Ce Pfas « oublié » mais présent partout inquiète les scientifiques

Ce Pfas « oublié » mais présent partout inquiète les scientifiques
Ce Pfas « oublié » mais présent partout inquiète les scientifiques

Serait-il le Pfas « oublié » ? Un scientifique de l’université de Norvège spécialisé dans les polluants éternels, soutenu par plusieurs grandes organisations environnementales européennes, lance cette semaine un cri d’alarme à propos du TFA ou acide trifluoroacétique, classé Pfas selon la définition de l’OCDE. Déjà impliquée dans des scandales en France en début d’année, cette substance chimique très mobile et persistante est désormais omniprésente dans l’environnement, des feuilles des arbres aux glaces polaires en passant par le sang des individus. “Le TFA est en fait l’histoire d’une substitution malheureuse », explique Hans Peter Arp, spécialiste des polluants environnementaux à l’Université norvégienne des sciences et technologies. Il faut en effet revenir aux fameux gaz CFC, utilisés pour la réfrigération et les aérosols mais qui se sont révélés être un désastre pour la couche d’ozone. Ils ont été interdits à partir des années 1990. Ceux-ci ont ensuite été remplacés pour le même usage par des HCFC et des HFC qui attaquaient moins la couche d’ozone mais contribuaient à l’effet de serre. Viennent ensuite, après leur interdiction par l’amendement de Kigali en 2016, les « gaz fluorés de quatrième génération (« F-gases »), ou HFO (Hydrofluorolefin).

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Échantillons de sang positifs à 97 %

Ceux-ci montrent un potentiel plus faible en termes de réchauffement climatique donc c’est bien, mais conduisent en revanche à une formation accrue de TFA par rapport aux HFC qui en formaient modérément ; ici, il se forme en quantités massives »souligne le chimiste environnemental norvégien. Et quand on regarde les enregistrements historiques de TFA dans l’environnement, on voit que l’augmentation globale de sa concentration est liée au Protocole de Montréal. (c’est-à-dire depuis l’interdiction des CFC, NDLR). Les études sur les carottes de glace montrent que le TFA augmente considérablement dans les précipitations et la neige de l’Arctique. Mais comme ce produit chimique est persistant et mobile, il peut s’accumuler dans presque tout, même les feuilles des arbres… Au Danemark, ils l’ont trouvé dans presque toutes les sources d’eau souterraine, jusqu’à 2,4 microns. En Allemagne, le pays qui a réalisé le plus d’études sur le TFA, on le retrouve dans tous les échantillons d’eau qu’ils peuvent mesurer : eau du robinet, eau de pluie, eau de rivière… »

Peu d’études ont été réalisées jusqu’à présent sur le sang des individus « en partie à cause du manque d’intérêt jusqu’à présent » mais « Une enquête menée en Chine a montré un taux de détection de 97 % dans des échantillons de sang avec une concentration allant jusqu’à 8,5 microgrammes par litre. » indique le spécialiste. “En fait, une fois que vous regardez, vous les trouvez, peu importe ce que vous mesurez ! Cette augmentation est exponentielle et ne continuera à l’être que parce que les émissions de ces substances provenant de ces gaz de quatrième génération seront également exponentielles à l’avenir. Sans oublier qu’il existe d’autres sources d’AGT comme les pesticides ! Mes collègues danois pensent également que les pesticides constituent la principale Source d’AGT dans leurs eaux souterraines. Le TFA est également synthétisé par l’industrie chimique comme composé de base, une sorte d’« outil ».

Les préoccupations toxicologiques de l’Allemagne

Les impacts écologiques d’une telle accumulation dans l’écosystème ne sont pas encore bien connus, regrette le professeur Arp, qui juge les études existantes limitées en termes de durée d’exposition ou d’écosystèmes pris en compte. Quant à la toxicité humaine du TFA, «cela aussi n’est pas encore entièrement compris” mais il y a “des raisons de s’alarmer”, selon Hans Peter Arp. Ainsi, sur la base de ce qu’elle présente comme «nouveaux résultats », L’Allemagne a estimé «nécessaire” modifier la classification des AGT et la lier aux risques reproductifs (fertilité, développement du bébé, etc.). L’Office fédéral allemand des produits chimiques vient d’informer l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) de son intention de proposer de lier la toxicité pour la reproduction (1B) à l’acide trifluoroacétique. Cette soumission marquera le début d’une période légale de 18 mois pendant laquelle le comité d’évaluation des risques Echa recevra des commentaires et soumettra un avis à la Commission européenne. La Commission doit alors prendre une décision dans l’année et publier une classification actualisée de la substance.

