« Il est triste que la France et l’Allemagne ne soient pas capables de répondre ensemble au défi chinois » – .

« Il est triste que la France et l’Allemagne ne soient pas capables de répondre ensemble au défi chinois » – .
« Il est triste que la France et l’Allemagne ne soient pas capables de répondre ensemble au défi chinois » – .

Pourquoi Xi Jinping a-t-il choisi la France pour revenir en Europe après les années Covid ?

Du point de vue chinois, la France représente un pays censé avoir une distance stratégique avec les Etats-Unis, un Etat qui conserve une certaine autonomie et avec lequel on peut discuter. Après Paris, Xi Jinping poursuivra son voyage en Europe via la Serbie et la Hongrie pour différentes raisons. L’idée est de reprendre pied en Europe centrale, alors que des pays comme la Lituanie ont récemment tourné le dos à Pékin en reconnaissant Taïwan.

Par ailleurs, à Belgrade, il y a aussi une dimension politique intérieure, puisque Xi Jinping s’y rendra le 25.e anniversaire du bombardement de l’ambassade de Chine par Washington lors de la campagne de l’OTAN en Yougoslavie. Cet épisode a été traumatisant pour de nombreux Chinois, même si les Américains se sont déjà excusés abondamment. Ce sera l’occasion pour Xi Jinping de rappeler l’agressivité de l’Occident envers la Chine.

Emmanuel Macron revendique une position d’équilibre entre les Etats-Unis et la Chine. Cette politique est-elle efficace à l’heure où Pékin affirme clairement son soutien à la Russie et à l’Iran ?

Lorsqu’il y a soixante ans le général de Gaulle décide de reconnaître diplomatiquement la Chine communiste, cela incite les États-Unis à faire de même quelques années plus tard, en 1972. Nous avons été des pionniers et Emmanuel Macron tente de s’inscrire dans cette lignée. Mais aujourd’hui, la balance a complètement basculé. C’est une Chine beaucoup plus puissante d’un point de vue économique et technologique.

Sur la question ukrainienne, il ne faut pas attendre grand-chose de cette visite d’État. La rencontre entre Emmanuel Macron et Xi Jinping pourrait simplement être utilisée plus tard, à un stade ultérieur, lorsque débuteront les négociations de paix entre Moscou et Kiev. L’idée est d’ouvrir des voies diplomatiques avec la Chine afin de permettre des changements lors des négociations. C’est un pari que fait Emmanuel Macron.

Au-delà de la question ukrainienne, quels sont les principaux points de tension entre les deux pays ?

Sur les questions géopolitiques, il y a le sujet de la zone Pacifique, qui est un lieu de rencontre entre la France et la Chine, car nous y avons des intérêts. L’Afrique est aussi un sujet de tensions, notamment au Sahel où nous avons été évincés par un certain nombre de pays qui se tournent désormais vers la Chine. Il existe également des points de discorde sur les ressources, par exemple la pêche dans l’océan Indien.

Nous avons également différents vendeurs. C’est un dossier géré par Bruxelles, mais les déséquilibres structurels sont devenus très importants entre nos pays. La question de la réciprocité de l’accès au marché est un enjeu crucial, car pendant longtemps la Chine s’est contentée d’assembler des produits pour le compte de l’Europe et sa croissance a été tirée par la consommation intérieure. Aujourd’hui, ses produits entrent en concurrence directe avec les produits européens, c’est une avancée majeure. La concurrence directe s’intensifie.

Une collision économique entre l’UE et la Chine peut-elle encore être évitée ?

C’est le pari que fait l’Europe, et notamment l’Allemagne qui parle de « de-risking », de réduction des risques en matière géopolitique. Mais combien de temps cette position sera-t-elle tenable ? À partir du moment où la relation entre la Chine et les États-Unis dominera celle entre la Chine et l’UE, et à mesure que le fossé entre Washington et Pékin se creusera, notre position deviendra intenable. La Chine en est consciente et essaie de jouer sur nos divisions.

Olaf Scholz a été invité à participer à la rencontre entre Emmanuel Macron et Xi Jinping mais a décliné l’invitation. Berlin a-t-il peur d’offenser la Chine, qui représente un débouché pour ses constructeurs automobiles ?

Il existe des intérêts contradictoires au sein de l’UE. La Chine a toujours joué sur cette fibre pour diviser l’Europe. Avec Emmanuel Macron, on assiste néanmoins à un changement de discours, car le chef de l’Etat a toujours tenté d’impliquer nos alliés européens dans les échanges avec Pékin. Il faut regretter qu’il y ait aujourd’hui des intérêts divergents, et il y a lieu de regretter que la France et l’Allemagne ne parviennent pas à répondre ensemble au défi chinois qui prend de plus en plus de place sur la scène géopolitique.

 
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