Les entrailles du volcan de la Soufrière en Guadeloupe cartographiées en 3D

Les entrailles du volcan de la Soufrière en Guadeloupe cartographiées en 3D
Les entrailles du volcan de la Soufrière en Guadeloupe cartographiées en 3D

Surplombés par le volcan de la Soufrière, point culminant de la Guadeloupe, les habitants de l’île antillaise font partie des 800 millions de personnes dans le monde qui vivent à moins de 100 kilomètres d’un volcan dangereux, et sont donc soumis aux caprices de celui-ci. ils surnomment « la Vieille Dame ». Pour gérer au mieux le risque lié aux éruptions volcaniques, il est essentiel de prévoir leur survenue, ce qui est souvent très difficile en raison du manque de données sur l’intérieur du volcan. Elsa Giraudat, de l’Institut Langevin, à Paris, et ses collègues de l’Institut de physique du globe ont réalisé une avancée importante en produisant des images tridimensionnelles de la structure interne de la Soufrière.

L’équipe a installé un réseau de 76 géophones sur les flancs du volcan, des appareils qui mesurent le bruit sismique, provoqué notamment par les activités humaines ou les vagues sur le sable. Lorsque les ondes sismiques rencontrent des structures réfléchissantes dans le volcan (fractures, poches magmatiques, etc.), elles changent de trajectoire. Il serait en principe possible, en les mesurant en surface, de reconstituer la structure interne du bâtiment. Alexandre Aubry, directeur de recherche au CNRS, qui a participé à l’étude, explique : « Pendant longtemps, nous n’avons pas utilisé le bruit sismique, même s’il contient beaucoup d’informations. Des chercheurs se sont rendu compte il y a une vingtaine d’années que si l’on corrèle le bruit sismique enregistré par deux géophones, on accède à ce que l’on appelle la « réponse impulsionnelle » entre ces géophones : tout se passe comme si l’on créait un microséisme au niveau de l’un des appareils et que l’on écoutait à lui de l’autre. En considérant toutes les combinaisons possibles de paires, on obtient une matrice de réflexion, à partir de laquelle on construit une image des structures réfléchissantes du volcan, comme en échographie. »

Cependant, l’image ainsi collectée est brouillée par les hétérogénéités de l’environnement, qui créent des distorsions. Pour corriger ces aberrations, les chercheurs ont appliqué un traitement informatique à leurs données, en s’inspirant d’une méthode utilisée en astronomie avec les ondes lumineuses. « Quand on regarde une étoile, poursuit Alexandre Aubry, on la voit scintiller à cause des turbulences de l’atmosphère qui déforment son image. Les astronomes compensent ces aberrations grâce à des miroirs déformables placés dans le télescope. » Dans cette technique appelée « optique adaptative », les astronomes utilisent un laser pointé vers le ciel qui excite les atomes de sodium présents dans la haute atmosphère et crée ainsi une « étoile virtuelle ». L’image déformée par les turbulences de cette étoile artificielle indique comment configurer le miroir pour collecter une image claire des étoiles réelles. « Ici, nous reprenons ce principe », poursuit Alexandre Aubry. A partir des données de la matrice de réflexion, nous synthétisons des sortes d’étoiles virtuelles dans toutes les zones du volcan et nous « écoutons » les ondes sismiques provenant de ces « étoiles » pour étudier et compenser leur distorsion. »

L’analyse des données des ondes sismiques révèle une image a priori inutilisable (gauche). Mais une nouvelle méthode corrige les distorsions du signal. On voit alors clairement le conduit qui relie la surface et un réseau de chambres magmatiques entre 5 et 8 kilomètres de profondeur.

©Elsa Giraudat

Les chercheurs ont ainsi obtenu une seconde image, beaucoup plus nette, de l’intérieur du volcan, avec une précision d’une centaine de mètres. Ils ont découvert qu’entre 5 kilomètres de profondeur et la surface de la Soufrière, le magma traverse la roche dans un long conduit tortueux, tandis qu’entre 8 et 5 kilomètres de profondeur, il se répartit en grandes lentilles horizontales superposées les unes aux autres. d’autres et reliés par de petits conduits verticaux.

Grâce à cette méthode unique, Alexandre Aubry et ses collègues espèrent aller plus loin : « La prochaine étape serait d’établir ce genre d’image en fonction du temps, d’étudier en profondeur la dynamique du magma. De plus, actuellement, pour prédire les éruptions, on écoute les microséismes en profondeur sans vraiment savoir d’où ils viennent. Notre méthode permettrait donc de mieux localiser ces séismes pour savoir quelle zone souterraine du volcan est en mouvement. » Ces données permettraient également d’évaluer avec précision les pressions et les températures au sein du volcan, la connectivité entre les systèmes magmatiques et la surface, de détecter plus tôt la présence de magma potentiellement éruptible et de suivre son évolution spatio-temporelle… des paramètres qui influencent la survenue des éruptions volcaniques. .

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