Le juge d’instruction sur le grill du procès pour viol de Mazan

Le juge d’instruction sur le grill du procès pour viol de Mazan
Le juge d’instruction sur le grill du procès pour viol de Mazan

Les avocats de Gisèle Pelicot, centre, ont demandé à la juge d’instruction pourquoi elle n’avait pas approfondi l’enquête sur un éventuel viol de la fille du couple.

AFP

L’enquête sur les viols de Mazan a-t-elle été exhaustive ? Était-ce seulement dépendant ? Le juge d’instruction de cette affaire tentaculaire a été longuement interrogé vendredi, les avocats de la défense évoquant d’éventuelles défaillances.

« Sur une affaire de cette ampleur, on peut facilement faire 10 ans d’enquête. Nous avons voulu être pragmatiques et efficaces pour que M. Pelicot puisse être jugé dans un délai raisonnable”, a répondu Gwenola Journot immédiatement devant le tribunal correctionnel du Vaucluse.

Appelée à témoigner par une avocate de la défense, Me Isabelle Crépin-Dehaene, qui depuis le début du procès a parfois provoqué la colère des parties civiles et notamment de Gisèle Pelicot pour ses questions laissant ouverte la possibilité d’une complicité de sa part, la La magistrate a expliqué calmement les choix de son enquête.

Une commande de 370 pages

Ouvert en novembre 2020, il a été fermé en juin 2023 : résumant 31 volumes d’enquête, l’arrêt de mise en examen de 370 pages renvoie en justice 51 hommes : Dominique Pélicot, le mari, qualifié de « chef d’orchestre », et ses 50 coaccusés. qu’il avait recruté sur internet pour venir violer sa femme chez eux à Mazan après l’avoir droguée avec des anxiolytiques.

La tension est montée crescendo vendredi matin à Avignon, avec la volée de questions de Me Crépin-Dehaene, avocat de deux coaccusés. Qu’en est-il de la thèse selon laquelle les accusés auraient également été drogués à leur insu par Dominique Pélicot, comme certains l’avancent ?

« Je ne me souviens pas d’y avoir réfléchi, car aucun des prévenus n’apparaît sous sédation sur les vidéos », rétorque le magistrat. Soulevé sur ce point, le juge assure que selon l’un des accusés lui-même, “cette thèse lui avait été conseillée par un autre mis en examen”.

« Pourquoi a-t-il fallu 18 mois pour utiliser les données du site ? Coco.fr?», où Dominique Pélicot avait rencontré les futurs agresseurs de son épouse, répond l’avocat. «C’est un grand regret. J’ai fait moi-même une réquisition par courrier recommandé et je n’ai jamais eu de réponse du site”, regrette le magistrat.

Pourquoi le troisième téléphone de Dominique Pelicot n’a-t-il pas été exploité ? «Je ne me souviens pas du numéro de téléphone de M. Pelicot», répond le juge.

“Pourquoi ne pas utiliser la ligne téléphonique de Madame?” insiste alors Me Crépin-Dehaene. “Je n’en voyais pas l’intérêt”, a rétorqué le magistrat, se demandant si l’avocat n’était pas encore “dans la thèse de la complicité de Gisèle Pélicot”. « Je ne suis favorable à rien du tout. Je n’ai aucune accusation contre qui que ce soit », se défend l’avocat.

Une autre avocate, Me Caroline Beveraggi, conseil d’un accusé, se demande pourquoi le médecin qui a délivré tant d’anxiolytiques à Dominique Pelicot pendant une décennie n’a pas été entendu. « Il aurait refusé de répondre : on ne peut pas forcer quelqu’un à parler. Et ce n’est pas l’objet de cette affaire », précise le juge.

“Quand tu regardes les vidéos, c’est un viol”

Pourquoi, au cours de l’enquête, avez-vous « utilisé le terme de viol » avec les accusés, ce qui aurait pu les influencer, reproche alors Me Emile-Henri Biscarrat, conseil de deux accusés ? « Quand on regarde les vidéos, objectivement, c’est un viol. Après, ça ne veut pas dire au stade de l’enquête qu’ils sont des violeurs”, répond Gwenola Journot.

Me Antoine Camus, l’un des avocats de Gisèle Pelicot, s’est demandé pourquoi l’enquête n’avait pas tenté d’approfondir les investigations sur les éventuelles agressions subies par Caroline Darian, la fille de Gisèle Pelicot. Des photomontages d’elle, nue et endormie, ont en effet été retrouvés dans les fichiers informatiques de son père et la quadragénaire se demande encore si elle n’aurait pas elle aussi été violée par celui qu’elle appelle désormais son « père ».

«On sait qu’elle a fait l’objet d’images impudiques. Sur les deux photos endormies, nous n’avons pas eu d’explication de la part de M. Pelicot. C’est le seul point où nous n’avons pas eu d’explication. Cela a été catégoriquement refusé», explique le juge. Des démentis que Dominique Pelicot maintient depuis le début du procès le 2 septembre.

Violeurs non identifiés

Son collègue Stéphane Babonneau a enfin évoqué ces hommes filmés par Dominique Pelicot, mais non identifiés par les enquêteurs. Ils seraient entre dix et vingt. N’avez-vous pas « un goût d’inachevé », demande-t-il au juge ?

« À un moment donné, en concertation avec la police judiciaire, nous avons décidé d’arrêter les investigations. Nous avons certaines personnes que nous avons vues très floues et que nous n’avons pas pu prendre en photo”, explique Gwenola Journot : “Oui, il y a de la frustration, mais nous pensons quand même avoir fait le maximum.”

(AFP)

 
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