Est-il vrai que nous connaissons mieux l’espace que les fonds marins ? – Édition du soir Ouest-France – .

Est-il vrai que nous connaissons mieux l’espace que les fonds marins ? – Édition du soir Ouest-France – .
Est-il vrai que nous connaissons mieux l’espace que les fonds marins ? – Édition du soir Ouest-France – .

By Collot JULIEN, David BARATOUX, Pierre-Yves LE MEUR, Sarah SAMADI*.

Connaissons-nous vraiment mieux notre planète ou Mars ? Cette question peut paraître absurde, mais si nous sommes capables de cartographier toute la surface de la planète rouge, toute une partie de la nôtre nous est quasiment inconnue : les fonds marins. L’exploration est l’un des moteurs de la science et même sur notre planète, nous avons encore tant à découvrir.

Les profondeurs marines et l’espace apparaissent comme les dernières frontières de l’humanité. Ces objets lointains et difficiles d’accès fascinent, au-delà de leurs différences. Est-il vrai que nous connaissons mieux l’espace que les fonds marins ? Comment les explorons-nous, et en réponse à quelles motivations ? Ce que nous savons ou ne savons pas dépend à la fois des moyens mis en œuvre (comment nous regardons) et des questions que nous nous posons (ce que nous regardons ou recherchons). Ces questions renvoient à la vocation exploratoire de la science que sa bureaucratisation actuelle tend à nous faire oublier.

La Terre est recouverte à 70 % par des océans d’une profondeur moyenne de 3 700 m. Regardez avec un masque depuis la surface, vous ne verrez le fond que s’il y a moins de 10 m d’eau, regardez le ciel, les photons qui vous parviennent auraient pu traverser des millions d’années-lumière ! L’eau constitue la principale barrière à la connaissance des fonds marins : les ondes électromagnétiques (lumière, lasers, ondes radio) y sont très rapidement absorbées, alors qu’elles se propagent sur d’immenses distances dans l’espace.

Connaissance partielle des fonds marins

On ne peut donc caractériser les océans qu’indirectement depuis les navires, à l’aide de sondeurs acoustiques ou par prélèvement d’échantillons obtenus à l’aide d’outils suspendus à un câble. Parfois, nous utilisons des submersibles habités ou robotisés qui n’observent qu’à une dizaine de mètres autour d’eux grâce à de puissants projecteurs. En 2023, seuls 25 % du relief des fonds marins avaient été cartographiés par des méthodes acoustiques.

Ce type de navire qui permet la cartographie ne se déplace qu’à 5 km/h, il faudrait donc trois siècles pour parcourir la totalité des fonds marins à cette vitesse. Dans les années 1990, une nouvelle méthode a permis d’estimer grossièrement la profondeur des océans à partir de petites variations de l’altitude de la surface de l’eau, mesurées par satellites (altimétrie). Ce sont les cartes que nous consultons dans Google Earth.

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En 2023, environ 25 % des fonds marins étaient cartographiés à une résolution de 50 m/pixel. En noir : zones non cartographiées. Programme international de cartographie des fonds marins Gebco qui vise à regrouper toutes les données bathymétriques mondiales pour améliorer la connaissance des océans. (Photo : fournie par l’auteur via The Conversation)

Partout où l’on regarde, on découvre des organismes originaux. Par exemple, l’exploration des fonds marins révèle des animaux très vivants dont les plus proches parents sont des animaux fossiles – donc éteints – connus depuis longtemps dans les couches sédimentaires des continents ! On a également découvert à la fin des années 1970 que la photosynthèse n’est pas la seule source primaire de matière vivante. Ainsi, au pied de cheminées hydrothermales profondes, qui émettent des fluides chauds et « toxiques », des oasis de vie prolifèrent grâce à des bactéries chimiosynthétiques capables de produire de la matière organique sans lumière. Depuis, la chimiosynthèse est également observée dans les milieux côtiers, mais aussi sur terre et même dans l’atmosphère !

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La découverte de l’espace

Dans l’espace, le lancement de la sonde soviétique Luna 1 en 1959 marque le début de l’exploration spatiale du système solaire. 60 ans plus tard, les huit planètes du système solaire ont été visitées par une sonde spatiale, ainsi que les plus gros satellites des planètes géantes. Ces sondes ont produit des images de paysages extraterrestres inhabitables mais incroyablement variés.

