« Sans décision politique, la risque le déclin économique »

« Sans décision politique, la risque le déclin économique »
« Sans décision politique, la France risque le déclin économique »

« Rarmement démographique. » En janvier 2024, le président de la République Emmanuel Macron évoquait pour la première fois son concept nataliste, dans la foulée de la publication des chiffres démographiques français en 2023 par l’Insee. L’indicateur synthétique de fécondité s’établissait alors à 1,68 enfant par femme.

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Mardi 14 janvier, l’Insee a publié ses chiffres démographiques français en 2024 et, sans surprise, la fécondité a encore baissé, atteignant 1,62 enfant par femme. Un chiffre au plus bas depuis la fin de la Première Guerre mondiale. Par ailleurs, le nombre de naissances se contracte (– 2,2 %), la mortalité augmente (+ 1,1 %) et la population vieillit (21,8 % des habitants ont au moins 65 ans, contre 16,3 % en 2005).

Une évolution démographique qui pourrait avoir de graves conséquences sur l’avenir du pays s’il continue sur cette voie. « Des incertitudes demeurent. Cette baisse de la fécondité va-t-elle se poursuivre ou va-t-elle s’arrêter ? Une chose est sûre : les femmes des jeunes générations ont des enfants de plus en plus tard », assure Gilles Pison, démographe et conseiller à la direction de l’Institut national d’études démographiques (INED).

Une probable diminution de la population active, non sans conséquences

Alain Villemeur est docteur en économie, ingénieur de l’École centrale de Paris et directeur scientifique de la chaire universitaire Transitions démographiques, transitions économiques (TDTE). S’exprimant sous la houlette de Kevin Genna, économiste et responsable de la modélisation à la chaire, Alain Villemeur l’assure : « Pour nous, il est évident que si aucune décision politique n’est prise, la risque un déclin économique. Il faut retrouver cette natalité, sinon nous sommes condamnés à un ralentissement de la croissance économique, une baisse du pouvoir d’achat, une baisse des retraites… Ce débat est vital. Si notre taux de fécondité se rapprochait de celui de l’Italie (1,2 en 2024) ou du Japon (1,2 en 2024), la stagnation économique serait assurée comme dans ces pays, sans oublier le découragement de la jeunesse, avec 2 millions de jeunes qui ont quitté l’Italie depuis le années 2000.

A LIRE AUSSI « Le déclin démographique français n’est pas une fatalité » Pour les deux économistes, le danger qui pèse sur la France est grand. D’autant que les chiffres de fécondité des moins de 34 ans continuent de baisser, “ce qui n’est pas rassurant” selon Alain Villemeur. Au sein de la chaire universitaire, trois scénarios d’évolution de la démographie française sont étudiés : le premier – « déjà un peu dépassé », confesse Kevin Genna – imagine une France avec un indicateur de fécondité actuel stable à 1, 68, comme en 2023 ; la seconde fait suite à une baisse continue de la fécondité de 1,68 à 1,3 en 2035 ; la troisième étudie la hausse du taux de fécondité à 2,05, comme en 2010. « Mais quel que soit le scénario, la population active devrait diminuer à partir de 2035-2040 », soutient Kevin Genna.

Une possibilité confirmée par Gilles Pison, auteur deAtlas de la population mondiale (Editions Autres) : « A court terme, la population active ne diminuera pas, contrairement à un certain nombre de nos voisins européens. Mais à plus long terme, si les naissances continuent de baisser, oui, la population active pourrait diminuer, si cette baisse n’est pas compensée par le solde migratoire. » Et cette baisse de la population active signifie, selon la présidence du TDTE, un ralentissement de la croissance économique.

