Dans les quartiers, le football féminin n’a pas encore gagné la partie : Actualités – .

Dans les quartiers, le football féminin n’a pas encore gagné la partie : Actualités – .
Dans les quartiers, le football féminin n’a pas encore gagné la partie : Actualités – .

Quand Ilyana a commencé à jouer au football il y a 11 ans, les garçons de son équipe ne la prenaient pas au sérieux. « Désormais, une fille qui joue au foot, c’est monnaie courante », assure-t-elle depuis un terrain de La Duchère, une des grandes villes de Lyon.

Ce soir-là pourtant, lorsque l’adolescente de 17 ans et ses coéquipières arrivent sur le terrain, il leur faut s’imposer face à une trentaine d’hommes qui occupent la pelouse et la réclament haut et fort.

“Ça se passe toujours comme ça, à la longue c’est très fatigant…”, commente l’entraîneur de l’équipe amateur féminine Angelo Salvator Cyiza, fatigué de “ces individus qui viennent sur le terrain alors que le créneau horaire est réservé aux filles”.

Aidé par le rayonnement des joueuses de l’Olympique Lyonnais, 17 fois championne de France, de nombreux clubs féminins ont vu le jour ces dernières années dans la région mais leur développement se heurte à de nombreux obstacles.

Au club de Duchère, qui compte 20% de joueuses – au-dessus de la moyenne nationale –, M. Cyiza se dit impressionné par le gain de confiance, en l’espace d’une saison, de ses protégés dans l’équipe des moins de 19 ans.

– “Énergie” –

«Ils dépensent de l’énergie et se sentent de plus en plus libres», s’émerveille-t-il.

Et selon lui, “ça les sort de leur environnement (…) ça fait tomber les barrières, et pour certains ça peut les emmener très haut”.

Dimanche, une de ses équipes qui évoluait sous les couleurs de la Thaïlande a terminé à la 3ème place de la deuxième édition de la « Coupe du Monde de District Féminin ». Ce concours festif est organisé par l’association « We talk France » pour favoriser l’inclusion des jeunes filles par le sport. Les filles de Givors, qui représentaient le Brésil, sont reparties avec la Coupe.

Sociologue du sport et ancienne handballeuse, Béatrice Barbusse met en garde contre une vision du football comme « un ascenseur social de masse ». Mais elle est intarissable sur les vertus du sport collectif en termes de développement personnel : « il apporte tout un savoir-être qui est nécessaire pour bien réussir dans la vie ».

– “Se salir” –

Dans le football, “il faut crier, courir, prendre de la place, se salir, c’est le contraire de ce qu’on reçoit comme éducation de fille”, poursuit la chercheuse, qui fut l’une des premières femmes à entraîner une équipe masculine.

« Au début, ma famille n’aimait pas que je joue au foot », concède le latéral gauche de La Duchère, Malak, 15 ans, qui ne changerait de sport pour rien au monde. « Le football m’a fait évoluer mentalement. Sur le terrain, je me sens bien.

Au niveau national, la fédération souhaite doubler d’ici cinq ans le nombre de licenciées féminines – de 220 000 à 500 000 –, une croissance nettement supérieure à celle attendue du côté masculin.

Pourtant, même Jean-Michel Aulas, l’ancien patron de l’OL et président de la nouvelle Ligue de football féminin qui devrait voir le jour cet été, avoue avoir conscience d’un « retard conséquent dans les entraînements », du côté des clubs amateurs. ou des professionnels.

En fait, malgré les grands discours, les filles arrivent encore souvent en deuxième position derrière les garçons.

« Une subvention de la mairie a été accordée, avec une partie dédiée au développement de la section féminine, mais aucun projet n’a été monté, aucune éducatrice recrutée », explique, sous couvert d’anonymat, un responsable du club.

« Nous ne voyons aucune volonté d’entreprendre dans le volet féminin », assène-t-il.

– “Espace privé” –

Dans un contexte d’équipement sportif insuffisant, notamment dans les quartiers très urbains, les filles peinent à gagner du terrain.

Faute de moyens, le président de La Duchère, Jean-Christophe Vincent, refuse « 450 enfants par an ». “On essaie de ne pas refuser les filles” mais “si les accepter, c’est refuser tous les mecs du quartier”, ça ne facilite pas leur acceptation, estime-t-il, plaidant pour “un plan Marshall pour les équipements sportifs” en banlieue.

A Givors, au sud de Lyon, qui compte plus de 400 licenciés masculins, 30 joueurs s’entraînent dans la moitié du stade. Leur entraîneur, Julien Orjollet, espère avoir 40 joueurs l’an prochain et souhaiterait qu’ils « aient le grand terrain, comme les garçons ».

« Si on ne continue pas à se battre, ça n’avancera pas, ça reculera et nous serons renvoyées dans notre espace privé », craint Béatrice Barbusse, constatant que certaines femmes restent encore à l’écart, notamment celles qui portent le hijab, signe religieux interdit sur les terrains de football.

 
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