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L’exploration à l’aide de caméras depuis l’espace s’est rapidement enrichie d’instruments permettant de cartographier la nature des matériaux (composition chimique, minéralogique, recherche de molécules organiques) tandis que l’exploration in-situ se développe (atterrisseur, puis véhicules capables de rouler, et tout récemment un petit hélicoptère), pour toujours plus de mobilité au service de l’exploration. Il est possible de réaliser des cartes géologiques de n’importe quelle planète rouge sans qu’aucun homme n’ait foulé son sol.

Dunes de sable observées par l’instrument HiRISE de la sonde Mars Reconnaissance Orbiter (MRO). Résolution : 25 cm/pixel. À cette résolution, il est possible d’observer de petites ondulations sur les dunes, voire le mouvement des dunes sur quelques années seulement (largeur de l’image : 1 km). (Photo : NASA/JPL-Caltech/UArizona, fournie par l’auteur via The Conversation)

Notre connaissance du système solaire provient aussi des météorites, arrachées par des collisions (impacts) et qui terminent leur voyage interplanétaire à la surface de notre planète. Les missions spatiales sont également dédiées à la collecte d’échantillons. Ce fut le cas des missions Apollo vers la Lune, et plus récemment de la mission OSIRIS-REx qui a pu ramener sur Terre un échantillon de l’astéroïde Bennu. Bientôt, ce sera le tour de Mars.

Les sondes spatiales ont atteint des distances considérables. La sonde New Horizons, après avoir survolé Pluton, s’est rendue aux confins du système solaire (à plus de 6 milliards de km de la Terre) pour fournir des images d’un petit astéroïde (Arrokoth) en forme de bonhomme de neige qui nous raconte les premiers instants du formation des planètes. Mais il reste encore beaucoup à explorer, à la recherche d’environnements éventuellement habitables. Des milliers de corps du système solaire (astéroïdes, petits satellites de planètes géantes) ne sont connus que grâce à la lumière qu’ils réfléchissent depuis le Soleil.

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Les distances parcourues semblent déjà immenses, mais aucune sonde spatiale construite par l’homme n’a réellement quitté la zone d’influence du Soleil, même si Voyager 1 et 2 sont bel et bien en route vers le milieu interstellaire. Pour atteindre l’étoile la plus proche de nous, ce ne sont pas quelques milliards de kilomètres qu’il nous faut parcourir, mais 40 000 milliards ! Il ne nous est actuellement pas possible d’explorer directement l’espace au-delà du système solaire autrement que grâce à la lumière que nous renvoient les objets qui peuplent l’univers.

Explorations plus poussées

Sur le plan cartographique, il est exact de dire que l’on connaît mieux la surface des étoiles du système solaire que les fonds marins. Les moyens alloués aux premiers sont plus importants (2 milliards d’euros ont été consacrés à l’exploration spatiale en France en 2020, contre 0,4 milliard pour les fonds marins). Au-delà du système solaire, les prouesses technologiques permettent de voir quelques détails sur la « surface » des étoiles, et de révéler le caractère rocheux ou gazeux des exoplanètes, mais nous sommes très loin d’avoir cartographié les centaines de milliards d’objets qui peuplent notre planète. galaxie.

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Il faut ici réaffirmer que la science est en grande partie une question d’exploration et qu’il est essentiel de cultiver cette dimension fondamentale. Cette exploration est étroitement liée à la recherche des origines de la vie, même si d’autres enjeux, économiques ou géopolitiques, motivent également ces recherches. Les molécules organiques découvertes en dehors de notre planète ou les processus bio-et géologiques identifiés dans les environnements sombres des fonds marins questionnent la capacité de la vie à se développer ailleurs et partout dans l’univers.

L’exploration de l’espace et des fonds marins ne s’opposent pas, elles sont complémentaires, et se nourrissent l’une de l’autre pour comprendre nos origines, repenser notre présent et concevoir notre futur !

La version originale de cet article a été publiée dans La conversation.

* À propos des auteurs : Collot Julien, enseignant-chercheur en géosciences marines, Université de Bretagne-Occidentale ; David Baratoux, géologue, à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) ; Pierre-Yves Le Meur, anthropologue, chercheur principal à l’IRD et Sarah Samadi, professeure de biologie évolutive au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN).

 
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