Le week-end du 30 mars, la Vienne a été placée en alerte rouge en Indre-et-Loire, sur décision de Vigicrues. Pour arriver à une telle décision, les données sont aussi complexes que nombreuses. Explications.
Crue record à Nouâtre, Bélâbre submergé, Descartes sous les eaux, une maison de retraite évacuée à L’Île-Bouchard… L’Indre-et-Loire et l’Indre ont été durement touchées par les inondations, entre le 30 mars et le 1er avril.
Sur les rivières Creuse et Vienne, en Touraine, la hausse était bien anticipée. Vigicrues, un organisme de surveillance des niveaux des rivières en France, placé sous l’autorité de l’Etat, avait placé les deux rivières en alerte rouge à partir de samedi. De quoi anticiper de nombreuses évacuations là où l’inondation a été la plus importante. De quoi, aussi, agacer le maire de Chinon, surpris d’avoir dû prendre des mesures préventives pour une crue prévue à près de 6 mètres pour dimanche matin, mais atteignant péniblement 4 mètres 62.
Pour en savoir un peu plus, France 3 a posé quelques questions à Fabien Pasquet, chef du service hydrométrie et prévision des crues à la Dreal Centre-Val de Loire, qui gère le bassin Loire-Allier en amont du confluent avec la Vienne. Service qui communique auprès du grand public via l’outil Vigicrues.
- France 3 CVDL : Concrètement, comment Vigicrues prédit-il une inondation ?
Fabien Pasquet : Nous disposons de toute une série de capteurs qui mesurent le niveau d’eau, environ 300 capteurs, et des pluviomètres. Nous disposons donc de données d’observation, et de données de prévision qui nous ont été fournies par Météo France. Et puis nous disposons d’outils qui permettent d’évaluer la réaction des cours d’eau. On s’intéresse à la réaction d’un bassin versant à la pluie, à la propagation des écoulements…
Grâce à notre connaissance des inondations passées, nous savons que certaines conséquences se produisent à certains niveaux d’eau. Lorsque nous anticipons des excès dommageables, nous activons la vigilance orange. Pour une crue majeure, rare, qui peut être catastrophique, elle est rouge. C’est un croisement entre les conséquences possibles d’un épisode et sa fréquence : un événement rare nécessite une surveillance particulière.
Frédéric Pasquet : C’est la compétence de nos confrères de Poitiers. Je n’ai pas d’opinion. D’une manière générale, les prévisions sont faites le plus tôt possible. Et, entre la prévision et l’arrivée, beaucoup de choses changent : la météo change, la réaction des cours d’eau n’est pas la même, les temps de propagation ne sont pas exactement ceux que nous avions prévus.
Vers 16 heures, les eaux étaient hautes à Chinon, mais aucune habitation n’était inondée.
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© Caroline Ditte / France Télévisions
On peut donc avoir des prédictions assez éloignées de la réalité observée. Il ne faut pas oublier que nous travaillons sur une rivière, dans un milieu naturel. Derrière les outils scientifiques, il subsiste une forte part d’incertitude.
- France 3 CVDL : Après la Vienne et la Creuse, la Loire est en crue. Quelles zones sont actuellement particulièrement à risque dans la région ?
Frédéric Pasquet : Tout le secteur de la moyenne Loire, de Moulins jusqu’à presque Nantes, est à surveiller. Nous disposons de systèmes de confinement qui protègent les zones inondables très peuplées, à Orléans, Tours, voire Angers. Nous surveillons également les bassins du Cher et de l’Indre, ainsi que l’Yèvre à Bourges, souvent inondée en hiver.
Nous avons eu un hiver chaud et humide. Cela change par rapport aux années précédentes, qui étaient plus sèches, ce qui est un bon signe pour les faibles niveaux d’eau qui surviennent cette année. Après, on a effectivement une situation plus propice aux épisodes d’inondations. Sur la Loire, nous avons eu deux crues rien qu’en mars. Et il devrait pleuvoir pas mal dans la région jusqu’à fin mai. Nous ne sommes donc pas à l’abri des autres épisodes.
