« Nous voulons nous mobiliser dans chaque accident grave et mortel »

« Nous voulons nous mobiliser dans chaque accident grave et mortel »
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Entretien. La conférence sur la santé et la sécurité des travailleurs a eu lieu les 13 et 14 mars à Paris. Gérald Le Corre, membre du comité d’organisation de ces rencontres pour la CGT et Alice Pelletier, militante CGT, présentes à l’occasion de ces deux journées, nous partagent leurs points de vue respectifs.

Comment ont été organisés ces deux jours et que pensez-vous de leur tenue ?

Gérald : Ces rencontres sont à l’initiative de la CGT, de la FSU, de Solidaires et de plusieurs associations. Quatre groupes de travail ont été constitués sur quatre thématiques : prévention et indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles, risques organisationnels, femmes et santé au travail, produits dangereux. En pratique, il y a une quinzaine d’ateliers et d’échanges en séances plénières avec 500 participants aux profils majoritairement féminins et une présence importante de la fonction publique.

Alice : Cette initiative répond à un réel besoin. Souvent, sur les questions de santé et de sécurité au travail, nous nous retrouvons rattrapés par nos problématiques locales et spécifiques. Il est important de prendre du recul. Il y avait beaucoup de sujets à aborder et pas forcément assez de temps. Il s’agit véritablement d’une initiative qui appelle à l’action. Il y a un vrai défi dans la remobilisation du monde du travail, et cette préoccupation était très présente lors de ces rencontres. Aujourd’hui, nous n’agissons que lorsque quelque chose de grave arrive. Il y a un réel besoin de prendre conscience, y compris dans les équipes syndicales, des moyens d’agir en amont, de faire de la prévention. C’est bien un combat que notre camp social doit mener : agir sur le risque lui-même pour l’éliminer.

Quel bilan faites-vous de ces rencontres ?

Gérald : Le bilan est très positif même si une des difficultés de ce type de réunion est de vouloir traiter le plus de sujets possible dans un délai court. Impossible d’assister à tous les ateliers, au grand regret de beaucoup. Tout le monde repart avec l’envie de continuer, et c’est l’un des défis des prochains mois. Nous sommes convaincus que nous pouvons construire un réseau de soutien en réunissant des militants syndicaux et associatifs, des médecins du travail, des experts santé et sécurité du CSE, des avocats militants, etc. S’il est impossible de réaliser des enquêtes à la place des militants d’entreprises, des accidentés et de leurs bénéficiaires, le recours à un réseau permanent peut éclairer une situation, fournir des moyens de compréhension et d’action. C’est souvent là que les équipes syndicales sont sous-équipées. Nous devons collectiviser nos compétences pour mutualiser nos forces, mais aussi rendre visibles nos luttes. Il y a des luttes locales, il y a des expertises, il y a des enquêtes de qualité, qui mettent en lumière les manquements du patronat, mais aussi des condamnations judiciaires. Le deuxième axe de travail serait de construire, à l’occasion de la journée internationale pour la santé et la sécurité au travail, des rassemblements de rue le 25 avril et pas seulement à Paris, en essayant d’élargir la mobilisation sur la base de l’appel et de la plateforme adoptée. .

Alice : Effectivement, ce sont des leviers dont nous avons besoin, d’autant plus avec la disparition du CHSCT au profit du CSE. Nous avons besoin d’une action militante plus forte, et donc d’activer nos propres réseaux. Ce que dit Gérald à propos de la mutualisation, le fait de rechercher notre propre réseau d’expertise, notre propre réseau d’entraide, notre propre réseau de mobilisation entre organisations syndicales et d’organiser une véritable solidarité, est essentiel. L’un des succès de la Conférence est aussi que leur succès impose une responsabilité à nos organisations syndicales respectives. C’est évidemment un travail de longue haleine, mais je crois que c’est une bonne chose en termes de remobilisation de notre camp social, que c’est un véritable point d’appui et que pour l’avenir ces sujets seront essentiels à la défense de nos droits, mais aussi d’imaginer autre chose, en termes d’acquis sociaux. Cela doit être soutenu par une mobilisation large et solidaire, il n’y a pas d’autre solution.

Gérald : Les questions de santé et de sécurité des travailleurs doivent être abordées à l’intersyndicale nationale. A ce jour, il n’y a pas eu une seule mobilisation nationale sur la question des risques organisationnels, des risques psycho-sociaux, alors qu’on ne supporte plus le style de management de France Télécom, dont on ne veut plus de ces politiques d’objectifs chiffrés. C’est la même chose si l’on parle de cancérigènes, de pesticides, de plomb, etc. Nous continuons à polluer les travailleurs, à polluer les riverains, à polluer la planète sans réaction adéquate. Les directions des organisations syndicales, notamment CGT, FSU et Solidaire, doivent pleinement aborder ces questions pour construire des mobilisations communes à la hauteur des attentes des équipes militantes de terrain. On a vu récemment que le ministère du Travail a été contraint de réagir sur la question des décès au travail, avec une campagne minime qui ne rappelle même pas aux salariés qu’ils ont un droit de retrait. G. Attal s’est vu obligé d’en dire un mot lors de son dernier discours sans rien annoncer de concret pour mettre fin aux 1 200 décès au travail par an. Nos enquêtes montrent que pour la grande majorité, il s’agit de décès évitables. Pour mettre fin aux décès au travail, il faut un choc dans les politiques publiques et notamment un ministère de la Justice qui arrête cette complaisance à l’égard de la délinquance en col blanc. Nous voulons mener ce combat, nous voulons nous mobiliser dans chaque accident grave et mortel. Et surtout mettre en place des enquêtes syndicales qui confirmeront que les accidents résultent principalement des choix économiques de l’entreprise. Bref, c’est toujours la loi du profit contre l’obligation de sécurité.

Alice : Oui, sur le terrain c’est sûr que ce sont des préoccupations et des sujets que nous traitons de manière permanente, récurrente et quotidienne. Mais dans un cadre très isolé. Il nous faut des leviers pour sortir de l’isolement et gagner sur des choses concrètes. C’est la seule façon de progresser sur ces questions.

Commentaires recueillis par Stéphanie B.

 
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