une mère sans statut après un refus de permis de travail

une mère sans statut après un refus de permis de travail
une mère sans statut après un refus de permis de travail

Prise entre un refus de permis de travail et le nouveau durcissement de l’immigration temporaire, une mère célibataire française tente de régulariser son statut. Elle craint de devoir déraciner son jeune enfant même si tous deux ont retrouvé un nouveau souffle en arrivant au Québec.

Graphiste, Marie Karmowski arrive à Montréal en 2022 pour rejoindre un amoureux et trouver un emploi grâce à un permis vacances travail (PVT). La relation n’a finalement pas fonctionné, mais c’est le début d’une autre histoire d’amour : celle avec le Québec. « J’ai tout de suite trouvé les gens très sympathiques. Il y a même eu un malentendu culturel : quand je disais « merci » et qu’ils répondaient « bienvenue », je pensais qu’ils disaient « bienvenue au Québec » », rit-elle aujourd’hui.

De Versailles à Villeray et même passé la lune de miel des premiers mois, celle qui a aujourd’hui 33 ans dit ne pas vouloir renoncer au cadre de vie qu’on retrouve ici : « Je ne me suis jamais sentie aussi à l’aise qu’ici et je pense que c’est où mon fils peut s’épanouir. » Les gens, le quartier, la flexibilité dans l’éducation, Mmoi Karmowski énumère ce que la petite famille perdrait en abandonnant son projet de vie au Québec.

C’est aussi un organisme communautaire qui perd un employé fidèle et une province, une personne intégrée. Après une carrière dans le secteur privé, elle décide peu après son arrivée de « s’impliquer » dans un organisme communautaire, le Patro Villeray. « Je me suis dit : l’argent n’a pas d’importance quand on est payé de bien d’autres manières », explique-t-elle.

La gratification d’aider les citoyens, le soutien des collègues, l’envie de refaire du sport « pour la première fois depuis l’école », les valeurs ; il y avait de nombreuses raisons d’accepter une perte de salaire. Aujourd’hui, c’est ce salaire qui crée des obstacles administratifs en raison de la volonté des gouvernements de fermer certaines portes à l’immigration temporaire.

Arrêté en serrant

Marie Karmowski espérait pouvoir renouveler facilement son permis de travail, cette fois grâce au Programme des travailleurs étrangers temporaires. Cependant, le 24 septembre, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a refusé cette demande. «Je n’ai pas compris pourquoi», raconte la jeune femme.

La lettre de refus consultée par Devoir évoque des raisons générales, mais par mail, IRCC précise qu’il n’a pas « convaincu l’agent décisionnel qu’il possède les compétences académiques requises ». Elle occupe ce poste depuis près de deux ans, mais c’est aussi une preuve de scolarité qui aurait dû être présentée.

Lorsqu’elle reçoit cette lettre, son statut « expire » le jour même et si elle ne prend aucune mesure, elle doit quitter le Canada « immédiatement » écrit IRCC. «C’est vraiment violent», a-t-elle déclaré lors d’une interview.

Avec l’aide de son employeur, ils ont consulté un avocat moyennant des honoraires de plusieurs centaines de dollars. Toutefois, le récent resserrement du programme, annoncé tant par Québec que par Ottawa, est entré en vigueur seulement deux jours après le refus, soit le 26 septembre.

En effet, son salaire de graphiste dans la communauté est inférieur au salaire médian au Québec de 27,47 $ l’heure, la barre minimale utilisée par les deux paliers de gouvernement. Comme elle est à Montréal, elle n’a plus le droit de renouveler son permis de travail.

« Je ne pensais pas que cela pouvait avoir cette conséquence d’être moins payé, bien au contraire. La communauté ne pourrait-elle pas faire partie des exceptions ? » réfléchit-elle. Elle n’a jamais eu droit à l’assurance maladie du Québec ni à l’assurance-emploi, tout en payant des impôts, soutient-elle.

Elle était également à quelques mois d’avoir accumulé suffisamment de mois d’expérience pour se qualifier à la résidence permanente dans les programmes d’immigration économique du Québec.

Même si elle ne lâche rien, elle dit traverser de longs moments d’anxiété, voire de panique. Elle est désormais à la recherche d’un autre employeur et a envoyé une vingtaine de CV en moins d’une semaine.

Mais elle regrette son ancien métier : « Je fittais vraiment au Patro Villeray», dit-elle avec une expression très québécoise.

La date limite pour régulariser son statut est malheureusement fixée au 24 décembre. Si elle ne trouve pas de travail avant Noël, elle n’aura d’autre choix que de faire ses valises avec son fils de 8 ans. C’est ce qui la séduit le plus : « J’aimerais tellement qu’il puisse grandir ici. »

Il faut dire que le jeune garçon vient aussi de vivre l’épreuve de perdre l’année dernière en France son père, décédé à 35 ans des suites d’un cancer du cerveau. « C’est une série de mauvaises nouvelles et j’ai très peur des conséquences d’un nouveau déracinement », s’inquiète sa mère.

Elle le décrit comme un « enfant dynamique », qui a trouvé une maîtresse attentionnée qui l’a aidé à avancer. « En France, c’est « marcher ou mourir ». Personne ne vous encourage à progresser, on ne vous félicite pas si vous réussissez quelque chose », résume Marie Karmowski. Lorsqu’il a appris que leur statut n’était plus assuré au Québec, son fils a exprimé le souhait de préparer une « manifestation avec pancartes », raconte-t-elle.

Si rien ne marche, « pas question de rentrer en France », ajoute-t-elle : « En France, on est habitué au genre de discours contre l’immigration, et je me dis : «Waouh, c’est ça d’être du côté de gens dont on ne veut pas vraiment. Mais c’est trop important pour moi de rester. »

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