Ankara et le nouveau pouvoir syrien se dévoilent

Ankara et le nouveau pouvoir syrien se dévoilent
Ankara et le nouveau pouvoir syrien se dévoilent

Discrets jusqu’à l’offensive rebelle en Syrie, les liens entre la Turquie et le groupe islamiste Hay’at Tahrir al-Sham (HTS), désormais au pouvoir à Damas, se dévoilent, chacun profitant de l’autre, estiment les analystes.

“Personne ne les connaît aussi bien que nous”, s’est vanté le chef de la diplomatie turque, Hakan Fidan, affirmant qu’Ankara avait convaincu la Russie et l’Iran de ne pas arrêter l’offensive qui a conduit à la chute de Bachar al-Assad.

Toutefois, la victoire des rebelles syriens menés par le groupe HTS n’est “pas une prise de contrôle” de la Syrie par la Turquie, a assuré mercredi M. Fidan sur Al Jazeera, rejetant une affirmation du président élu américain Donald Trump.

“HTS n’est pas une marionnette turque, contrairement à d’autres factions rebelles syriennes, mais le groupe entretient depuis longtemps des liens étroits avec les Turcs et a besoin du soutien turc”, résume Aron Lund, du centre de réflexion Century International.

Dans une interview publiée mercredi par le quotidien turc pro-gouvernemental Yeni Safak, le patron du HTS et les nouvelles autorités syriennes, Abou Mohammad al-Jolani, de son vrai nom Ahmad al-Chareh, ont affirmé que son gouvernement entretiendrait une « relation stratégique ». » avec Ankara.

« Stabiliser la Syrie »

Symbole de cette nouvelle proximité entre la Turquie et la Syrie, longtemps restées ennemis, le chef des renseignements turcs, Ibrahim Kalin, proche du président Recep Tayyip Erdogan, a habilement mis en scène sa rencontre à Damas avec Abou Mohammad al-Jolani, quatre jours seulement après la chute d’Assad.

“Les nouveaux dirigeants syriens sont très soucieux de construire une légitimité et des contacts avec l’étranger”, note Aron Lund.

“Ils n’ont pas vraiment les contacts diplomatiques ni l’expérience pour plaider leur cause à l’international, ils bénéficient donc beaucoup de l’aide d’Ankara”, souligne-t-il.

La Turquie, qui s’est dite “prête” à apporter une aide militaire aux nouvelles autorités syriennes, a appelé mercredi la communauté internationale à retirer le groupe HTS de la liste des organisations terroristes, ce qu’Ankara devrait faire prochainement, a laissé entendre le chef de l’Etat turc. diplomatie.

En visite jeudi au Caire, où il doit être reçu par son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi, le président turc Erdogan pourrait tenter de convaincre l’Egypte, acteur régional important, de prendre contact avec le nouveau pouvoir de Damas, avance la presse. Turc.

“Si Ankara parvient à aider à stabiliser la Syrie, (…) la Syrie deviendra un allié de la Turquie”, souligne Soner Cagaptay, du Washington Institute of Near East Policy, pour qui Ankara a déjà “plus d’influence à Damas qu’elle n’en a jamais eu”. depuis 1920″.

« Frappez les Kurdes »

En échange, la Turquie pourra-t-elle compter sur le pouvoir de Damas pour l’aider à se débarrasser des combattants kurdes du nord de la Syrie, qu’elle perçoit comme une menace ?

« Le nouveau gouvernement syrien le souhaite autant que nous », a déclaré le ministre turc de la Défense Yasar Güler.

Le chef militaire du groupe HTS a indiqué mardi à l’AFP que l’autorité du nouveau pouvoir syrien s’exercerait également sur les zones kurdes du nord-est, contrôlées par une administration semi-autonome.

“Les Turcs voudraient pousser HTS à attaquer les Kurdes, mais HTS ne veut pas s’impliquer”, a déclaré un spécialiste de la Syrie dans une représentation diplomatique occidentale en Turquie, sous couvert d’anonymat.

Pour cette source, le rôle d’Ankara dans l’offensive en Syrie a été « surestimé », mais la Turquie dispose désormais d’un « véritable levier économique » grâce à sa frontière de plus de 900 km avec la Syrie.

De leur côté, les Occidentaux veulent empêcher la Turquie de s’imposer comme l’allié incontournable de Damas.

Mardi à Ankara, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a jugé que l’Union européenne devait « intensifier » ses liens avec le gouvernement syrien.

« La Turquie est devenue l’acteur étranger le plus influent en Syrie, mais les États-Unis conservent une influence significative sur la légitimité internationale du nouveau gouvernement syrien et sur le financement de la reconstruction du pays », souligne Ömer Özkizilcik, chercheur associé au Conseil atlantique d’Ankara. .

L’évolution de la situation dépendra donc aussi de Donald Trump, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, mais s’est déjà dit convaincu que « la Turquie détient les clés de la Syrie ».

Avec l’AFP

 
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