Ruffécois : Ilham Bouhadjar, prophète dans son pays
Les habitants de Ruffécois ont choisi Ilham Bouhadjar, co-présidente d’Emmaüs Ruffec, comme héroïne. Un militant social qui sera présent au concert-spectacle Vox Populi en juin prochain à La Canopée.
Quel a été le point de départ de « Hero.es » ?
Avec Chloé Legrand et Pierre Lebret, nous avons l’habitude de mutualiser nos compétences depuis une dizaine d’années au sein du collectif Vox Populi : nous proposons des médiations culturelles dans tout le Sud-Ouest de la France en partageant avec les gens la fabrique des chansons, des vidéos et des œuvres plastiques. C’est dans ce contexte qu’est né le projet « Hero.es », sorte d’album concept basé sur notre Panthéon des personnalités héroïques. C’est une richesse de combiner la musique, la vidéo et les arts visuels. Au-delà du spectacle, nous proposons à chaque fois une exposition où le public peut accéder directement à la bande originale via un QR code.
Dans votre Panthéon, Gisèle Halimi côtoie Charlie Chaplin, Joséphine Baker et Robert Badinter. Quelle est votre définition d’une figure héroïque ?
C’est une personnalité qui a laissé des œuvres remarquables et a permis aux autres d’être ce qu’ils sont. Que seraient par exemple les droits des femmes sans Gisèle Halimi ? Notre Panthéon est un choix collégial. Joséphine Baker a aussi contribué à l’émancipation des femmes, Charlie Chaplin a marqué l’histoire du cinéma… L’héroïsme ne consiste pas à gagner une guerre et peut se révéler des années plus tard. Cela n’empêche pas un héros d’avoir des zones d’ombre. Sur scène, une narration permet de rappeler le contexte de chacune de ces personnalités.
À votre Panthéon, vous avez ajouté des héros élus par les locaux : Claude Mesnard à Rouillac, Ilham Bouhadjar à Ruffec et Eddy Harris à La Rochefoucauld… Ces choix vous ont-ils surpris ?
Oui, d’abord parce que ce sont trois héros vivants ! Nous avons passé beaucoup de temps avec ces trois personnes et ceux qui les connaissent pour récolter le plus d’informations possible… Eddy Harris, écrivain américain, a également été très surpris que les gens du territoire évoquent son nom. C’est comme si les gens éprouvaient une certaine fierté à partager ce territoire avec celui qui a quitté les États-Unis pour s’installer à Pranzac et fait des choses insolites comme descendre le Mississippi en canoë. A l’image d’Ilham Bouhadjar, la coprésidente d’Emmaüs à Ruffec, qui sont nombreux à saluer le travail colossal sur le plan social. Nous avons également été surpris qu’une personnalité politique ait été choisie par les Rouillacais. Au final, le portrait que nous avons choisi de faire de Claude Mesnard parle plus d’humain que de politique : il nous a longuement parlé de lui, un jeune homme envoyé en Algérie pendant la guerre. C’est peut-être de là que vient son attention envers les autres.
Ces trois personnalités sont à la fois ouvertes sur le monde et ancrées dans une ruralité pourtant considérée comme fermée sur elle-même…
Selon moi, il n’y a pas d’opposition entre les mondes urbain et rural, juste des gens qui n’ont pas les mêmes préoccupations. Ces trois choix montrent que beaucoup de choses sont à déconstruire : le repli sur soi et le manque de savoir vivre ensemble ont davantage à voir avec l’isolement des gens derrière leurs smartphones et ordinateurs et l’absence de véritables rencontres et de partage. A travers le spectacle, nous mettons en lumière des personnes capables de sortir d’elles-mêmes pour aller à la rencontre des autres. cela demande des efforts. Mais c’est cette somme d’efforts et d’énergie qui contribue au vivre ensemble et au bien-être de la société.
(1) Vendredi 3 mai à 20h30 au Vingt-Sept à Rouillac (de 8 € à 16 €), vendredi 24 mai à 20h aux Carmes de La Rochefoucauld (de 4 € à 15 €) et samedi 1er juin. à 20h30 à La Canopée à Ruffec (de 7€ à 16€).
