Rachida Dati à la rescousse du patrimoine marseillais ? Sur place, on ne l’a pas attendu pour lancer le chantier

En visite dans la ville de Marseille, le ministre de la Culture a annoncé une grande campagne de protection du patrimoine. Et a oublié de saluer le travail de longue haleine déjà réalisé par les pouvoirs publics sur le terrain.

Le grand escalier de la gare Saint-Charles, à Marseille, est l’un des trésors patrimoniaux de la ville. Photo Norbert Scanella/Uniquement la via AFP

Par Francine Guillou

Publié le 23 janvier 2025 à 16h30

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CComme à son habitude, Rachida Dati embrasse la lumière, sans que cela ne lui coûte rien ou presque. Le 16 janvier, en déplacement à Marseille, elle a promu le « plan cathédrale », comme elle l’avait fait au début du mois à Dijon et Beauvais. Dans une certaine mesure, on aurait oublié que le plan, lancé en 2019 par le ministre de l’époque Franck Riester, avait été amplifié en 2023 par Rima Abdul Malak…

Réunis sous les voûtes romanes de l’ancienne cathédrale Sainte-Marie-Majeure, dite de la Major, qui surplombe le Vieux-Port, édiles et fonctionnaires écoutaient sans broncher les comptes du ministre : « En 2022, Marseille comptait 93 monuments historiques. On est très loin derrière Bordeaux, qui en compte 384, Lyon, qui en compte 241, ou encore Toulouse et Strasbourg, qui en comptent 232. C’est quand même deux fois moins qu’Aix-en-Provence. » Et pour continuer : “De la même manière que j’agis pour sauver Paris, je veux agir ici à Marseille, avec la même ambition.” Une manière de relier les deux villes pour celle qui ne cache pas sa volonté de devenir maire de la capitale en 2026.

Le classement ne résout pas tout

Dans son besace, plus d’une cinquantaine d’édifices proposés à la protection des Monuments historiques d’ici deux ans, dont l’emblématique basilique Notre-Dame de la Garde. Parmi eux, un seul relevant de ses services – la Cathédrale de la Major, déjà inscrite mais dont le périmètre de protection va être étendu –, pour plus d’une trentaine appartenant à la Ville de Marseille.

En réalité, le ministre récolte les fruits du travail entrepris par la nouvelle équipe municipale, élue en 2020, les services de la Drac (Direction régionale des affaires culturelles). ” Depuis 2020, nous travaillons à identifier les sites patrimoniaux appartenant à la Ville », rappelle Perrine Prigent, adjointe chargée de la valorisation du patrimoine. La tâche est immense : « Cela fait longtemps qu’il n’y a eu aucun effort de valorisation du patrimoine. Nous relançons les services qui s’occupent des monuments historiques, du diagnostic, de l’identification, des constatations, de la surveillance et du contrôle. insiste l’assistant.

Il existe à Marseille des monuments classés dans un état déplorable.

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Sandrine Rolengo, déléguée régionale des Sites & Monuments

« Pour cette grande campagne, nous avons procédé en énumérant quatre grands thèmes : l’histoire de l’eau courante dans la ville, avec un véritable travail de profondeur sur les fontaines, celle des grands monuments commémoratifs, comme l’obélisque de Mazargues ou la Colonne de la Peste, contemporains. patrimoine du 20ème sièclee siècle, et enfin le patrimoine remarquable pour l’histoire urbaine, comme les églises bien sûr, mais aussi le grand escalier de la gare Saint-Charles et le Palais du Pharo. » En 2022, une première liste d’une quarantaine d’édifices communaux a été transmise à la Drac, dont trente-quatre figurent donc sur la liste mise en avant par Rachida Dati. Depuis 2020 également, 26 millions d’euros ont été investis par la commune dans la rénovation des églises.

Rachida Dati lors de sa visite à Marseille, près de la Cathédrale Majeure, le 16 janvier.

Rachida Dati lors de sa visite à Marseille, près de la Cathédrale Majeure, le 16 janvier. Photo Miguel Medina/AFP

Rien de nouveau sous le soleil non plus pour Sandrine Rolengo, déléguée régionale des Sites & Monuments, une association de défense du patrimoine, qui souligne aussi à juste titre que le classement ne résout pas tout. « Il y a à Marseille des monuments classés dans un état déplorable. Il nous faut une maison du patrimoine, un lieu de rencontre pour rassembler les architectes, les élus de la Ville et de la Métropole, les commerçants, les habitants. Nous avons la chance d’avoir un site patrimonial remarquable (SPR), il faut s’en emparer ! » D’autant que les bâtiments nouvellement protégés créeront des périmètres de protection environnants, à l’intérieur desquels toute autorisation préalable nécessitera l’accord de l’architecte des Bâtiments de France. Dans une ville où les règles d’urbanisme sont mal respectées, le changement risque d’être dur et l’éducation indispensable.

Le discours de Rachida Dati n’aura donc pas surpris ni étonné grand monde à Marseille, hormis peut-être les propriétaires de l’immeuble le plus connu de la Ville, la fameuse « Bonne Mère ». Dans le diocèse de Marseille, propriétaire de la basilique Notre-Dame de la Garde, on a été surpris par l’annonce par le ministre du lancement d’une procédure de classement de l’édifice qui domine la ville depuis 1864. Dans les heures qui ont suivi, un communiqué du diocèse a précisé « qu’à ce jour, des discussions sont en cours au sein des autorités diocésaines et qu’aucune décision n’a encore été prise, ni pour accepter la candidature de Notre-Dame de la Garde, ni pour la refuser. Informations obtenues, le diocèse et la Drac sont en discussion depuis des années, notamment pour tous les sujets liés aux campagnes de restauration de l’édifice, mais les ecclésiastiques veulent être certains qu’un classement ne créera pas de contraintes pour la vie liturgique ou paroissiale de l’édifice. basilique. Bref, donnez-vous le temps de réfléchir, sans pression médiatique. A Marseille, Rachida Dati ne leur en a pas laissé l’occasion.

 
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