Voici pourquoi l’enquête sur le vol de données chez Desjardins a duré 5 ans

Voici pourquoi l’enquête sur le vol de données chez Desjardins a duré 5 ans
Voici pourquoi l’enquête sur le vol de données chez Desjardins a duré 5 ans

Sébastien Boulanger-Dorval, arrêté jeudi pour vol de données personnelles des clients de Desjardins, a admis le 27 mai 2019 à ses patrons avoir vendu des informations confidentielles. Lors d’une réunion avec sa hiérarchie, il a expliqué qu’il vendait des données « depuis 15 mois à raison d’environ une vente tous les deux à trois mois », apprend-on dans les documents d’enquête policière que nous avons consultés. À ce moment-là, Desjardins venait de saisir son ordinateur, son téléphone cellulaire, un disque dur et plusieurs clés USB.

Pourquoi a-t-on dû attendre plus de 5 ans avant qu’il soit menotté ? Notre Bureau d’enquête vous emmène dans les coulisses de l’enquête.

Des mots de passe difficiles à déchiffrer

La police a eu de grandes difficultés à accéder au matériel informatique saisi, ce qui démontre la complexité croissante des enquêtes pour fraude.

Par exemple, entre 2019 et 2021, la SQ a mis la main sur près de 120 « articles informatiques », dont des disques durs, des clés USB, des ordinateurs et des téléphones.

Mais ce n’est qu’en mai 2022, grâce à « l’amélioration des équipements appartenant à la division technologique de la SQ », que deux d’entre eux ont pu être débloqués afin que les enquêteurs puissent accéder au contenu, lit-on. dans un affidavit daté de juin 2023 signé par Catherine Gohier, l’enquêteuse principale du dossier.

Plus frustrant encore, aux dernières nouvelles, la police n’était toujours pas parvenue à retirer trois objets saisis.

“[Les mots de passe] sont généralement constitués de combinaisons aléatoires de chiffres et de lettres (majuscules et minuscules) de plusieurs caractères, ce qui complique leurs découvertes », écrit le sergent enquêteur Gohier.

  • Écoutez l’interview de l’expert en cybersécurité Steve Waterhouse via QUB :

Collaboration difficile avec Desjardins

Au début de l’enquête, les policiers ont déploré à plusieurs reprises le manque de collaboration de Desjardins, qui les aurait privés d’accès à certains éléments de preuve.

Dès mai 2019, un sergent-détective de la police de Laval qui avait obtenu des informations suggérant que Sébastien Boulanger-Dorval était responsable des fuites aurait conseillé à l’établissement de ne prendre aucune mesure à l’égard de son employé, afin de ne pas l’alerter. et ainsi éviter qu’une partie des preuves soit potentiellement détruite.

Malgré cela, Desjardins a procédé à ses propres perquisitions et saisies de documents et a même rencontré Boulanger-Dorval sans en avertir la police.

En février 2021, une source parlait à notre Bureau d’enquête du « fort climat de méfiance entre Desjardins et la police ».

Desjardins avait alors assuré qu’elle ne souhaitait pas nuire aux efforts des policiers, et nos informations suggèrent que la suite de l’enquête s’est déroulée plus harmonieusement.

Jeudi, en entrevue à LCN, le lieutenant Benoît Richard de la SQ a parlé plutôt de « certains intérêts corporatifs différents des nôtres » en référence à Desjardins.

Privilège avocat-client

C’est fondamental en droit canadien; les enquêteurs ne doivent pas accéder aux discussions entre les suspects et leurs avocats, qui sont confidentielles en vertu du secret professionnel de l’avocat.

Cela a considérablement ralenti l’enquête, dans un contexte où les nombreux ordinateurs, téléphones et emails saisis pourraient contenir ce type de conversations.

Ce n’est qu’en juillet 2021, soit deux ans après l’ouverture de l’enquête de la SQ, qu’un protocole visant à isoler les conversations privilégiées a été entériné par un juge.

« Entre le 17 février 2021 et le 17 février 2022, il y a eu 18 auditions pour suivre l’avancée du protocole (…). Le protocole (…) a été conclu le 14 avril 2023 après 19 mois de procédures et 27 audiences judiciaires », décrit Catherine Gohier.

Crypto-monnaie

Selon l’enquêteur principal, suivre l’argent échangé entre suspects ou obtenu illégalement grâce à un vol d’identité n’a pas été facile.

« Les sujets visés par l’enquête utilisent des cryptomonnaies pour échanger de l’argent entre eux, ce qui complique l’analyse des transactions financières liées à l’enquête », précise-t-elle.

La pandémie

La Sûreté du Québec blâme également la COVID-19 pour expliquer la durée de l’enquête.

« Plusieurs enquêteurs ont vécu avec les conséquences de la pandémie. Cela se répercutait sur leur disponibilité, puisqu’ils étaient restreints par des règles sanitaires strictes suite à l’apparition de symptômes, soit personnels, soit d’un membre de leur famille, les empêchant d’être aussi efficaces dans leurs tâches quotidiennes. -dans l’affidavit de la SQ.

Aussi, « à plusieurs reprises, des réunions de témoins ont dû être reportées en raison des symptômes du COVID-19 ».

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