L’explosion de la fusée Ariane… ou le voyage maudit de François Mitterrand

L’explosion de la fusée Ariane… ou le voyage maudit de François Mitterrand
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La trajectoire de l’engin s’écarte lentement mais sûrement de sa ligne nominale.

Après 4 minutes et 34 secondes, les deux premiers étages de la fusée ont été largués. Le troisième s’enflamme, brûlant de l’oxygène liquide et de l’hydrogène. Seulement, un premier capteur enregistre une baisse de pression dans la chambre de combustion, puis un autre. Les lumières s’allument, les ingénieurs et techniciens se tendent, la trajectoire de l’engin s’écarte lentement mais sûrement de sa ligne nominale. A la neuvième minute, la fusée commence à tomber. Le ministre de la Recherche et de la Technologie se penche à l’oreille du président. Le résultat est inévitable. A 185 kilomètres d’altitude, l’ordre a été donné de détruire la fusée qui a explosé au-dessus de l’Atlantique. Le silence est pesant. François Mitterrand quitte la salle sans un mot, sans un regard.

Montrer la puissance de frappe de la France

Quelques jours plus tôt, le 10 septembre, un communiqué annonçait le déplacement du Président à Mururoa pour… vendredi 13. Une annonce tardive qui n’a pas surpris les journalistes. L’Élysée est adepte des voyages de dernière minute. Le chef de l’État a décidé de créer un comité de coordination du Pacifique Sud, réunissant des ambassadeurs et des représentants militaires et civils. Le plan est clair. La France « entend faire respecter ses droits ». Elle entend non seulement « décider de ce qui affecte ses intérêts nationaux » dans cette région du monde, mais aussi rappeler, comme le font les États-Unis, l’Union soviétique, la Grande-Bretagne et la Chine, qu’elle poursuit « des expériences utiles à sa défense ». ». Comprendre les essais nucléaires. Et montrer ainsi la puissance de frappe de la France.

Toutefois, le voyage ne commence pas sous les meilleurs auspices. Les organisations non gouvernementales se moquent de cette venue en Polynésie. Les Amis de la Terre se demandent si le Président est prêt à nager dans un lagon, lorsque Greenpeace France l’invite à séjourner à bord de son vaisseau amiral, à peine deux mois après le sabotage du Guerrier arc-en-ciel. Lorsque François Mitterrand embarque à bord du Concorde avec ses ministres de l’Intérieur, de la Défense, de la Recherche, des Relations extérieures et de la Nouvelle-Calédonie, l’émetteur supersonique manquait.


Organisée pour faire sensation à l’échelle internationale, la visite présidentielle tourne au désastre. © Gamma-Rapho

La délégation est contrainte de monter à bord d’un nouvel avion, dépourvu d’installations présidentielles. Une fois arrivé en Polynésie, ce nouveau Concorde a rencontré un problème avec son train avant, puis s’est retrouvé face à une piste trop courte, obligeant la délégation à changer d’avion. Petits revers compte tenu de l’importance du détour par Kourou pour assister au tournage d’Ariane. Il faut montrer aux pays concurrents les qualités du programme européen et, ce faisant, bénéficier des succès…

François Mitterrand sait qu’il vient de subir un revers politique.

Après un quart d’heure d’absence, François Mitterrand regagne la salle de contrôle. Il sait qu’il vient de subir un revers politique, que la perte de la fusée et des satellites coûte près de 650 millions de dollars, que l’avenir du programme peut être remis en question. Mais son visage s’adoucit. Il veut rassurer les ingénieurs et techniciens : « C’est parce que vous venez de subir un coup dur et parce que c’est un moment difficile que je suis venu vous dire que j’ai entière confiance en vous. Cet échec n’est pas de votre faute. Depuis ce jour, aucun président de la République n’a assisté à un décollage d’Ariane.


Vous lisez un article de L’Usine Nouvelle 3730 – mai 2024
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