« Tous les scientifiques du domaine savent qu’il y a un problème avec le TFA »réagit Gauthier Eppe, professeur de chimie analytique à l’ULiège et expert Pfas. Notamment en raison des concentrations élevées auxquelles on le retrouve. Des études réalisées en Allemagne montrent par exemple que ses concentrations dans l’eau sont bien supérieures à celles des autres Pfa. On se pose donc la question : en cas de contamination de l’environnement, probablement des eaux souterraines, lorsque l’on boit de l’eau avec ces taux de TFA, y aura-t-il un impact sur la santé ? Nous n’en savons rien aujourd’hui. De nombreuses études de toxicité sont en cours, mais nous ne pouvons encore progresser. Je pense que le TFA sera largement étudié dans les années à venir, mais il est très difficile à mesurer car c’est une très petite molécule. Il est donc nécessaire de développer des méthodes analytiques pour mesurer le TFA de manière fiable. “

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Actuellement, dans l’Union européenne, il existe une législation sur les gaz fluorés (ou gaz F) dont est issu le TFA. Cependant, plusieurs organisations environnementales estiment que cela n’est pas adapté. “Il existe depuis 2006, mais son objectif est l’impact climatique, avec une sortie totale de ces gaz en 2050 et une réduction déjà de 95% en 2030.explique Christine Luetzkendorf, responsable de la thématique des gaz fluorés à l’ONG allemande DUH. Mais cela ne s’applique pas à tous les gaz F, mais uniquement à une liste fixe de molécules spécifiques nocives pour le climat (HFC). Il faut donc souligner que les gaz F de nouvelle génération (HFO) qui causent les problèmes environnementaux des Pfas et TFA sont totalement exclus. L’annexe comprend une interdiction de commercialisation qui concerne tous les gaz fluorés et qui inclut donc ceux de nouvelle génération, mais des dérogations sont possibles. Il existe en réalité très peu de gaz fluorés interdits. Sur les HFO, ce n’est pas assez strict.

En revanche, le TFA ne figure pas dans la liste des 20 Pfa qui seront concernés par la limite de 100 microgrammes par litre dans l’eau potable à partir de 2026 dans l’UE. Ni, en Belgique, dans la liste des quelques Pfa dont la toxicologie est la plus connue (PFOA, PFOS, PFNA et PFHxS) et concernés par les normes dans l’alimentation et l’eau en bouteille par exemple ni par la valeur guide de 4 microgrammes par litre dans l’eau en bouteille. eau. Christine Luetzkendorf plaide pour une interdiction totale et générique des Pfas dans l’Union européenne comme le défend un groupe de cinq pays dont l’Allemagne. Sachant que les gaz fluorés représentent chaque année 63% des émissions de Pfas dans l’Union Européenne.

Remplacements possibles

La bonne nouvelle, comme le confirme la DG Climat de la Commission européenne, c’est que les alternatives «sûr et efficace » des gaz fluorés existent. “Les utilisations des gaz fluorés sont nombreuses : réfrigération, climatisation des voitures et camions, mousses isolantes, pompes à chaleur, etc. Mais il existe des réfrigérants dits naturels comme le propane, le butane ou l’ammoniac, qui étaient utilisés avant qu’on invente les gaz F. . Ces alternatives sont disponibles, éprouvées, respectueuses du climat et également efficaces. De manière générale, avec Pfas, on a du mal à trouver des alternatives. Ici, ce n’est pas le casse réjouit Jonatan Kleimark, de l’ONG suédoise Chemsec, qui conseille les entreprises dans le domaine. Par exemple, pour les pompes à chaleur, de nombreux fournisseurs proposent déjà des alternatives. Volkswagen a promis de faire de même pour ses voitures et camions d’ici 2030. »

 
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