Au Mont-Saint-Michel, Adrien Candiard donne « des clés pour comprendre l’Islam »

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Adrien Candiard, auteur de plusieurs ouvrages sur l’islamologie et la spiritualité chrétienne, est l’invité de la Fondation du Mont-Saint-Michel (Manche) pour une conférence sur l’Islamle mercredi 20 novembre 2024à 18h30, au Prieuré d’Ardevon. Le Dominicain, qui vit en Egypte, vient apporter son éclairage sur l’Islam et expliquer pourquoi il est complexe.

Depuis les attentats de 2015, la France a été confrontée à plusieurs attentats terroristes islamistes (Nice, Saint-Étienne-du-Rouvray, Samuel Paty, Dominique Bernard…). L’Islam est-il en guerre contre les sociétés occidentales et leurs modes de vie ?

Ce n’est évidemment pas l’ensemble de l’Islam qui se considère en guerre contre les sociétés occidentales, mais un certain nombre de mouvements violents qui le prétendent. Ces mouvements, que l’on appelle « jihadistes » car ils font référence à une interprétation très moderne du concept classique de guerre sainte, sont loin de faire l’unanimité parmi les musulmans ! Mais leur existence même, qui n’est pas anecdotique, est le signe d’une grave crise qui touche le monde musulman depuis plusieurs décennies. Un élément essentiel de cette crise est la vitalité d’un mouvement moderne, le salafisme, qui entend réformer l’islam traditionnel, mais dans un sens plus rigoureux et hostile à la modernité. Ce mouvement de réforme a profondément déstabilisé le monde musulman ; le terrorisme contemporain est, en partie, un effet de cette déstabilisation. Mais il ne faut pas donner une explication théologique à tout ! De nombreux autres facteurs, politiques ou économiques, entrent également en jeu dans nos réalités contemporaines complexes.

« Le Coran est en fait un texte très complexe, qui nécessite nécessairement d’être interprété (comme d’ailleurs la plupart des textes sacrés). Et ces interprétations divergent ! »

Selon vous, quel est le vrai visage de cette religion ? Le Coran nous décrit-il comme des mécréants ?

L’Islam n’a pas de « vrai visage » : il a des milliers, des millions de vrais visages, ceux de personnes très différentes qui, d’une manière ou d’une autre, prétendent appartenir à cette religion. Il y a tellement de façons d’être musulman ! On néglige souvent l’extrême diversité de l’Islam : culturelle bien sûr, mais aussi théologique et spirituelle. Certains Islams sont inquiétants, d’autres sont pacifiques : ce n’est pas à nous, de l’extérieur, de juger ce qui est musulman ou non. L’Islam, c’est cette diversité ! On croit parfois qu’il suffirait d’ouvrir le Coran pour pouvoir les départager, pour trouver quel courant est le plus authentiquement musulman, mais c’est une illusion : le Coran est en fait un texte très complexe, qu’il faut nécessairement interprété (comme la plupart des textes sacrés d’ailleurs)… et ces interprétations divergent !

Votre conférence s’intitule « Comprendre l’Islam ». Quel message souhaitez-vous envoyer ?

On cherche souvent à porter un jugement sur l’Islam : est-il violent, est-il pacifique, est-il bon ou mauvais, est-il compatible avec la modernité, la démocratie et les droits de l’homme ? C’est tout à fait normal : c’est un phénomène important, qui nous affecte de plusieurs manières. Mais avant de porter un jugement, il faut essayer de comprendre de quoi on parle ! Mon objectif n’est pas de dire aux gens ce qu’ils doivent penser de l’Islam, mais de donner quelques clés de compréhension pour les aider à se forger une opinion plus nuancée et plus libre.

Vous habitez au Caire. Comment les pays du Moyen-Orient perçoivent-ils nos civilisations occidentales ?

Incontestablement, les conflits en cours au Moyen-Orient ne contribuent pas à rendre l’Occident populaire dans le monde arabe, où beaucoup expriment le sentiment de « deux poids, deux mesures » : l’Occident, qui s’est permis d’envahir l’Irak il y a vingt ans, crie lorsque L’Ukraine est attaquée, mais se montre incapable d’élever la voix contre Israël. Ce discours appellerait de nombreuses nuances : les sociétés occidentales sont complexes et pleines de débats. Mais c’est aussi le cas des sociétés du Moyen-Orient qui, comme la nôtre, ne sont pas homogènes : des sentiments contradictoires s’expriment à l’égard de l’Occident, allant de la fascination à la méfiance.

Mercredi 20 novembre 2024, à 18h30, au Prieuré du Mont-Saint-Michel (Ardevon). Tarif : 10 €/personne – gratuit pour les moins de 18 ans. Inscription obligatoire – billetterie : https://my.weezevent.com/adrien-candiard. Vente et dédicace de livres.

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