« En 2035-2040, la croissance ne devrait pas dépasser 1% »

« Quantifier le futur ralentissement du PIB est très compliqué. En estimant que les gains de productivité continuent d’augmenter de 0,8% par an, sans changement majeur, la croissance pourrait rester positive mais ne devrait pas dépasser 1% » vers 2035-2040, selon Kevin Genna. Des chiffres à prendre avec des pincettes, car « nous ne sommes pas à l’abri d’un choc technologique par exemple », précise ce dernier. Pour mémoire, en 2023 et 2024 (selon les prévisions de Bercy), la croissance annuelle du PIB était de 0,9% et 1%.

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A LIRE AUSSI Congé de naissance : les pères en profiteront-ils vraiment ? Et l’une des premières conséquences de la baisse du nombre d’actifs et de la possible faible croissance économique d’ici une dizaine d’années est la mise à mal du système de retraite, selon Alain Villemeur. « Les retraites sont une question clé », dit-il. Pour le docteur en économie, le risque est une baisse significative du niveau des retraites des retraités. «C’est une remise en cause totale du système social français», soutient Alain Villemeur.

L’emploi des seniors et des jeunes est-il au cœur de la problématique ?

Ainsi, si le taux de fécondité ne rebondit pas, le solde migratoire reste stable, comme l’espérance de vie, selon la chaire universitaire Transitions démographiques, transitions économiques (TDTE), pour sauvegarder notre système social français, pas d’autre choix que de travailler davantage.

“La question, selon nous, n’est pas tant l’âge légal de la retraite, mais plutôt le taux d’emploi des seniors et des jeunes”, estime Alain Villemeur. Vous avez près de 2 millions de seniors qui pourraient travailler plus longtemps, comme dans tous les pays voisins, et du côté des jeunes, nous avons aujourd’hui en France, environ 1,5 million de personnes de moins de 29 ans qui n’ont pas d’emploi, ni d’études, ni de formation. » Cela représente près de 3,5 millions de personnes supplémentaires qui pourraient contribuer.

A LIRE AUSSI Pourquoi faut-il augmenter le taux d’emploi des seniors ? Les experts se tournent vers l’Allemagne comme pays de comparaison. Outre-Rhin, chez nos voisins allemands, le taux d’emploi des 55-64 ans est passé de 64% à 73% entre 2013 et 2022, contre 56,9% en 2022 en France. Du côté des jeunes, le taux de chômage des moins de 25 ans était de 17,7% en septembre 2024 en France, contre 6,9% en Allemagne. “Si nous avions des taux d’emploi allemands des seniors et des jeunes, une bonne partie des déficits français disparaîtraient”, ajoute Alain Villemeur.

Moyens d’augmenter le taux de natalité

La France peut encore compter sur son solde migratoire (différence entre le nombre de personnes entrées sur le territoire et le nombre de personnes qui en sont sorties) estimé à +152 000 personnes en 2024, pour éviter de voir sa population active se contracter encore davantage dans les années à venir, avec le scénario de solde naturel négatif – plus de décès que de naissances en un an – se rapproche.

Autres conséquences économiques à court terme de la baisse de la natalité : une réduction de certaines activités économiques et des dépenses d’éducation par exemple. « Les enfants qui naissent sont des parents qui achètent une voiture, une maison plus grande, etc. », explique Alain Villemeur.

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Mais alors que faire pour éviter cette stagnation économique ? Pour les économistes de la chaire TDTE, il faut relancer la natalité « pour éviter le piège de la stagnation économique ». Selon eux, il faut mener des politiques plus natalistes, en favorisant l’accès au logement des jeunes ménages (les moins de 30 ans ont perdu 18 mètres carrés de pouvoir d’achat en vingt ans, selon une étude de Meilleurs Agents), en aidant à s’installer moins services de garde d’enfants coûteux et travailler sur l’égalité des sexes.

Gilles Pison insiste également sur ce dernier point : « Aujourd’hui, les mères ne veulent plus mettre leur carrière entre parenthèses pendant que les pères continuent de travailler et elles ne veulent plus d’un partage inégal des tâches ménagères. Il faut donc réduire les inégalités, que ce soit au travail ou à la maison, et faire en sorte que les pères s’occupent davantage des enfants. »

 
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