Emmanuel Macron juste avant de se rendre à son bureau de vote.
AFP
Au lendemain du succès de l’extrême droite au premier tour des élections législatives en France, la presse européenne a pointé lundi le cinglant « échec » du président français Emmanuel Macron, jugé responsable.
Les médias allemands sont particulièrement offensants, trois semaines après le séisme politique provoqué par Emmanuel Macron avec sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale au soir des élections européennes. Dimanche, le Rassemblement national (RN, extrême droite) et ses alliés sont arrivés en tête des votes.
« Coup de poker »
Le journal de gauche libérale « Süddeutsche Zeitung » dénonce le « coup de poker » de Macron qui « a ouvert la porte à l’extrême droite ». « Si les lepénistes arrivent au pouvoir, ce sera aussi son échec, sa faute », analyse le journal, car « son optimisme et son autoglorification entrent tellement en conflit avec le pessimisme des Français que beaucoup veulent simplement le voir partir ».
Pour «Die Welt» (conservateur-libéral), «cette élection enterre le macronisme» et un président qui a «fait le mauvais calcul» avec sa stratégie du «moi ou le chaos».
« Cela ferait plaisir à Moscou »
Le Frankfurter Allegemeine Zeitung (également conservateur-libéral) fustige la « réaction inconsidérée » du président français aux élections européennes. « Le pays se dirige vers la cohabitation, peut-être vers un blocage de son système politique. La France pourrait être absente de l’UE et de l’OTAN pendant des années. Cela ferait plaisir à Moscou », affirme le quotidien.
Au Royaume-Uni, les élections législatives françaises font la une de la plupart des quotidiens, qui n’ont pas ménagé leurs critiques à l’égard de l’exécutif.
Macron « humilié »
« La droite française humilie Macron », écrit en première page le Times. Un avis partagé par le tabloïd « Daily Mail », qui écrit que le chef de l’Etat français a « ouvert la porte à l’instabilité économique et politique ».
« Ce n’est pas seulement une crise pour la France. C’est une crise pour l’Union européenne, dont l’un des principaux membres fondateurs a un parlement, et peut-être un gouvernement, rempli d’eurosceptiques », poursuit le journal, fervent défenseur du Brexit en 2016.
De Gaulle à Vichy
En Italie, pays de la dirigeante d’extrême droite Giorgia Meloni, le premier tirage du « Corriere della Sera » est cinglant : « La droite française est passée hier des héritiers de De Gaulle à ceux de Vichy et de l’Algérie française, une France provinciale et rancunière qui s’est crue battue par l’Histoire. »
« L’Histoire dira si Macron fut l’homme qui a retardé cette inquiétante métamorphose ou celui qui a offert la France à la nouvelle droite », résume le journal.
Le quotidien de centre-gauche « La Repubblica » et le journal turinois « Stampa » notent néanmoins que « rien n’est encore fait », saluant les accords de retrait annoncés pour contrer le RN.
« Obscurité, isolement et xénophobie »
En Suisse, le «TagesAnzeiger» titre: «La vague Le Pen efface l’aura de pouvoir de Macron». Et de déplorer que « le pays des Lumières, des droits de l’homme et du cosmopolitisme dérive plus que jamais vers la droite – et peut-être vers l’obscurité, l’isolement et la xénophobie ».
« La démocratie française parle et elle fait peur », juge l’éditorial du « Temps ».
« Une dynamique qui a dépassé la France »
Enfin, de l’autre côté de la Méditerranée, un éditorial du quotidien libanais indépendant francophone « L’Orient-Le Jour » conclut que « la France n’est pas une île ». « Ce qui est en jeu s’inscrit essentiellement dans une dynamique qui le dépasse et qui pourrait se résumer ainsi : les démocraties sont en crise, les États-nations sont profondément fracturés, l’Occident vit dans des sentiments de déclin réels ou fantasmés.
Et « tout cela provoque naturellement des peurs, des angoisses et des replis identitaires dont le populisme d’extrême droite se nourrit comme aucun autre mouvement ».
(AFP)
