Les spécialistes du secteur extractif ont débattu hier, mardi 17 décembre 2024, à Dakar, des enjeux liés à la gouvernance du modèle extractif sénégalais. L’objectif était de reprendre l’initiative de renégocier tous les contrats pétroliers, gaziers et miniers et de proposer une participation inclusive et constructive afin d’assurer une meilleure attractivité et stabilité du pays.
Les nouvelles autorités politiques du Sénégal souhaitent examiner avec attention les contrats de partage de production conclus entre l’État et les entreprises, suscitant un débat intense qui a fait l’objet d’un panel autour du thème : « Regards croisés sur les fondamentaux et la gouvernance du modèle extractif sénégalais ». ».
Le fiscaliste El Hadji Sidy Diop, inscrit à l’Ordre des Experts du Sénégal (ONES) et à l’Union des Ordres Fiscaux de l’Afrique de l’Ouest (UDDFAO-WAUTI), également président-directeur général du cabinet Face Africa, considère que la renégociation des contrats est une droit légitime. Il demande : « Pourquoi tous les contrats devraient-ils être déséquilibrés ? » En tant que fiscaliste, il met en avant le principe de maximisation des recettes de l’État. Il soutient ainsi que l’État doit « maximiser ses revenus pétroliers et gaziers par la fiscalité, notamment grâce au principe de progressivité fiscale ». Selon lui, « l’État doit capter autant que possible les recettes pétrolières et gazières disponibles », et adapter sa fiscalité en fonction des possibilités de récupération des recettes.
L’économiste et fiscaliste El Hadji Amath Diallo, ancien représentant du secteur des hydrocarbures au Comité national de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), estime que le simple fait d’aborder la question de la renégociation des contrats génère de l’incertitude. Même s’il existe des possibilités de renégociation, il s’interroge sur le - nécessaire pour mener à bien un tel engagement : “Il faudra d’abord étudier ces contrats au cas par cas afin d’en identifier les limites avant d’entreprendre quoi que ce soit.” Parallèlement, les contraintes économiques et les problèmes de stabilité nationale restent pressants.
Il rappelle que les contrats pétroliers, gaziers et miniers sont le résultat de négociations ardues entre l’État et les entreprises, qui disposent de « cabinets d’expertise internationalement reconnus dans tous les domaines du secteur ». Renégocier ces contrats n’est donc pas une tâche facile et pourrait entraîner « des coûts élevés ainsi que des perturbations au sein des compagnies pétrolières sénégalaises ». Il prévient également que cela pourrait décourager les investisseurs étrangers, même s’il reconnaît que certains cas méritent une renégociation.
Il pose cependant la question cruciale : « Le Sénégal est-il dans ce scénario ? » Selon lui, cette promesse de renégociation, bien que légitime pour les uns et bénéfique pour d’autres, ne doit « faire occulter ni les clauses de stabilité signées ni les engagements internationaux relatifs aux conventions et traités en vigueur »
L’ancien coordonnateur national adjoint du Forum civil et ancien membre du bureau exécutif de la coalition Publiez ce que vous payez, Abdoul Aziz Diop, a exprimé l’espoir que ceux qui ont participé aux précédentes négociations, notamment Mamadou Faye, ancien directeur général de Petrosen, et Sérigne Mboup, ancien directeur général de la Société africaine de raffinage (SAR), soient intégrés à la commission de renégociation des contrats mise en place par les nouvelles autorités. L’objectif serait de capitaliser les acquis et d’avoir une connaissance approfondie des dossiers afin de prendre des décisions éclairées.
Pour lui, « faire appel à l’expertise des anciens ne serait que bénéfique pour le Sénégal ».