Un homme de 42 ans qui vit avec des souffrances insupportables depuis 20 ans et qui a tenté une multitude de traitements, en vain, se bat pour obtenir l’aide médicale à mourir, après avoir été refusée au CHUM.
«J’ai mal 24 heures sur 24. Je suis prisonnier de mon corps», confie Vincent Berthiaume.
« Je ne suis pas suicidaire, je ne veux pas mettre fin à mes jours. Mais je ne peux pas continuer à vivre comme ça ! Je ne supporte plus la douleur», ajoute l’homme de 42 ans.
Depuis 20 ans, le Montréalais vit dans une souffrance qui l’empêche d’avoir une vie « normale ».
Ce professeur de théâtre, en pleine forme, s’est blessé au dos en déplaçant de lourdes tables en 2004. Depuis, la douleur s’est aggravée. Il a reçu un diagnostic de « discopathie dégénérative chronique de gravité modérée » et dit vivre avec le syndrome de douleur chronique.
A fortes doses
Tous les trois jours, il prend de fortes doses d’opioïdes (100 mcg/heure de Fentanyl). La dose doit souvent être augmentée à mesure que son corps s’y habitue.
« J’ai tout le temps une douleur de 5 sur 10. C’est complètement fou. LE correctifs diminuer le volume [de la douleur]mais je souffre constamment.
Lorsqu’il veut se laver ou cuisiner, le Montréalais prend des opiacés supplémentaires (Dilaudid).
« Sinon, ma douleur est incontrôlable », souligne-t-il.
Portrait de Vincent Berthiaume, qui doit se battre pour obtenir l’aide médicale à mourir, à Montréal, le vendredi 10 janvier 2025. Photo Agence QMI, JOEL LEMAY
Photo Agence QMI, Joël LEMAY
Incapable de travailler, l’homme passe son temps au lit. Cependant, la douleur l’empêche souvent de dormir. Il a du mal à faire ses courses.
«J’ai 20 minutes. Mes capacités sont très limitées», explique celui qui vit seul.
Suivi à la Clinique de la douleur du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), M. Berthiaume est convaincu d’avoir tout essayé. En 2016, il a placé ses espoirs dans les infusions de kétamine.
« Au premier traitement, je n’avais plus de douleur, j’ai pleuré. Mais depuis quatre ans, elle a perdu de son effet.
Plus de solutions
Physiothérapie, cannabis thérapeutique, méditation, analgésiques : l’homme jure avoir tout essayé. Devant ce constat difficile, M. Berthiaume a formulé une demande d’aide médicale à mourir (AMM) au printemps dernier.
Critères pour recevoir l’aide médicale à mourir
– Être majeur et mentalement apte
– Avoir un problème de santé grave et incurable
– Ressentir une souffrance existentielle, physique ou psychologique, intolérable (selon l’appréciation personnelle de la personne)
– Donner son consentement éclairé
-Source : Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité
Le processus nécessite que le patient soit évalué par deux professionnels. Le premier bilan de M. Berthiaume était positif, mais pas le second. Depuis, sa candidature a de nouveau été refusée.
D’après des documents médicaux, consultés par La Revueles médecins avancent notamment qu’il existe des traitements pour le soulager (kétamine, entre autres) ou qu’il faudrait plutôt l’orienter vers la psychiatrie. Le CHUM a refusé de répondre Journal.
«Les traitements à la kétamine ne fonctionnent plus», rage M. Berthiaume, qui déplore qu’on ne lui ait pas proposé de nouveaux traitements depuis.
Le patient estime que son jeune âge joue en sa défaveur.
« Ils voient la façade, ils ne voient pas la maladie. Je ne peux pas dire à quel point ça tue de se lever et de se coucher dans la douleur.
Récemment, M. Berthiaume s’est tourné vers l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, qui procédera à une nouvelle évaluation pour l’AMM.
« Je ne peux pas continuer à vivre comme ça. Je le demande, j’y ai le droit. Je n’ai plus le choix”, conclut-il.
Plus difficile à évaluer la douleur chronique
Les patients souffrant de douleur chronique peuvent représenter des cas plus complexes lors du processus d’évaluation de l’aide médicale à mourir.
« Pour les problèmes de douleur, de nombreux médecins ou infirmières ne sont pas à l’aise. Il faut vraiment écouter le patient et regarder l’ensemble de son dossier”, souligne le Dr Georges L’Espérance, président de l’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité.
« Mais il n’y a rien qui ne puisse être évalué. Il faut avant tout écouter le patient», ajoute ce neurochirurgien, lui-même prestataire d’aide médicale à mourir (AMM).
PHOTO FOURNIE PAR GEORGES L’ESPERANCE
Informé de l’histoire de Vincent Berthiaume, le Dr L’Espérance ne peut pas commenter ce cas précis. Il déplore toutefois que les patients doivent faire plusieurs démarches pour obtenir l’AMM.
Le droit de refuser
« Chaque patient a le droit de refuser des traitements, surtout s’il les a tous essayés », explique-t-il.
« La tolérance à la douleur n’appartient pas au médecin, à la famille (…) de décider. C’est le patient lui-même qui nous dit s’il ne va pas bien », dit-il.
Député de Rosemont, Vincent Marissal déplore le manque de soutien de M. Berthiaume.
«Il est déplorable qu’en plus de ses souffrances physiques, il doive lutter contre le système», écrit le député de Québec Solidaire qui a aidé le citoyen de sa circonscription.
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