Un premier lien revendiqué sur la Côte-Nord et un autre aux Îles-de-la-Madeleine avant un troisième au Québec

Un premier lien revendiqué sur la Côte-Nord et un autre aux Îles-de-la-Madeleine avant un troisième au Québec
Un premier lien revendiqué sur la Côte-Nord et un autre aux Îles-de-la-Madeleine avant un troisième au Québec

André Desrosiers, le maire d’Escoumins, le répète sur tous les tons. Il a utilisé la chanson il y a trois semaines pour renouveler son appel aux pouvoirs publics. « La Côte-Nord a besoin d’un premier lien », entonne-t-il dans sa composition intitulée Tous unis pour un pont. Car si le Québec aura son troisième lien pour des raisons de « sécurité économique », d’autres régions se disent d’autant plus vulnérables aux aléas des transports.

Les quelque 100 000 résidents de la Côte-Nord ne peuvent quitter leur région que par bateau, via des traversiers au départ de Tadoussac. Sinon, il y a un pont à Chicoutimi, accessible après un détour de trois heures. « Comme nous n’avons pas de pont, tout ce qui touche au transport coûte toujours plus cher », résume le maire en entrevue. Lorsqu’un camion est amené à un quai et y attend, cela coûte de l’argent. Le chauffeur est payé de la même manière. Cela devient un problème. »

Les temps d’attente, rien que pour le trajet en ferry, dépassent parfois une heure, bien que la distance entre les deux rives soit inférieure à deux kilomètres. Une grève des officiers de navigation et des officiers ingénieurs prévue vendredi et samedi compliquera encore une fois les déplacements, ce qui illustre, selon le maire, à quel point la sécurité économique ne pourra jamais être assurée pour la Côte-Nord.

L’Île d’Orléans bénéficiera d’un pont de 2,7 milliards de dollars pour ses 7 000 habitants, rappelle André Desrosiers, qui attribue en partie l’absence d’un pont semblable au déclin démographique de sa propre région. .

Des études de faisabilité pour un pont enjambant la rivière Saguenay ont été publiées à de nombreuses reprises — notamment en 1973, 1986, 1999, 2009, 2015 — sans que cette infrastructure ne voie jamais le jour. Deux nouvelles études devraient être publiées à l’automne pour réaffirmer l’impact qu’aurait ce pont sur l’économie de la côte nord, de Charlevoix et du Québec en général.

Pour le maire Desrosiers, comme pour plusieurs autres élus de la Côte-Nord, l’absence d’un premier lien routier entraîne des risques économiques qui freinent la croissance de son coin isolé du pays. « Lorsque nous investissons dans le tourisme, par exemple, nous investissons dans le vide, car le ferry nous nuit. »

Les Îles-de-la-Madeleine à la recherche d’un troisième lien… Internet

La « sécurité économique » est aussi une préoccupation aux Îles-de-la-Madeleine. Lorsqu’une tempête a coupé les deux câbles reliant l’archipel au reste du Québec il y a quelques années, les quelque 13 000 Madelinots se sont retrouvés sans Internet ni communication téléphonique. Aucune banque ni entreprise ne pouvait fonctionner. Ajoutez à cela le risque que le cargo n’arrive pas, et la vulnérabilité de l’archipel n’est plus à démontrer.

« Un bateau qui reste coincé dans les glaces l’hiver et qui doit accoster en Nouvelle-Écosse et on ne trouve plus de lait sur les étagères. Ce sont des produits de base qu’on n’a plus dans les épiceries, illustre le maire des Îles, Antonin Valiquette. Sans transport et sans lien de communication efficace, notre économie s’effondrera. C’est si simple. »

À Tadoussac, si le traversier n’est plus là, la population est déconnectée. Ou alors il faudrait passer par Saguenay et parcourir des centaines de kilomètres de plus.

Cependant, ce n’est pas leur première tempête et ils ont su développer leur résilience au fil des âges. Il y a d’abord l’avion pour les produits critiques. Une connexion satellite a été installée. Ensuite, l’idée d’un troisième câble reliant la région au reste du Québec, qui assurerait la redondance nécessaire à cette « sécurité économique », mijote depuis la dernière crise. Ce projet de troisième liaison Internet a cependant été mis de côté pour le moment. « On ne peut pas attendre que ça ne marche plus pour faire quelque chose », a déclaré le maire.

La sécurité, un enjeu presque partout

Qu’entend-on par « sécurité économique » ? «Dans le domaine du transport, il s’agit d’assurer la circulation des biens et des aliments», explique Leandro C. Coelho, professeur à l’Université Laval et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en logistique intégrée.

« Nous avons vu plusieurs exemples de problèmes ces dernières années où des infrastructures importantes ne peuvent plus être utilisées. Les grèves ont empêché le fonctionnement des chemins de fer ou des ports. Il y a eu des problèmes avec le canal de Suez… Avec le Covid-19, quand les ports ne fonctionnaient plus, on a eu toute une crise d’approvisionnement, comme celle du papier toilette. »

Au Québec, le système de distribution est essentiellement routier, puisque les marchandises voyagent peu par train ou par bateau entre les villes. Les régions qui dépendent d’un ferry pour leur approvisionnement sont donc plus vulnérables que d’autres.

« À Tadoussac, si le traversier n’est plus là, la population est déconnectée. Ou alors il faudrait passer par Saguenay et parcourir des centaines de kilomètres de plus. C’est la même situation qu’on aurait si on devait passer par Trois-Rivières [pour relier Québec et Lévis] », rapporte M. Coelho.

De telles pertes de temps et détours entraîneraient des hausses du prix des biens, souligne le chercheur, qui estime qu’un troisième lien avec le Québec «coche la case de la sécurité économique».

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