Les lettres de demande de résiliation de clients mécontents s’accumulent dans cette entreprise située dans le Béarn et les Landes. Une reprise judiciaire se profile
Que se passe-t-il depuis des mois au sein de ce cabinet d’expertise comptable reconnu implanté à Mimizan, dans les Landes, et à Orthez, dans le Béarn ? Le patron d’une des entreprises clientes de l’agence Orthézienne a alerté « Sud Ouest » il y a une quinzaine de jours pour tirer la sonnette d’alarme.
Il évoque une situation de crise, qui impacte aussi bien les salariés que les établissements liés contractuellement à l’entreprise. « Le patron a déserté : nous n’avons plus de nouvelles de lui », raconte ce client. Et la plupart des salariés sont partis depuis juillet. » La dernière publication Facebook de l’entreprise remonte à mars, la dernière publication Linkedin à mai.
Alors que d’autres clients s’inquiétaient de voir leurs dossiers en retard, et en l’absence de réponses à leurs réclamations, le lanceur d’alerte a donc contacté l’Ordre régional des experts-comptables fin septembre. « Mais ils ne m’ont plus recontacté », déplore le professionnel agacé. Je ne veux pas aggraver la situation, mais nous nous retrouvons en difficulté. Nous avons besoin de réponses ! »
L’ordre régional saisi
Informations obtenues, une autre pharmacie, basée à Bayonne, a été mandatée en urgence pour prendre le relais et assurer la délivrance des fiches de salaire pour ceux qui confiaient cette tâche à l’entreprise. « Mais mon bilan 2023 n’a pas été publié au greffe », révèle le chef d’entreprise béarnais, qui, inquiet des conséquences possibles, a résilié son contrat, et fait appel à un autre prestataire pour cette prestation.
« J’ai perdu 1 800 euros », murmure-t-il. Je pense que je pourrai m’asseoir dessus. » Selon plusieurs sources, environ deux tiers des clients auraient déjà demandé à annuler leur engagement.
Des commentaires cinglants sont apparus sur la page web du cabinet comptable déserté. Ainsi cet internaute qui écrit : « Etude comptable à éviter, n’a rien fait depuis le début de l’année, j’ai raté mon contrôle fiscal, n’ai pas établi les bilans, etc. »
Toujours en ligne, l’Ordre régional est lui-même gratifié de propos peu élogieux à l’occasion de sa saisine de cette affaire. L’organisme ne peut pas traiter tous les dossiers en suspens et une inquiétude se fait jour parmi les entreprises clientes de l’étude Béarn-Landaise.
Un client exaspéré explique avoir saisi l’Ordre régional en juillet 2024 « pour un comptable totalement absent, qui n’a toujours pas réalisé le bilan 2023 ». L’échange resterait, pour l’instant, sur un envoi de justificatifs alors que le temps presse. “Inacceptable!” » conclut-elle.
L’inspection du travail saisie
Dans le même temps, l’Inspection du travail est alertée, et contacte le parquet de Pau mercredi 16 octobre : l’entreprise devrait être placée en redressement judiciaire, ce qui, compte tenu de la cascade de défections, risque d’aboutir à une faillite.
Une bonne nouvelle malgré tout : la quasi-totalité des salariés ayant démissionné ou obtenu un licenciement conventionnel ont retrouvé du travail. Selon nos informations, les quelques salariés encore en poste récemment – contre une quinzaine à la base – n’avaient pas encore perçu leur salaire du mois de septembre. Par ailleurs, une personne en congé ne pourrait percevoir les indemnités journalières faute de déclaration à l’Assurance Maladie.
Plusieurs sources indiquent que le cabinet se portait bien, tant à Mimizan qu’à Orthez, et traitait avec beaucoup de professionnalisme les dossiers de plusieurs centaines de clients, PME, artisans, structures publiques et associatives, etc.
Invité à donner son point de vue, le directeur de la société en question n’a pour l’instant pas répondu. Mais le secrétaire général de l’Ordre des experts-comptables de Nouvelle-Aquitaine veut rassurer. «Nous prenons ce dossier à bras le corps», assure Alex Levasseur. Il s’agit d’une situation très sensible, sur le plan humain. »
Concernant l’avenir des deux firmes, il évoque un transfert pour celle de Mimizan, et une intervention pour relancer celle d’Orthez. Aux dernières nouvelles, un comptable a été officiellement nommé « pour épauler le patron de l’entreprise, pour l’aider à contacter tous les clients », selon l’Ordre. « Et remettre la situation sur les rails. »