L’Ukraine sème la zizanie avant les élections

L’aide à l’Ukraine s’est imposée comme un sujet majeur de la campagne pour les élections législatives allemandes du 23 février, déchirant les partis, y compris ce qui reste de la coalition gouvernementale d’Olaf Scholz.

Mardi, depuis le forum de Davos, le président ukrainien Volodymyr Zelensky lui-même s’est ému, alors qu’il redoute déjà la fusion du soutien américain avec Donald Trump.

“Nous ne devons pas jouer avec les émotions des gens et dire que la défense” de l’Ukraine “se fait au détriment des médicaments ou des retraites ou je ne sais quoi”, a-t-il déclaré.

Un avertissement adressé implicitement à Olaf Scholz. La chancelière sociale-démocrate, dont le soutien militaire à l’Ukraine est en chute libre depuis l’offensive russe de février 2022, bloque depuis plusieurs jours une enveloppe supplémentaire pour Kiev.

La discussion porte sur 3 milliards d’euros, prévus en principe pour cette année, mais dont le financement est compliqué à trouver.

« Qui paiera la facture ? » » a demandé le chancelier. Il a expliqué qu’il ne voulait pas augmenter davantage le budget 2025 sans savoir « aux dépens de qui il faudra épargner », disant craindre pour les finances des communes ou les retraites.

Mené d’abord en coulisses, le débat s’est transformé en conflit ouvert avec sa cheffe de la diplomatie, l’écologiste Annalena Baerbock. Et, de plus en plus, avec son ministre de la Défense Boris Pistorius, pourtant membre de son parti social-démocrate.

Bouleversement

Cette polémique traverse trois années durant lesquelles l’Ukraine a bouleversé la situation en Allemagne, poussant le pays notamment à mettre fin à son alliance énergétique avec Moscou et à entamer un réarmement.

©AFP/Archives

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) et le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius (de), lors d’une rencontre à Kiev, le 14 janvier 2025 en Ukraine

Berlin a jusqu’à présent versé à Kiev près de 40 milliards d’euros, le deuxième montant le plus important après les États-Unis, et a accueilli 1,2 million de ses citoyens en tant que réfugiés. Cette politique fait depuis longtemps consensus dans l’opinion.

“Il y a beaucoup de soutien allemand, sans lui, l’Ukraine n’aurait aucune chance”, a déclaré à l’AFP Alla Dudka, une Ukrainienne de 57 ans, qui vit à Ingelheim-sur-le-Rhin, dans l’ouest du pays.

Elle dit ressentir ce soutien « tous les jours » depuis son arrivée, lorsque les voisins « lui apportaient des vêtements, des couverts, des casseroles, tout ».

Mais elle s’inquiète du discours croissant contre les migrants et les réfugiés en Allemagne, qui coûterait trop cher à un pays entré en récession économique.

©AFP

L’Ukrainienne Alla Dudka, le 22 janvier 2025 à Mayence, Allemagne

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“Nous avons subi tellement de malheurs (…), c’est vraiment dur d’entendre que nous n’avons plus le droit de rester ici”, dit-elle.

Car l’extrême droite allemande prône le retour, voire l’expulsion, des réfugiés d’Ukraine. Au-delà, le soutien via l’aide sociale aux Ukrainiens et la livraison d’armes suscitent un malaise croissant.

Opportunisme?

Olaf Scholz est accusé par ses rivaux d’agir par opportunisme électoral en bloquant la nouvelle enveloppe de soutien militaire à l’Ukraine.

©AFP

Affiches électorales du chancelier allemand Olaf Schoz (D) et de la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock, le 21 janvier 2025 à Dortmund

Avec les élections agricoles en ligne, le social-démocrate cherche désormais à se présenter comme un « chancelier de la paix » dans le conflit, partisan de la prudence, soucieux d’éviter une escalade militaire avec la Russie.

Il marque ainsi sa différence avec l’opposition conservatrice, en tête des sondages, et les écologistes, bien plus alternatives à l’aide militaire.

Annalena Baerbock mène l’offensive contre sa chancelière, dénonçant ceux qui cherchent « à gagner rapidement des voix plutôt que d’assumer leur responsabilité de garantir réellement la paix et la liberté en Europe ».

Pour le leader du parti libéral FDP, Christian Lindner, dont le départ en novembre a provoqué l’éclatement de la coalition gouvernementale et précipité les élections législatives, Olaf Scholz, mal en point dans les sondages, « se comporte comme un paniqué craignant de se noyer ». « .

“Il faut arrêter de jouer les retraités contre les Ukrainiens”, a-t-il lancé sur son compte X.

Piscine/AFP

© Piscine/AFP

Alice Weidel, co-dirigeante du parti d’extrême droite allemand AFD, dans son bureau le 9 janvier 2025 à Berlin

À l’extrême, l’opposition à l’aide de l’Ukraine est de plus en plus résolue.

A droite, l’alternative pour l’Allemagne (AFD), au programme pro-russe et donnée en deuxième position à plus de 20% dans les enquêtes d’opinion, est en tête.

Elle est suivie sur ce terrain par la gauche radicale. “Les livraisons incessantes d’armes n’ont pas amélioré la situation de l’Ukraine”, a déclaré la dirigeante du BSW, Sahra Wagenknecht, pour qui “il ne faut pas prolonger l’agonie”.

 
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