Dakar, 18 déc (APS) – Le visage actuel de certaines villes africaines reflète leur passé colonial, a estimé mercredi l’universitaire et penseur sénégalais Felwine Sarr, évoquant notamment les villes construites contre ses habitants et configurées aux attentes de la puissance coloniale.
« Les villes coloniales ont été construites contre leurs habitants et configurées pour répondre aux besoins d’extraction des ressources », a-t-il noté, ajoutant : « Une grande partie du visage actuel des villes africaines a été façonnée par l’expérience coloniale ».
Felwine Sarr a fait ce constat en livrant, mercredi à Dakar, la conférence inaugurale d’un colloque international sur le thème « Le sentiment d’appartenance » dont il est le directeur.
Cette rencontre, qui se poursuit jusqu’à samedi au Musée d’art africain Théodore Monod de l’Université Cheikh Anta Diop, rassemble, entre autres, artistes, chercheurs, architectes, urbanistes et géographes.
A l’initiative de Raw Material Company, institution artistique basée à Dakar, cette manifestation intellectuelle offre un cadre de réflexion sur « la question écologique, les savoirs endogènes, les ressources cosmologiques et mythologiques et l’hospitalité », indique votre.
L’auteur d’Afrotopia (2016) – essai dans lequel il invite l’Afrique à ne plus « courir sur les chemins qui lui sont indiqués, mais à marcher allègrement sur le chemin qu’elle a choisi » – s’est également penché sur « l’origine mythique et matrices symboliques des villes africaines antérieures aux événements coloniaux ». Il cite à cet égard les exemples de Tombouctou et de Gao, au Mali, ainsi que de Benin City, au Nigeria.
« Les villes africaines existaient bien avant la colonisation », a insisté Felwine Sarr, qui a rejoint l’Université Duke en Caroline du Nord (Etats-Unis) en 2021, où ses travaux académiques portent sur l’écologie du savoir, la philosophie contemporaine africaine et diasporique. Il a enseigné l’économie du développement et l’histoire des idées religieuses à l’université Gaston Berger (UGB) de Saint-Louis pendant 13 ans.
“C’est une réflexion pour faire le point sur la crise de la ville, mais aussi sur la crise écologique et sur toutes les difficultés qu’éprouvent les individus à habiter pleinement les lieux qui doivent nourrir la vie”, a-t-il déclaré. a-t-il martelé, faisant notamment allusion aux défis spatiaux, environnementaux, démographiques et sécuritaires qui défient « les villes africaines, actuelles et futures ».
Il a insisté sur la nécessité d’une « planification urbaine adéquate », face « aux statistiques galopantes des villes africaines, qui concentreront plus de la moitié de la population du continent d’ici 2030 ».
“En 2030, Lagos (Nigéria) comptera 25 millions d’habitants, Kinshasa 16 millions (Congo), Le Caire (Egypte) 14 millions et Dakar (Sénégal) 7 millions”, a-t-il suggéré.
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