Protocoles d’examen similaires, plans de communication presque identiques… Santé Québec contribuera à réduire les « dédoublements » dans le réseau en appliquant partout les meilleures pratiques, promet sa présidente-directrice générale, Geneviève Biron.
Le patron de Santé Québec n’aime pas entendre que l’agence est « une autre structure ». “Ce n’est pas une structure de plus, c’est 30 structures que nous supprimons”, a-t-elle résumé lors d’un entretien avec Devoir Mardi, après un silence médiatique de plusieurs mois.
Ces « 30 structures » sont les centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS), des établissements qui aujourd’hui « fonctionnent individuellement », mais qui se retrouveront dans la même « équipe », Santé Québec.
« Le plus gros levier dont nous disposons est de pouvoir rassembler les meilleures pratiques d’un seul endroit, puis [les implanter partout]. C’est très différent d’avant. »
La nouvelle agence sera entièrement lancée le 1erest décembre prochain. Mais Mmoi Biron est en poste depuis avril. Au cours des derniers mois, elle a constitué son équipe, fait le tour du réseau et identifié les éléments à repenser.
Éliminer les doublons
Comme des « duplications ». « Nous reproduisons, d’un établissement à l’autre, les mêmes protocoles, les mêmes outils, les mêmes brochures. Nous doublons», a-t-elle noté. « Les protocoles d’examen ne sont pas très différents d’un établissement à l’autre, mais on les duplique car ce sont toutes des équipes différentes. […] Le 1est Décembre, nous allons pouvoir mettre des choses en commun. »
Est-ce à dire que nous allons imposer partout le même modèle ? M.moi Biron n’aime pas le choix du verbe. Elle aura la même réaction face au verbe « forcer » plus tard dans l’entretien.
Et qu’en est-il de ceux dont la tâche est de produire les protocoles et les brochures que l’on ne veut plus dupliquer ? Vont-ils faire autre chose dans la même position ? Celui qui dirigera bientôt les activités quotidiennes de l’ensemble du réseau affirme qu’il est « trop tôt pour en parler ».
Sur le terrain, elle dit ressentir beaucoup « d’ouverture » au changement de la part du personnel du réseau. Mais elle ajoute qu’elle est prudente “tout de même”. « J’ai encore une petite inquiétude. Nous sommes tous prêts à changer, mais pas dans notre propre cour, donc je m’attends à rencontrer un peu de résistance. »
«Beaucoup de capitaines sur la glace»
Lorsqu’on lui demande ce qui l’a le plus « surprise » sur le réseau ces derniers mois, elle répond avoir été surprise par le nombre de personnes donnant des ordres. « Il y a beaucoup de capitaines sur la glace. Cela m’a surpris car dans une organisation, normalement, c’est clair, [d’]là où arrivent les commandes», a expliqué l’ancien patron de Biron Groupe Santé, spécialisé dans certains services de médecine privée.
“Il y a des gens au ministère, dans les cabinets, il y a les ministres, les PDG [des CISSS]. […] On a les directeurs nationaux de certains programmes… » Dans le système actuel, explique-t-elle, ça fait beaucoup de gens qui demandent à d’autres de développer ceci ou cela, et pour les PDG des CISSS, ça génère « de la confusion ».
Cependant, à partir du 1est En décembre, normalement, les directives devraient toutes venir de chez elle.
Un plan d’action chirurgical
Une chose est sûre, il y aura des changements au niveau de la chirurgie. Actuellement, plus de 10 000 Québécois attendent une intervention depuis plus d’un an. La semaine dernière, le ministre de la Santé, Christian Dubé, a déclaré que la priorité de l’agence serait de réduire les délais.
Une injonction que Mmoi Biron ne conteste pas. « Cela m’a quand même étonné de voir que nous avons actuellement 188 salles d’opération fermées. Je pense que nous pouvons vraiment faire quelque chose pour utiliser davantage nos installations. »
Le vice-président exécutif de l’agence, Frédéric Abergel, est sur le dossier, explique-t-elle. Il a mis en place une équipe d’experts qui effectuent des « visites de terrain » et qui « se rassemblent » en vue de présenter un plan d’action dans les semaines à venir. Ils envisagent entre autres de revoir la méthode de planification des horaires.
M.moi Biron s’intéresse également beaucoup au suivi des patients après les opérations. Elle l’a mentionné à deux reprises au cours de l’entretien. Elle veut « s’assurer que nous puissions accompagner les patients après leur opération pour éviter qu’ils ne se retrouvent aux urgences ». Cela passera par le médecin de famille, le groupe de médecins ou le professionnel qui leur est associé conformément au nouveau schéma du ministre pour la première ligne.
Moins de dispersion
Plus généralement, Geneviève Biron a constaté, au cours des derniers mois, qu’il y avait beaucoup « d’éparpillement dans le réseau » et que beaucoup de choses se faisaient au détriment des missions prioritaires du réseau. «Je pense que nous devons vraiment nous assurer que nous livrons l’essence de notre réseau», dit-elle.
« Le constat est que, depuis dix ans, le budget de la santé a augmenté de 50 % et la population, de 10 %. Collectivement, nous avons beaucoup donné au secteur de la santé. Ce que j’espère, c’est qu’avec l’argent dont nous disposons, nous pourrons au moins faire mieux et donner des résultats à la population. »
Le chef de Santé Québec ne souhaite toutefois pas commenter des cibles précises ni un échéancier. Mais son « grand objectif » n’est pas moins ambitieux : que les gens aient à nouveau confiance dans le réseau de la santé. « J’aimerais qu’on tourne la page du passé. » A suivre le 1est Décembre.