Dans les parkings des concessions américaines, les stocks s’amoncellent. Et pour le groupe Stellantis, les problèmes s’accumulent. Crédit photo : imagebroker/imageBROKER/Jim West/Newscom/MaxPPP
En langage économique, nous appelons cela un « avertissement sur les bénéfices »un avertissement aux marchés. Et dans le cas de Stellantis, l’avertissement est une balise tournante qui clignote en rouge vif. Ce lundi 30 septembre, le groupe a annoncé qu’il envisageait une réduction de ses objectifs financiers pour cette année. Une baisse estimée qui n’est pas vraiment minimaliste
Pour 2024, la galaxie des 14 marques prévoit une baisse de plus de la moitié sa marge opérationnelle qui pourrait, au pire, n’atteindre que 5% et, au mieux, ne pas dépasser 7%. Rappelons qu’en 2022, le groupe franco-américano-italien affichait une marge de 13,4%, et que l’année dernière, ce taux avait déjà été abaissé à 12,8%. Depuis, la baisse est continue depuis le premier semestre, où elle n’était que de 11,4%.
Les marges à deux chiffres appartiennent au passé
Les dernières prévisions sont donc très loin de la marge à deux chiffres espérée par Carlos Tavares, celle que le patron de Stellantis estimait encore pouvoir atteindre au printemps dernier, lorsqu’il s’adressait à ses investisseurs.
Pour autant, Stellantis n’est pas isolé dans ses déboires, puisque la semaine dernière, l’autre mastodonte européen de l’automobile, le groupe Volkswagen, a également annoncé des revenus en baisse pour cette année, avec une baisse similaire à celle des Français depuis VW a corrigé sa marge opérationnelle en la baissant à 5,6%. Même malchance chez BMW et Mercedes.
On peut dire que les mêmes déclins ont les mêmes causes. Sauf que la situation des constructeurs allemands et de Stellantis est bien différente. Si les marques allemandes sont en récession, ou du moins si elles génèrent moins de marge qu’avant, c’est principalement à cause de la Chine. Non pas à cause de l’invasion fantasmée (pour l’instant) des voitures chinoises en Europe, mais à cause du marché chinois lui-même où les Européens ont de plus en plus de mal à s’implanter. Les marques locales sont désormais suffisamment matures pour proposer des voitures dignes de ce nom et les chinois n’hésitent plus et privilégient leurs propres marques.
Stellantis, quant à elle, est très peu présente sur ce marché dont la baisse n’a pas d’impact sur sa marge. L’autre cause de cette baisse pourrait être hâtivement imputée à la baisse des ventes de voitures électriques ici. Selon l’ACEA, ils ont chuté de 43,9% le mois dernier. Mais dans ce domaine, Stellantis peut faire mieux que d’autres dans les mois à venir, grâce à ses plateformes mixtes (électriques et thermiques) qui permettent de corriger le tir assez rapidement, mais aussi grâce à son accord avec Leapmotor dont elle fabrique et distribue des produits en dehors de la Chine.
Un accord qui lui permettra de vendre des véhicules électriques à des prix avantageux et de passer les baisses des normes CAFE en vigueur dès l’année prochaine.évitant de payer de lourdes amendes comme beaucoup de ses concurrents.
En fait, le clou principal du pneu de Stellantis est américain. Et le groupe l’admet : les deux tiers de la baisse de sa marge sont imputables à ses marques outre-Atlantique. Car du côté de Dodge, Ram, Jeep et Chrysler, rien ne va plus. Cette dernière marque n’est que l’ombre d’elle-même, quant aux autres, elles ont raté le coche d’un pays qui n’est pas encore prêt au tout électrique mais qui, en revanche, est très ouvert à l’hybride rechargeable. Ce que les marques américaines du groupe ont complètement négligé.
Résultat : la baisse estimée des ventes aux États-Unis devrait atteindre plus de 200 000 voitures à la fin de l’annéealors que Stellantis l’estimait à 100 000 ” seulement “il y a seulement quelques mois. Cependant, l’Europe n’est pas au meilleur de sa forme. Chez Stellantis, les ventes ont chuté de plus de 31 % en août, soit la plus forte baisse du marché.
Quelles sont les conséquences de ce déclin ?
Quelles seront les conséquences de cette crise ? Si le groupe n’a encore pris aucune décision, se contentant pour l’instant de promesses d’assainissement du marché américain, et de stocks débordants chez ses concessionnaires, on peut faire un parallèle avec Volkswagen qui se retrouve dans une situation similaire, même si les causes ne sont pas les mêmes.
L’allemand envisage de fermer deux unités de production outre-Rhin et l’agence américaine Bloomberg révèle que les suppressions d’emplois pourraient atteindre le chiffre faramineux de 30.000 personnes, ce que VW a démenti. Stellantis n’en est pas encore là, mais ce qui semble certain, c’est que son patron, Carlos Tavares, ne pourra pas, l’année prochaine, exiger un salaire de 36,5 millions d’euros comme cette année, puisque sa rémunération est largement indexée sur les résultats de l’entreprise.