Euro 2024 – L’Espagne est-elle vraiment la meilleure équipe de l’Euro ? – .

Les deux premières prestations de l’Espagne à l’Euro, contre la Croatie (3-0) puis l’Italie (1-0), ont rallumé la flamme en Espagne. Mais la déclaration de Luis de la Fuente suite au deuxième succès de la Roja dans cet Euro jeudi a complètement enflammé la presse espagnole : “Je continue de penser, comme avant de débuter la compétition, qu’il n’y a pas de sélection meilleure que nous.”

“On a dit dès la première journée, avant le début de l’Euro, qu’on voulait le gagner, qu’on allait se battre pour cet objectif, et maintenant on a vu après ces deux matches qu’on a le niveau pour le faire” , De son côté, a déclaré Alejandro Grimaldo dans un entretien à l’AFP. Un peu présomptueux, l’Espagnol ? Ou réaliste ? Alors que chaque équipe a disputé au moins deux matches, petit tour d’horizon.

C’est évidemment le premier réflexe : vérifier si, statistiquement, ce postulat tient. Il y a d’abord une évidence : la Roja a remporté ses deux premiers matches, comme seulement deux autres équipes (Allemagne et Portugal). Elle est aussi la seule, avec la France, à avoir gardé sa cage inviolée lors de ses deux premiers matches. Mais les autres données apportent plus de nuances.

Avant même son troisième match dimanche contre la Suisse, l’Allemagne avait marqué trois buts de plus (7) que l’Espagne. Le Portugal a également fait mieux, avec 5 réalisations. Avec 51,5% de possession moyenne, l’Espagne ne figure pas dans le top 10 de la compétition, et nettement derrière d’autres favoris comme l’Angleterre (53,5%), les Pays-Bas (53,5%), la France (53,5%), l’Italie (54,5%), Portugal (63%) et Allemagne (65,5%).

Avec 89% de passes réussies, la Roja se retrouve une nouvelle fois derrière de nombreuses sélections comme l’Allemagne (94%). En deux matches, elle a perdu 14 duels, soit deux fois plus que les Bleus. En nombre d’attaques (89), elle se situe également derrière la France (102), à des années-lumière de l’Allemagne (153 après son deuxième match), et même derrière l’Ukraine (97). Reste le classement des dribbles réussis, qu’elle domine (44).

Mais décortiquer tous ces chiffres ne sert à rien sans contexte. Celle d’une équipe placée dans le groupe dit B de la mort, qui a éteint une Croatie habituée aux sommets dans les grands tournois ces dernières années, et malmené une Italie, championne d’Europe en titre. Ce qu’on a vu dans le jeu était aussi très sérieux, parfois impressionnant dans le contrôle, notamment au milieu de terrain. Rodri est toujours une tour de contrôle, Fabian Ruiz se transfigure en sélection et Pedri s’amuse entre les lignes.

Surtout, la Roja varie désormais les plaisirs, entre possession et jeu direct, loin de la caricature qu’elle était lors de la Coupe du monde au Qatar, grâce notamment à ses flèches sur les côtés, Lamine Yamal et Nico Williams. Par rapport à d’autres sélections aux effectifs très riches, comme l’Angleterre, la France ou encore le Portugal, le rapport entre attentes et production est très intéressant. Et son équipe type est très clairement identifiée.

L’Espagne a donc répondu aux premières questions, et non des moindres, à ce sujet. De là à ne placer aucune équipe au-dessus, il y a un (grand) pas qu’on ne fera pas. Car l’Allemagne s’en sort au moins aussi bien jusqu’à présent, dans un groupe certes plus faible.

Car hormis la demi-finale atteinte il y a trois ans, la Roja court après de véritables références sur la scène internationale depuis son formidable triplé 2008-2010-2012. Parce qu’Unai Simon n’est pas encore gardien international, Alvaro Morata a ses limites devant, et une compétition est largement gagnée avec ces deux postes clés. Mais pour l’instant, les promesses sont là, et les premiers grands tests ont été concluants. Si l’on attend de voir s’ils sont vraiment la meilleure équipe de l’Euro, ils se sont au moins affirmés, de manière beaucoup plus franche, comme favoris.