Jonathan Morin comparaît depuis vendredi 24 janvier devant la cour d’assises de l’Aude pour la noyade à la Berre à Portel-des-Corbières d’une jeune femme de 25 ans, Gabrielle Desprez en juin 2021.
Le corps d’une jeune femme avait été retrouvé dans un point d’eau de la rivière La Berre, à Portel-les-Corbières, le 8 juin 2021 par une baignosa. Il s’agissait d’une jeune femme, Gabrielle Desprez, 25 ans, habitant Narbonne, reconnue handicapée mentale à 75 % et placée sous tutelle. Au cours d’une enquête très rapide, basée sur des investigations téléphoniques, vidéosurveillance et bancaires, les gendarmes de la brigade de recherche de Narbonne ont interpellé Jonathan Morin le 30 juin.
Il fait disparaître le corps à Berre et utilise à 3 reprises la carte bancaire de sa victime
Lors de son audition, Jonathan Morin a expliqué avoir pris Gabrielle en stop trois semaines plus tôt et avoir eu un coup de foudre. Il s’était alors installé avec elle, ajoutant que la nature de leur relation était « Basé sur le sexe ». Puis, selon lui, leur relation s’était dégradée et il l’avait quittée, avant de revenir, sur l’insistance de la jeune femme. Il l’avait emmenée au bord de la Berre, “Pour passer un bon moment »mais là, dit Jonathan, Gabrielle ne cessait de parler de son ex-ami, ce qui l’avait mise hors de lui. Jonathan se souvint d’avoir posé sa main sur la tête de Gabrielle et appuyée, maintenant dans l’eau. Pour faire disparaître le corps, il remplit de pierres le sac Gabrielle, le passa au bras de la jeune femme, utilisant les anses du maillot de bain pour attacher le tout. Par la suite, il a retiré de l’argent à 37 reprises avec la carte bancaire volée à sa victime. Il a admis aux enquêteurs avoir également utilisé la carte pour personnes handicapées de Gabrielle pour se garer plus facilement. Il a reconnu que s’il ne s’était pas rendu, c’est parce que « Qu’il ne voulait pas prendre Perpet ».
Mais face au juge d’instruction, Jonathan s’est dit pour la première fois être « habité ». Il affirme que ce n’est pas lui, mais un personnage imaginaire qu’il habite en lui, une femme, Johanna, qui a eu un coup de foudre pour Gabrielle, et que c’est « le monstre » qui avait noyé la jeune femelle. Il a expliqué que plusieurs identités vivaient dans son cerveau.
Lors de cette audience de la cour d’assises, ce vendredi 24 janvier, présidée par François-Marie Cornu, il s’agit d’un homme détenu depuis le 1est Juillet 2021 qui se tient dans le box des accusés. De taille moyenne, il est corpulent, sa tête est rasée sur les côtés et à l’arrière, ne laissant sur le crâne qu’une mèche de cheveux terminée par une fine queue de cheval. Les experts qui se sont succédé à la barre ont décrit un parcours de vie complexe, une enfance perturbée, sa mère qui n’avait que 18 ans lorsqu’elle lui a donné naissance. L’enquêteur de personnalité explique que ce dernier lui aurait dit que « Le père avait couché avec la grand-mère maternelle, ce qui avait provoqué une rupture entre les deux femmes, et la grand-mère aurait pris l’enfant. La mère aurait tenté de le tuer, alors qu’il n’était qu’un bébé ».
Il a été élevé par sa grand-mère, puis placé dans un foyer à l’âge de 7 ans, où il est malheureux et se dit harcelé. C’est à cette époque, dira-t-il plus tard, que les différentes personnalités se côtoient dans sa tête. A la barre, il dit fumer depuis l’âge de 6 ans. Sa scolarité a été chaotique, placé en apprentissage, il n’a jamais eu son cursus. Il était sans profession au moment des faits, ayant mené une vie d’errance, hébergé à droite et à gauche chez différents membres de sa famille.
-Il n’y a aucune altération du discernement
“Sa première identité apparaît comme celle d’un pyromane au collège, lorsqu’il met le feu aux toilettesnote à la barre le docteur Pecastaing, expert psychiatre. Il consomme du cannabis, ce qui lui permet d’être dans sa bulle ». Jonathan a dit au psychiatre qu’il s’était protitré avec des femmes plus âgées. Il a eu un fils avec une compagne qui l’a quitté et n’a pas reconnu l’enfant. L’expert constate «Une ambiance neutre, aucun effet. Il ne montre aucune culpabilité et affirme que c’est dû au monstre qui a pris possession de lui. “ Pour le psychiatre, « Il y a conversion de ses troubles en symptômes psychiques, le sujet étant incapable de faire face à ses actes. Cette conversion lui permet de se sortir d’une situation qu’il est incapable d’assumer. Il ne note ni l’abolition ni l’altération du discernement : Il utilise des personnalités pour se défendre, c’est une construction secondaire pour être doublement utilitaire pour le plan criminel et pour lui-même, pour s’en sortir avec un minimum de casse ».
A ce stade de l’audience de ce vendredi, l’examen de cette affaire apparaît dans toute sa subtilité, et les expertises sont riches d’enseignements :“Il n’a aucune déficience mentale, il n’est pas inintelligent et souffre d’angoisse d’abandon”, souligne de son côté Marie-Chantal Bonnet Cathala psychologue clinicienne. S’il met en avant ses multiples personnalités – et il en parle jusqu’à revenir sur le meurtre -, «C’est un mécanisme de défense face à l’anxiété qui l’opprime. Il crée un personnage, veut qu’on s’intéresse à lui, il cherche sa place dans la société”.
La Cour examine cette affaire jusqu’au mardi 28 janvier, jour du verdict.