les effets insoupçonnés des « injections minceur »

les effets insoupçonnés des « injections minceur »
les effets insoupçonnés des « injections minceur »

Le détournement d’Ozempic, initialement un antidiabétique, pour perdre du poids a provoqué une rupture de stock. En Belgique, la mesure la réservant aux patients atteints de diabète de type 2 et d’obésité sévère est étendue. Derrière cette popularité se cachent des effets secondaires, parfois insoupçonnés.

Un médicament miracle pour perdre du poids ? Plusieurs médicaments, développés pour traiter le diabète, sont désormais utilisés dans le but de perdre du poids. En effet, le principe actif qu’ils contiennent imite l’action d’une hormone intestinale (GLP-1) qui agit sur le taux de sucre dans le sang et réduit l’appétit.

La demande mondiale pour ce type de produits est croissante et continue. En Belgique, la disponibilité d’Ozempic, médicament phare, est donc encore limitée et devrait le rester. au moins jusqu’en février 2025. Les mesures prises depuis l’automne dernier pour réserver l’injection aux patients souffrant de diabète de type 2 et d’obésité sévère ont donc été prolongé et sera réévalué en novembre.

Sémaglutide et liraglutide

Il existe deux catégories principales. Le le liraglutide, trouvé dans Saxenda, est une injection quotidienne unique à dose élevée et l’une des premières à être autorisée pour l’obésité. Le deuxième est le sémaglutide, avec des injections hebdomadaires. C’est le cas d’Ozempic, détourné en Belgique de son objectif antidiabétique, ou de Wegovy, qui n’est pas encore sur le marché belge. Avec une différence de prix notable : environ 100 euros par mois pour l’Ozempic, jusqu’à 1000 dollars par mois pour le Wegovy.

Qui dit médicament dit effets secondaires. Les symptômes gastro-intestinaux légers à modérément sévères sont les plus courants. « Principalement des troubles digestifs, surtout des nausées, et plus rarement des diarrhées et des vomissements », confirme Agnès Burniat, endocrinologue à l’hôpital Erasme. C’est aussi une des causes d’arrêt (environ 5%) du traitement. Les effets plus graves sont rares, certains affectant la vésicule biliaire, le pancréas et le foie.

Une prise en charge progressive

Aux États-Unis, des plaintes ont été déposées contre le fabricant de l’Ozempic, Novo Nordisk. Parmi les effets nocifs pointés du doigt, la gastroparésie, le fait que l’estomac se vide plus lentement. Rien d’étonnant, selon Agnès Burniat : « C’est l’un des mécanismes impliqués dans la perte de poids. Il y a a un ralentissement de la vidange gastrique qui est liée à l’effet du médicament. D’autant que le traitement se prend progressivement : « Les patients ne prendront jamais directement la dose maximale. D’abord les petits, pour vérifier qu’ils ne vomissent pas et qu’ils les tolèrent. Ensuite on travaille par gradation, si tout va bien. Les problèmes digestifs surviennent souvent au début, puis s’atténuent. Cela reste relativement limité

Selon Novo Nordisk, ces effets sont bien connus et documentés dans la notice. Mais chez une plaignante américaine, Ozempic, ainsi que son concurrent Mounjaro (du cabinet Eli Lylli), ont provoqué de violents vomissements et des douleurs qui l’ont conduite à l’hôpital. D’autres poursuites ont été intentées contre les deux sociétés, accusées d’avoir minimisé ou omis des effets tels que la paralysie de l’estomac ou l’occlusion intestinale. Les entreprises, ainsi que les autorités sanitaires, tirent également la sonnette d’alarme concernant les « faux » stylos injecteurs. Ces versions non approuvéesqui circulent sur Internet, peuvent provoquer des effets bien plus graves.

Pas pour tout le monde

Des chercheurs de l’Université de Colombie-Britannique (Canada) confirment le risque accru de problèmes gastro-intestinaux. Selon l’étude, les patients avaient neuf fois plus risque de développer une pancréatite et plus de quatre fois le risque de souffrir d’une occlusion intestinale. Pour la gastroparésie, le risque était plus de trois fois plus élevé.

Des résultats qui démontrent la nécessité de prescrire ces médicaments à ceux qui en tirent un réel bénéficeavec obésité ou excès de poids avec comorbidités (hypertension, diabète, etc.). Et pas à ceux qui veulent juste perdre quelques kilos. « Nous avons dévié vers une prescription pour tout le monde, y compris pour ceux qui ont un léger excès de poids. Le côté facile attire : on se pique, et on n’a plus besoin de faire d’effort. L’effet est aussi cérébral : les gens ont moins envie de manger et sont moins attirés par les aliments riches en calories. Et donc il y a moins de frustration. » Les études ont en outre été combinées avec un régime alimentaire et une activité sportive régulière.

Pensées suicidaires, une question non résolue

Certains effets potentiels soulèvent des questions. Après plusieurs rapports, l’Agence européenne des médicaments (EMA) étudie un lien possible entre la prise d’Ozempic et le développement de pensées suicidaires et d’automutilation. « Nous savons qu’il existe un effet au niveau cérébral, que cela peut agir sur le système de récompense”, explique l’endocrinologue. « Il faut être vigilant. D’autant que d’autres médicaments utilisés pour perdre du poids ont été retirés du marché en raison de problèmes psychiatriques.

