50 ans après sa mort, pour les politiques, à chacun son Pompidou

50 ans après sa mort, pour les politiques, à chacun son Pompidou
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Tout le monde est multiple » dit Georges Brassens. Pompidou l’était peut-être un peu plus que les autres, d’où l’ampleur de l’éventail des hommes politiques qui revendiquent son héritage et le vantent aujourd’hui. À l’opposé de l’amnésie autour des héritages auvergnats dans l’opinion publique. Du président perçu comme libéral à l’homme du peuple, en passant par le banquier et l’homme de lettres et d’arts en tout genre, la figure du natif de Montboudif semble recouvrir toutes les nuances de la droite républicaine. Et briller aux ors de l’Élysée macronienne.

Pompidou le libéral… vraiment ?

Au premier rang de ceux qui récupèrent l’image de l’ancien président, on trouve le maire de Cannes, David Lisnard, qui publie, avec l’historien Christophe Tardieu, Les leçons de Pompidou, publié par l’Observatoire à l’occasion du demi-siècle de la mort de l’ancien président. Libéral chez LR, le Cannois vante néanmoins un homme à la vision interventionniste de l’État.

Ainsi, au cœur de sa ligne dirigiste, on retrouve principalement sa planification du développement industriel, de 1971 à 1975, donnant lieu notamment à la « turbotrain » qui deviendra le fameux TGV.

Dans les secteurs de l’économie liés aux ressources et à l’énergie, Pompidou a une nouvelle fois préféré le capitalisme d’État à un État laissant libre cours au capitalisme.

Il s’est également fermement opposé à toute idée de décentralisation, autrefois avancée par de Gaulle, avant sa défaite en 1969. Incisif, son ancien Premier ministre est même allé jusqu’à fustiger l’Europe des régions, la qualifiant d’« Europe des régions ». « étrange retour à un passé largement révolu, celui du Moyen Âge et de la féodalité ».

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« Il y a un certain anachronisme à vouloir faire de Pompidou une sorte de libéral, par opposition à un De Gaulle étatiste. » juge Arnaud Teyssier, historien et auteur de L’énigme Pompidou-de Gaulle (Perrin). « Je le présenterais plutôt comme un conservateur éclairé, qui avait le sentiment que la société française devait évoluer sur un certain nombre de sujets comme les questions sociétales. »

Pompidou, l’homme du peuple

Certains reconnaîtront une forme de romantisme audiardesque dans la personnalité de Georges Pompidou, dont beaucoup soulignent la bonhomie naturelle, l’attachement à son territoire et la proximité avec son époque et ses plus contemporains. “populaire”.

Les photographies de Pompidou marchant dans sa cour avec ses bûches sous le bras, ou une cigarette à la main au volant d’une Citroën DS, sont presque aussi populaires que celles de Jacques Chirac en freeride dans les allées du métro parisien. Son ministre corrézien n’a jamais caché le lien quasi filial qui l’unissait au successeur de de Gaulle, qu’il pleura devant les objectifs des photographes à sa mort en 1974.

C’est d’ailleurs à Jacques Chirac que Georges Pompidou se serait adressé à sa sortie la plus populaire, son célèbre « Mais arrêtez d’embêter les Français. » Et la postérité de cette répartie a sans doute influencé un certain Emmanuel Macron. Car celui qui a été présenté en 2017 comme un candidat sans programme ni armature idéologique s’est en fait souvent inspiré de la verve pompidolienne, au point de citer (presque) littéralement le déchaînement de son prédécesseur : en 2022, dans les colonnes de Parisienalors que les campagnes de vaccination contre le Covid-19 se succédaient, le président de la République assumait sa volonté de “embêter les non vaccinés”.

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Près de deux ans plus tard, la même personne pousserait l’anachronisme et l’envie de rassembler autour du sujet de l’automobile. Interrogé par TF1 et France 2 sur ses mesures d’aménagement écologique, naturellement en contradiction avec le modèle de voiture individuelle qui prévaut en France depuis des décennies, il a répondu : « nous sommes très attachés à l’automobile. Nous aimons les voitures. Et j’aime ça. »

Si ce “dis la vérité” manque d’authenticité, l’historien Arnaud Teyssier voit dans cette inspiration une « Nostalgie d’une France qui a connu une certaine tranquillité, nostalgie des années de Gaulle qui ne dit pas son nom ». Mais l’auteur de L’énigme Pompidou-de Gaulle rappelle que Georges Pompidou – contrairement à Emmanuel Macron – était vraiment perçu comme quelqu’un d’abordable, en raison de son origine sociale de la haute bourgeoisie et de son contraste avec les “Drapé qui entourait de Gaulle”.

Georges l’amateur d’art

Il s’agit d’une infraction à la fois historique et algorithmique. Lorsqu’un internaute tape « Pompidou » dans la barre de recherche Google, il tombe d’abord sur les horaires d’ouverture et sur le site officiel du musée de Beaubourg. Peut-être une forme d’hommage de la compagnie californienne à la profondeur artistique et culturelle de l’ancien Président ?

Auteur d’un Anthologie de la poésie française constamment réédité, Pompidou s’impose comme l’un des présidents les plus férus d’art, notamment le plus contemporain, d’où l’impulsion qu’il donne à la création d’un centre d’art moderne au cœur de Paris. Mais ce goût mêlant le classique et le moderne n’a pas trouvé de nouveau porte-drapeau parmi les personnels politiques actuels.

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“Il n’y a pas d’équivalent, Analyse d’Arnaud Teyssier, Mitterrand avait une dimension littéraire qui lui était reconnue, mais Pompidou était profondément cultivé, profondément littéraire. Il est l’auteur d’un grand discours à l’occasion du 100e anniversaire de Sciences Po Paris, où il présente une apologie de la culture générale, de l’histoire, de la littérature et de la connaissance des civilisations. »

Pour l’historien, l’absence de renouveau contemporain de cette dimension culturelle est le signe que la politique « est entré dans une sorte d’anesthésie idéologique. Toute cette culture a cédé la place à une politique quelque peu apaisée. ».

Pompidou, l’homme d’État

Comme le natif de Montboudif, Édouard Philippe a toujours juré de ne pas vouloir être candidat à l’élection suprême face au président qui l’a placé sur le devant de la scène, à ses côtés. Édouard Philippe rêve-t-il d’être le Pompidou que Macron n’a pas pu être ? Le maire du Havre se moquait régulièrement de ses rares points communs avec son illustre prédécesseur à Matignon, notamment lorsqu’il était interrogé sur ses ambitions personnelles.

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Mais dans les périodes basses du macronisme, il est difficile pour Le Havre de ne pas vouloir faire la comparaison, se considérant comme le successeur naturel de son bienfaiteur politique initial. En 2018 déjà, Jean-Luc Mélenchon comparait Philippe à son lointain prédécesseur, pour mieux viser la présidence de la République, le qualifiant de « chef de remplacement » de la droite libérale : « La monarchie présidentielle ne fonctionne qu’avec un maître absolu. De Gaulle n’était plus De Gaulle lorsque Pompidou semblait mieux maîtriser la situation que le général parti de manière fantaisiste pour Baden-Baden. Il y a du Pompidou dans cet Édouard Phillippe tempérant les foucades d’un Jupiter de Saint-Martin. »

L’ancien « PM » prépare en tout cas l’élection présidentielle de 2027, avec la volonté de la passer à la fois patiemment et pragmatiquement. Un autre admirateur du vieux George ? Il y en a certainement des dizaines à droite.

 
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