Amine, lycéen de 16 ans, a été poignardé à mort en décembre 2020 à la Cité Gély, fief tzigane qui est aussi un haut lieu du trafic de drogue en centre-ville. L’accusé, alors âgé de 17 ans, a nié les faits devant le tribunal pour enfants de l’Hérault, où le huis clos a été levé.
« Aujourd’hui, j’ai la conviction que c’est l’accusé qui m’a poignardé. Et moi trouve dommage qu’il n’ait pas pris ses responsabilités jusqu’au bout : cela m’aurait permis de soulager mon cœur, et peut-être de pardonner”. Aux assises de l’Hérault ce mercredi 13 mars, la mère d’Amine, poignardé au cœur le 26 décembre 2020 dans la ville Gély de Montpellier, parle avec émotion de son fils, lycéen à Castelnau-le-Lez.
A cause d’un vélo acheté 10€ ?
Amine rêvait d’être pompier et n’aurait jamais dû mourir à 16 ans dans ce fief de la communauté gitane qui abrite plusieurs points de deal. Il était censé jouer à la Xbox chez son ami Idriss, mais malgré le couvre-feu lié au Covid, les deux garçons se retrouvent dans la ville où Idriss a ses habitudes, et où surgit une sombre confusion, dans une rue sombre, peut-être à cause de le vol d’un vélo acheté 10 €. Mais qui sait?
« Pas d’arme, pas d’image, pas d’ADN, pas d’aveu. C’est la ville d’omerta», lâche le procureur général.
“J’ai vu une altercation, j’ai continué mon chemin” résume Jacques, jugé pour non-assistance à personne en danger. En ville, il a récemment été un guetteur tremblant de peur sur un point de deal. « Il y a beaucoup de travail à faire, les gens ont des cagoules, ils te donnent ta place et ton argent. Nous surveillons une zone et crions si nous voyons la police.
“Ils nous menacent avec des armes”
Hamza, alors âgé de 17 ans et neuf mois, et qui comparait détenu pour meurtre devant ce tribunal pour enfants où le huis clos a été levé, travaillait également pour les trafiquants de drogue. “Là, ils sont violents envers nous, il est déjà arrivé qu’ils nous frappent, qu’ils nous menacent avec des armes” il dit. En fuite d’un centre éducatif renforcé, il gagnait 80 euros par jour, alors qu’il était recherché pour l’incendie d’un bus à Nanterre, à l’été 2020. Au lendemain du crime, qu’il nie, il s’enfuit en Espagne. “J’avais peur des représailles des gitans de la ville de Gély, ils ont de l’argent et les moyens de te retrouver” répète simplement l’accusé.
Un coup légèrement violent sur le haut du torse
Le soir du meurtre, Hamza a rejoint Zakaria avec qui il partageait une chambre d’hôtel. “JEIl m’a raconté qu’il avait eu des ennuis avec le jeune homme qui voulait lui payer une barrette avec un faux billet de 20 euros. dit Zakaria. “LLe jeune homme aurait eu un comportement un peu fier et Hamza a sorti le couteau, il a dit qu’il avait donné un coup légèrement violent du bas vers le haut de la poitrine, mais cela ne lui avait fait que du mal.
“Où peut-il inventer ça, c’est exactement ce que décrit le pathologiste” répond le procureur général Pierre Denier, qui requiert quatorze ans de prison pour ce meurtre, la peine maximale de 30 ans étant divisée par deux pour un mineur.
Trouver un équilibre
“JECela fait 60 ans que je caresse ce bar, j’y ai tout vu, tout entendu. Les corps décapités, les enfants écrasés” lance le bâtonnier Gérard Christol, partie civile avec Me Vincent Paliès et Cécile Sauvage. L’avocat de 80 ans s’exprime avec émotion “d’autant plus grand que j’ai eu plusieurs fois le sentiment que c’est la dernière. Et il donne ce conseil aux jurés. « Lorsque vous prendrez votre décision, j’aimeraiset on a l’impression d’avoir trouvé un équilibre que tout le monde peut comprendre. C’est le sommet d’une justice qui a atteint son objectif. Verdict jeudi 14 mars.