Il est difficile d’établir un lien formel entre les deux, alors qu’environ 10 % de la population éprouve des pensées suicidaires passagères. « Vous devez suivre les instructions et assurer un suivi médical

Illustration d’un récepteur GLP-1 inactivé entouré de molécules de sémaglutide. © Getty Images/Science Photo Balance

Le « visage Ozempic », pas un phénomène nouveau

L’aspect esthétique peut aussi être surprenant. Sur TikTok, on pointe le « visage Ozempic », le « visage Ozempic », avec des visages évidés pour le soutenir. Il en va de même pour les fesses (« fesses Ozempic ») et les seins (« seins Ozempic »). Si le phénomène est devenu viral, il n’est ni nouveau ni spécifique à un médicament, mais simplement la cause d’une perte de poids rapide. Car même si la peau possède des propriétés élastiques, elle a besoin de temps pour retrouver sa forme.

L’endocrinologue confirme, mais précise qu’en général, perdre dix kilos en un mois sous Ozempic, ” ce n’est pas la majorité « . Le Wegovy et le Mounjaro causent encore plus de pertes. Si ces traitements révolutionnent la prise en charge de l’obésité, il faut rester vigilant sur leurs effets à long terme et le coût d’un traitement potentiellement « à vie ».

Effets bénéfiques

Le sémaglutide semble également avoir un effet bénéfique, bien que limité, sur les risques de crise cardiaque et d’accident vasculaire cérébral. Le Wegovy, approuvé pour la perte de poids aux États-Unis, y est également autorisé pour réduire les risques cardiaques chez les personnes obèses atteintes de maladies cardiovasculaires. « Ces molécules sont vraiment intéressantes, réagit Agnès Burniat. Il réduit aussi la stéatose hépatique et le foie gras. Il ne s’agit pas seulement d’une perte de poids et d’une amélioration de la glycémie. »

Marché parallèle : de gros risques pour le patient

Pour faire face à la pénurie d’Ozempic, de nouvelles règles limitant la prescription du médicament ont été introduites fin 2023 dans un arrêté royal. Les médecins devaient réserver les analogues du GLP-1 aux patients diabétiques de type 2 et aux patients souffrant d’obésité sévèreou dont l’IMC est supérieur ou égal à 35 ou 30 mais accompagné de comorbidités liées au poids. Une mesure qui a été prolongée en juin 2024, la disponibilité du médicament en Belgique étant encore limitée.

Ciblés : Ozempic bien sûr, mais aussi Rybelsus, Victoza, Trulicity et Bydureon. Les patients souffrant d’obésité mais qui n’ont jamais été traités avec des analogues du GLP-1 ne peuvent se faire délivrer le médicament que par un endocrinologue, au moins pour la première prescription.

Une mesure que l’Association belge des syndicats médicaux (ABSyM) a très vite qualifiée de contraire à la liberté thérapeutique. Qu’ils soient ou non d’accord avec ces nouvelles directives, les médecins généralistes, tout comme les endocrinologues, sont tenus de s’y conformer.

Mais qui garantit que c’est bien le cas ? Des contrôles sont effectués par l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) auprès des médecins, le SPF Santé publique. Ce qui est délivré en pharmacie est soumis à un inventaire basé sur un calendrier annuelsauf si une plainte a été déposée ou si des mesures spécifiques ont été prises. « Mais l’AFMPS n’est pas compétente pour vérifier en pharmacie si le patient est éligible pour recevoir Ozempic », précise l’organisme au VIF. À ce jour, l’AFMPS n’a été informée d’aucune irrégularité dans la livraison de ce médicament très populaire. En revanche, elle a été contactée par des patients qui devaient être traités par Ozempic et qui n’ont pas pu l’obtenir.

Pour l’instant, aucune réflexion n’a été menée sur la possibilité de prescrire Ozempic à un public plus large si la pénurie venait à disparaître. « Toutefois, précise l’AFMPS, des indications pourront être formellement ajoutées à l’autorisation de mise sur le marché et à la notice, après approbation par les autorités compétentes concernées. D’ici là, en cas de prescription en dehors des indications autorisées, le médecin reste responsable de cette utilisation hors AMM».

Outre les soucis d’approvisionnement qui compliquent la vie des diabétiques, un autre problème inquiète les professionnels de santé : la vente de fausses injections. Les personnes qui souhaitent perdre quelques centimètres mais qui ne répondent pas aux critères médicaux, et qui se sont heurtées à un refus légitime de leur médecin, tentent d’obtenir le médicament par des voies indirectes. Or, ces contrefaçons, en plus de ne garantir aucune efficacité, peuvent être dangereuses pour la santé. Selon Novo Nordisk, la société qui produit Ozempic, une Belge est tombée dans le coma diabétique après s’être injectée une dose contenant cinq fois plus d’insuline que la dose recommandée. En octobre 2023 déjà, plusieurs personnes avaient été hospitalisées en Autriche pour les mêmes raisons.

L’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé met régulièrement la main sur des colis postaux contenant des injections importées illégalement, dont certains sont en réalité de faux médicaments. « Commander des médicaments falsifiés sur Internet, par d’autres canaux que les pharmacies agréées en Europe, met en danger la santé du patient. Il n’y a pas aucune garantie que le produit soit fabriqué de manière conformee, ni quant à sa composition, ni quant à sa posologie», prévient l’AFMPS. L’Agence dispose d’un service spécifique, une unité spéciale d’enquête qui, les douanes, la police, le SPF Economie et les autorités d’autres pays, lutte contre les pratiques pharmaceutiques illicites.

Ludivine Ponciau

 
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