La Nadia, une guinguette sportive

La Nadia, une guinguette sportive
La Nadia, une guinguette sportive

Ils cherchaient un « lieu fédérateur » pour vivre le sport féminin avec ses fans, mais il n’existait pas. La solution, pour Catherine D. Lapointe et Caroline Côté ? Créez le leur.

C’est ainsi qu’est née l’idée de Nadia, un restaurant montréalais dont la vocation sera de diffuser les prouesses des athlètes féminines d’ici et d’ailleurs, de la Victoire aux Roses de Montréal et tout le reste.

«Cela vient d’un besoin commun à plusieurs personnes», nous explique Catherine D. Lapointe, en entrevue avec La presse dans un café du Plateau Mont-Royal.

Ce besoin leur a été confirmé lors de leur premier événement « nomade », le 30 novembre dernier, au pub Pit Caribou, où les deux restauratrices travaillent depuis des années. Ils ont diffusé le premier match de la saison Victory, dans la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF), que l’équipe a remporté en tirs de barrage.

« Nous avons eu une excellente réponse ! souligne Caroline Côté, assise à côté de son partenaire. Les gens étaient là. Et nous avons fait le meilleur match possible. »

Leur initiative s’inscrit dans le véritable essor du sport professionnel féminin partout dans le monde, et ici au pays. Mais cette hausse, jusqu’à maintenant, n’a pas trouvé d’écho dans le paysage de la restauration québécoise.

« Ce projet, pour moi, est vraiment une opportunité de compenser cela et de l’offrir aux autres », nous dit Caroline Côté. Cette accessibilité, ce lieu facile, accueillant, chaleureux, où l’on peut aller s’inspirer des femmes. »

Il y a tellement d’athlètes inspirants qui réalisent des performances incroyables.

Caroline Côté

Leur objectif est d’avoir trouvé un emplacement fixe d’ici 2025. « Nous visitons les lieux ! », dit Catherine. En attendant, ils organiseront d’autres émissions nomades, notamment pour mettre en avant les besoins des amateurs, pour « construire la communauté » en « faisant passer le message », et pour aider au financement.

« Notre étude de marché est la suivante : nous essayons, nous le faisons », ajoute-t-elle.

Nadia Comaneci, « Le pont » entre les générations

Pourquoi Nadia ? Le nom du projet est inspiré de celui de Nadia Comaneci, grande star roumaine des Jeux olympiques de Montréal en 1976.

« Je suis née dans les années 1980, raconte Catherine D. Lapointe. Je n’ai pas vécu les Jeux de Montréal en y étant, mais j’ai grandi avec le souvenir [de Comaneci]. Son décès laisse un héritage si puissant. »

PHOTO PIERRE MCCANN, LA PRESSE ARCHIVES

Nadia Comaneci aux Jeux olympiques de Montréal en 1976

Ainsi, le symbole de Nadia Comaneci devient « un pont » entre la génération qui l’a vue se produire à Montréal et celle qui ne vit que de cette « mémoire collective ».

Notre interlocutrice était gymnaste dans sa jeunesse. Pour elle, il s’agit d’un « sport complet », qui pousse ses athlètes à faire preuve de « souplesse », d’« endurance », de « force ». De plus, le parcours de Comaneci est une histoire de « résilience », estime-t-elle.

Comme celui de bon nombre des sportifs actuels, que les deux femmes d’affaires souhaitent promouvoir au sein de leur établissement.

« La place des femmes dans le milieu professionnel est souvent sous-estimée, explique Catherine D. Lapointe. Il s’agit d’y penser d’abord, tout en faisant un clin d’œil à l’histoire sportive de Montréal. En plus, ce sera le jubilé [des Jeux de Montréal] en 2026. »

« Un rouet »

Les deux grands fans de sport « consomment » l’offre de bar sportif existante. Mais ils voulaient « avoir accès à autre chose ».

Pour leur « guinguette », ils souhaitent un environnement « moins agressif », un espace de « communion » et de « partage », qui ne se sent pas obligé de baigner dans l’alcool.

« Ce ne sera pas paisible ! assure Caroline. Ça va être festif quand même. Il y aura de grandes explosions d’énergie. Mais nous recherchons une ambiance différente, un peu plus inclusive. »

Ils voudraient devenir le « quartier général » d’équipes sportives, de jeunesse ou de loisirs, « qui veulent se rassembler quelque part ». Un espace empreint d’« ouverture » et de « bienveillance », comme pour une maman qui vient d’accoucher par exemple et « qui doit affronter son post-partum avec son bébé dans une coquille ».

On se voit mal lui dire : « On est désolé, tu es avec un mineur. »

Catherine D.Lapointe

Les deux collaborateurs visent un modèle « d’économie sociale », soutenu par des « valeurs féministes », une « gouvernance démocratique » et une « gestion transparente ». Ils aimeraient pouvoir offrir des conditions de travail dignes de ce nom, que l’on sait difficiles à trouver dans le milieu de la restauration.

« En vieillissant, si votre assurance est en mesure de prendre en charge des bas de contention ou une paire de chaussures de travail… illustre Catherine en riant. Vous êtes debout 10 heures par jour ! […] On sait que cela fait partie du jeu, mais faut-il que cela soit aussi rudimentaire sur certains aspects ? »

Le parallèle avec la condition des sportives professionnelles, encore à des années lumières de ce qui est proposé à leurs homologues masculins, revient naturellement dans la conversation. Entre autres parce que les deux entrepreneurs en face de nous ont fait du service leur carrière. Catherine D. Lapointe aura bientôt 25 anse année de travail dans ce domaine.

« Le Nadia est tombé naturellement sur quelque chose que j’avais envie de partager », raconte-t-elle.

Et les deux partenaires n’entendent pas seulement profiter de la montée en popularité du sport féminin : ils veulent aussi y contribuer, selon leurs moyens.

« Si on fait la promotion du sport féminin, on veut pouvoir redistribuer cet argent à travers les organismes et les athlètes », soumet Catherine D. Lapointe. […] C’est une roue qui tourne. »

 
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