La société gazière nationale russe Gazprom a interrompu ses livraisons vers l’Autriche tôt samedi. Cette décision fait suite à un litige avec la société autrichienne OMV, qui a déclaré qu’elle cesserait de payer le gaz russe après que Moscou ait refusé de se conformer à l’arbitrage international. Vienne affirme s’être préparée à cet arrêt d’approvisionnement.
Le géant russe du gaz naturel Gazprom a cessé de fournir du gaz à l’Autriche depuis samedi matin. La Russie met ainsi fin à une relation commerciale qui durait depuis plus de six décennies. Cette décision intervient dans un contexte de tensions croissantes entre la Russie et ses anciens partenaires européens, dans le contexte de la guerre en Ukraine. Mais cela découle directement d’un conflit juridique.
Gazprom ne veut pas verser de compensation financière à l’Autriche pour ses interruptions de livraison en 2022
En effet, il y a eu une querelle spécifique entre Gazprom et OMV. La Chambre de commerce internationale avait accordé à la société gazière autrichienne une compensation financière de 230 millions d’euros, suite à des interruptions de livraison survenues en 2022. La société russe a refusé de payer cette somme. En échange, OMV a cessé de payer le gaz russe. Gazprom avait alors jugé qu’il avait le droit de suspendre ses exportations vers l’Autriche. Ce choix s’inscrit également dans une stratégie plus large de Moscou visant à réduire ses flux vers l’Europe, depuis l’invasion de l’Ukraine.
L’Autriche affirme s’y être préparée depuis longtemps
Commentant l’arrêt des livraisons de gaz russe, Leonore Gewessler, la ministre autrichienne de l’Environnement et de l’Énergie, a déclaré sur X que « la Russie utilise à nouveau l’énergie comme une arme ». Elle assure toutefois que son pays “se prépare depuis longtemps à cette situation”, avec des stocks “pleins” (93%) et le recours aux gazoducs en provenance de l’Allemagne voisine. Depuis ce week-end, elle propose une solution à l’Autriche via son terminal de gaz naturel liquéfié (GNL) de Mukran, sur l’île de Rügen.
L’Autriche avait déjà considérablement réduit ses approvisionnements en provenance de Gazprom
Le terminal de Mukran dispose d’une capacité de connexion annuelle de 13,5 milliards de m3. Cette production est largement suffisante pour couvrir les 7 milliards de m3 de consommation annuelle de l’Autriche. Avant la réduction de samedi, le pays recevait 17 millions de m3 par jour de la Russie. Depuis 2022, Vienne avait déjà considérablement réduit son offre, de 90 % à environ 50 %. Mais la suspension de Gazprom devrait bel et bien avoir des conséquences économiques.
Les industries autrichiennes exposées à l’inflation énergétique
Cette décision entraîne déjà une augmentation des coûts énergétiques pour les ménages et les entreprises nationales à l’approche de l’hiver. Les industries, en particulier, qui consomment plus d’énergie que les habitations, risquent d’être durement touchées. Une hausse prolongée des coûts de l’énergie pourrait peser sur leur compétitivité. Pour la Russie, le gaz constitue pratiquement le seul moyen de pression et de chantage face aux sanctions occidentales qui frappent durement son économie.
Gazprom continue d’honorer ses engagements envers l’Europe
Depuis plusieurs mois, Moscou réoriente ses exportations vers les marchés asiatiques pour compenser une baisse brutale de la demande européenne. Gazprom continue néanmoins d’honorer ses engagements envers l’Europe. Ses exportations via l’Ukraine – principale voie de transit du gaz vers l’UE – sont restées stables lundi, à 42,4 millions de m3. Il faut dire que de nombreux pays européens dépendent encore largement du gaz russe, comme la Slovaquie, la Hongrie ou la République tchèque. L’Ukraine a néanmoins déclaré qu’elle ne renouvellerait pas l’accord de transit de cinq ans avec la Russie, qui expire à la fin de l’année.