À mesure que la glace fond, les niveaux d’eau augmentent, ce qui modifie légèrement la rotation de la Terre. Ce phénomène pourrait changer notre façon de mesurer le temps.
La planète bleue au ralenti ? Selon une étude de la revue scientifique Nature publiée mercredi 27 mars, la Terre tourne actuellement moins vite en raison du réchauffement climatique. Un phénomène imperceptible pour l’humain, mais qui pourrait avoir des conséquences sur notre façon de mesurer le temps.
La fonte des glaces est à blâmer
Gilles Dawidowicz, vice-président de la Société Astronomique de France, explique à BFMTV que « le mouvement de rotation de la Terre, qui s’accélère en temps normal », est actuellement confronté à un « contre-phénomène » de ralentissement de notre planète plus rapide que attendu, « lié au réchauffement climatique ».
Comment expliquer ce phénomène ? Concrètement, le réchauffement climatique entraîne la fonte de la banquise au pôle Nord et au pôle Sud, un phénomène bien connu, mais qui a de multiples conséquences. Parmi eux, les chercheurs notent que la glace fondue atteint toutes les mers et océans de la planète, ce qui augmente alors la masse de la Terre à l’équateur.
Le changement reste “infime”, assure sur BFMTV Christian Bizouard, astronome à l’observatoire de Paris, chargé de surveiller la rotation de la Terre, il est de l’ordre de “millisecondes ou en fractions de millisecondes en centaines d’années”.
L’effet ralentisseur de la fonte des glaces a été suggéré à la fin du XIXe siècle et calculé depuis les années 1950, rapporte Duncan Agnew de l’Agence France-Presse (AFP). « Mais la nouveauté de mes travaux est de montrer l’ampleur de l’impact de la fonte des glaces sur la rotation de la Terre. Un changement jamais vu auparavant », dit-il.
Conséquences sur le temps universel
Ce ralentissement est imperceptible pour l’homme, mais il est détecté par l’horloge internationale qui est chargée depuis 1967 de définir l’heure universelle internationale, régulièrement mise à jour et utilisée notamment pour faire fonctionner uniformément les services numériques et comme la navigation par satellite.
L’heure UTC est liée à l’heure astronomique qui est calculée avec la vitesse de rotation de la Terre. Problème, cette rotation n’est pas constante. Les scientifiques doivent donc régulièrement apporter des corrections.
« Parfois, on ajoute des secondes intercalaires, par exemple 23h59min et 60 secondes », explique Gilles Dawidowicz.
Prendre une seconde de repos ?
Avec le ralentissement de la rotation de la Terre, une nouvelle difficulté apparaît pour les scientifiques.
“Peut-être, dans quelques années, il faudra lui soustraire une seconde”, ce qui serait inédit, indique le vice-président de la Société Astronomique de France.
“Ça va être un peu ce qu’on craignait du bug de l’an 2000”, ajoute-t-il, soit un saut dans l’inconnu qui inquiète la communauté scientifique, alors que la société actuelle est de plus en plus dépendante de l’informatisation.
“Je ne recommanderais pas d’être dans un avion à ce moment-là”, a déclaré à l’AFP Demetrios Matsakis, ancien scientifique en chef de l’Observatoire naval des États-Unis. a participé aux travaux.
Le ralentissement est tel qu’il pourrait reporter l’éventuelle réduction d’une seconde à 2029, selon les résultats de l’étude. Sans les effets du réchauffement climatique, il aurait sans doute fallu l’ajouter en 2026.
Ce retard est cependant plutôt bienvenu pour les métrologues, car il leur donne « plus de temps pour décider si 2035 est la meilleure date pour supprimer la seconde intercalaire, ou s’il faut l’abandonner avant cette date », a réagi Patrizia Tavella, du Bureau international de Poids et mesures (BIPM), dans un commentaire joint à l’étude.
