Pau, le laboratoire politique de François Bayrou

Pau, le laboratoire politique de François Bayrou
Pau, le laboratoire politique de François Bayrou

Plein soleil sur le Square Aragon, à Pau. Le 17 décembre, la température flirte avec les 15 degrés, la grande roue de Noël tourne sous le ciel azur, pile sur son axe, au milieu des chalets en bois. En arrière-plan, la chaîne des Pyrénées enneigées attire le regard des joggeurs…

Paris Match a renvoyé la carte postale paloise pour remettre en question la méthode Bayrou, désignée il y a huit jours à Matignon. Chanteur autoproclamé du compromis, le nouveau Premier ministre, un centriste de toujours, travaille-t-il avec tout le monde, localement, ou n’est-ce qu’un vœu pieux ? Comment sont perçus les premiers pas compliqués du madré Béarnais ?

« Il faut qu’il bouge pour promouvoir sa ville »

Laissons de côté d’emblée la question du bilan. Bayrou a été réélu en 2020, et même l’opposition municipale reconnaît qu’un certain nombre de choses positives ont été faites (les Halles, la gare, un centre culturel, un réseau de bus, etc.), bien que trop coûteuses (la dette a presque doublé).

Non, pour comprendre François Bayrou Premier ministre, il faut s’intéresser au fonctionnement du maire et président de l’agglomération, communautés qu’il dirige avec son fidèle bras droit Jean-Louis Peres, premier adjoint et vice-président de Pau. Agglomération. C’est lui qui tiendra la boutique, et discutera régulièrement avec le maire-Premier ministre, par vidéo, du plaisir coupable de la gouvernance municipale Bayrou. « Dans ces cas-là, il y a un groupe serré autour de lui, le directeur général, le directeur de cabinet, un ou plusieurs directeurs selon les sujets et le premier adjoint » explique un cadre de la Ville. Les commissions municipales se tiennent également par visio. « Nous fonctionnons déjà ainsi depuis 2014, explique Jean-Louis Peres, François Bayrou est président du parti et se rend donc régulièrement à Paris. Il est à la mairie lundi et vendredi. Mais ce n’est pas un sujet, c’est comme un chef d’entreprise, il a besoin de bouger pour promouvoir sa ville. »

François Bayrou n’est pas un homme de compromis, il a un management vertical similaire à celui d’Emmanuel Macron

Jérôme Marbot, chef de file de l’opposition paloise (PS)

Voilà pour l’organisation. Et si vous travailliez avec d’autres forces politiques ?

La suite après cette annonce

« François Bayrou n’est pas un homme de compromis, il a une gestion verticale similaire à celle d’Emmanuel Macron, tacle Jérôme Marbot, chef de file de l’opposition municipale (PS). C’est un Jupiter municipal, avec une équipe soudée autour de lui qui exécute et lui qui décide seul… » N’entretient-il pas le débat, comme il l’a encore dit lundi 16 décembre, lors du dernier conseil municipal ? « Il sait entendre, écouter les avis, les idées, mais pas consulter », poursuit le même interlocuteur. Ce qu’il décide ne peut être remis en question. La discussion descend avec les Palois. Dans le cadre de la rénovation d’un quartier prioritaire de la ville (Saragosse), un grand bâtiment a été détruit et ses habitants, dont certains y vivent depuis quarante ans, ont été prévenus par lettres… »

La mairie de Pau, le soir du conseil municipal controversé, la berline officielle du Premier ministre étant garée juste devant l’entrée.

©FB

« Sur la rénovation du quartier prioritaire de Saragosse, il a tenu compte de ce qui avait été dit en conseil citoyen, cela s’est fait davantage en co-construction », explique une Paloise. Il marche sur trois jambes : les affaires, humaine, publique. » « C’est le seul contre-exemple où il a reculé un peu, poussé par le collectif citoyen… », répond Marbot.

J.J’ai vu le côté « sage », prendre le - d’apprendre et de transmettre, de me nourrir

Laurent Jubier, ancien opposant ayant rejoint la majorité de Bayrou

La virulente opposition de gauche a vu deux élus la quitter ces derniers mois pour rejoindre la majorité Bayrou… « C’est l’attrait du pouvoir, ils avaient des différends avec les élus de l’opposition » justifie leur ancien leader. “Pau est un laboratoire pour la gauche, où LFI est devenue hégémonique très tôt, donc j’ai commencé par m’éloigner”, répond Laurent Jubier, ex-PS et premier élu à avoir rejoint la majorité paloise début 2023, suivi de quelques-uns. il y a quelques années par un autre élu et bientôt par un troisième. « J’ai trouvé Bayrou dans une position de dialogue et d’ouverture par rapport au premier mandat, où il allait plus vite », poursuit Jubier. Il n’est pas venu me chercher. Et j’ai vu le côté « sage », prendre le - d’apprendre et de transmettre, de me nourrir. Il ne se précipite pas, mais sait aussi décider et a déjà formé l’arc des socialistes aux républicains, dans son équipe. Il y a chez lui une véritable hybridation droite/gauche ; local/national. »

« Bayrou n’a toujours gouverné qu’avec la droite et n’a jamais tendu la main aux socialistes, localement », poursuit Marbot, pas convaincu. Je suis consterné par ses premiers pas où son premier projet est de reparler du cumul des mandats, ça date ! » « Il veut reconnecter les élus locaux au pouvoir national », défend encore Jubier. Et la province au pouvoir. Il ne fait rien au hasard… »

Alors, quels enseignements peut-on raisonnablement tirer de l’exemple palois pour tenter de concevoir une méthode Bayrou, à l’échelle nationale ? Au-delà des enjeux et d’un degré différent de politisation, la différence la plus notable est aussi la plus évidente. François Bayrou a été élu deux fois par ses électeurs, quand sa légitimité nationale, à la tête d’un parti qui compte un groupe de 36 députés sur 577, est bien plus discutable. Et finira peut-être par le faire tomber ?

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Top 14. “Je n’ai aucune excuse et je n’en tolérerai aucune”, assène Piqueronies après la déroute de Pau à Toulon
NEXT prévisions attendues pour les 24 et 25 décembre en France