Fin juin, l’écrivaine française Dominique Martre et son éditeur ont également été arrêtés à Béjaïa, lors de la présentation d’un ouvrage sur la Kabylie, puis placés en garde à vue.

Ce nouvel incident a suscité de nombreuses réactions de la part des responsables politiques français. Edouard Philippe se dit « profondément préoccupé » par la disparition de Boualem Sansal : “Il incarne tout ce que nous chérissons : l’appel à la raison, la liberté et l’humanisme contre la censure, la corruption et l’islamisme.” A gauche du conseil d’administration, le Premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, s’est exprimé ce vendredi midi sur le réseau social « compatriote », « esprit libre et lien entre l’Algérie et la France » qui lutte contre « Pouvoir corrompu » et le « Terrorisme islamiste ». La chef de file des députés du Rassemblement national (RN) Marine Le Pen s’est quant à elle félicitée d’un « combattant de la liberté et opposant courageux à l’islamisme »appelant le gouvernement français à agir pour obtenir son “libération immédiate”.

 
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