«J’ai toujours été un peu plouc» – .

(Ottawa) Il n’y a qu’un seul squelette dans son placard, jure celui qui se proclame « le plus grand fan canadien qui soit » en ouvrant la porte d’une armoire de son bureau. Le squelette prend la forme d’un maillot des Maple Leafs de Toronto, acheté 10 $ chez Sports Rousseau il y a 25 ans.


Publié à 5h00



« Le curé ne m’a pas mis sur le banc, cependant », dit Marc Miller, en référence au classique de Roch Carrier, Le maillot de hockey. Autre distinction : contrairement au héros de l’histoire, il le porte sans honte – pour narguer l’adversaire.

«Je peux être baveux. J’ai toujours été un peu baveux. Je suis un peu méchant aussi. Et c’est pour s’amuser », admet d’emblée le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté dans ses bureaux de l’édifice de la Confédération à Ottawa.

Il continue sur un ton calme qui n’a d’égal que son attitude imperturbable.

Je me culpabilise parfois, mais j’aime pointer les incohérences… et en politique, il y a beaucoup d’incohérences.

Marc Miller, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté

Avant de faire le saut en politique, celui qui est aujourd’hui âgé de 51 ans a pratiqué le droit à New York, à Stockholm puis à Montréal, au sein du cabinet Stikeman Elliott.

Son ami James Bailey se souvient avoir été surpris de le voir prendre ce virage. « Nous n’avons pas beaucoup parlé de politique – et honnêtement, en partie parce qu’il est si drôle et irrévérencieux, il ne semblait pas être le genre de personne qui se préparait à une carrière en politique », explique son ancien camarade de classe en droit à l’Université McGill.

Il a pris conscience du sérieux de la démarche de son ami lorsque ce dernier a décidé de se présenter aux élections. « Je parlais de politique canadienne de façon décontractée. Il a répondu en mentionnant la transport scolaire [politique de mixité sociale] », se souvient-il.

Pourtant, ce changement de trajectoire s’est produit « de manière organique », note l’avocat new-yorkais James Bailey. Car comme chacun sait, Marc Miller est proche de Justin Trudeau : ils sont amis depuis près de 40 ans.

Du simple soldat au simple député

Ces deux-là sont inséparables puisque l’un a demandé à l’autre un crayon dans un cours d’anglais au Collège Jean-de-Brébeuf, où ils ont tous deux fréquenté le collège. Sur la mosaïque de la promotion 1991, le jeune Miller porte une coupe ras du cou.

PHOTO FOURNIE PAR MARC MILLER

Marc Miller, en formation pour la Réserve des Forces armées canadiennes

Il était déjà dans la Réserve des Forces armées canadiennes. Était-ce l’influence de son père Carman Miller, auteur d’ouvrages sur l’histoire militaire canadienne et ancien doyen de la Faculté des arts de l’Université McGill ? Un geste patriotique ?

Bien sûr, en tant que politicien, j’aimerais invoquer un motif patriotique. J’aime mon pays, c’est sûr. Mais c’était un moyen de gagner de l’argent pendant l’été. Sinon, c’était faire des sacs chez Steinberg.

Marc Miller

Les chemins de Marc Miller et de Justin Trudeau ont divergé au fur et à mesure de leurs déplacements – mais avant cela, ils parcouraient encore l’Europe et l’Afrique après avoir obtenu leur baccalauréat à McGill en 1994.

PHOTO FOURNIE PAR MARC MILLER

Marc Miller, devant un village dogon au Mali, près de la frontière avec le Burkina Faso, lors d’un voyage de six mois avec Justin Trudeau

Leurs chemins ont fini par se croiser à nouveau à Montréal, vers la fin des années 2000.

Là, leur relation prend une tournure politique. Marc Miller était présent à la fameuse réunion de Mont-Tremblant en juillet 2012, où fut élaborée la stratégie de campagne de Justin Trudeau dans la course à la chefferie du Parti libéral du Canada (PLC).

Il a ensuite présidé la campagne de collecte de fonds de son ami pour la course en 2013.

Mais il n’est pas encore sûr de vouloir se joindre à la mêlée.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE ARCHIVES

Marc Miller et Justin Trudeau, lors d’une activité de financement, en 2019

« Je n’étais pas forcément convaincu par le parti en tant que tel. Il y avait beaucoup de bonnes personnes, mais beaucoup de querelles, beaucoup de chaos. Et j’avais quand même un travail qui me plaisait », explique-t-il.

Il décide finalement de se présenter sous la bannière libérale aux élections de 2015 dans la circonscription de Ville-Marie–Le Sud-Ouest–Île-des-Sœurs, un bastion libéral qui avait été englouti par la vague orange du NPD en 2011.

La victoire est sans équivoque : Marc Miller l’emporte avec 50,8% des voix.

Sortir de l’ombre

À son arrivée à la Chambre des communes, il occupait un siège au dernier rang. Comme la majorité des députés d’arrière-ban, il se retrouve rarement sous les projecteurs.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES DE LA PRESSE CANADIENNE

Marc Miller a fait une déclaration en mohawk à la Chambre des communes en 2017

Jusqu’à ce qu’il fasse un geste historique. En juin 2017, il avait fait une déclaration en mohawk dans l’enceinte – il récidiverait en prononçant un discours de 20 minutes entièrement en kanyen’kéya, en février 2019.

Regardez le discours Mohawk de Marc Miller en 2017 sur le site Web de la CBC

Lire « « l’hommage » du député Marc Miller à la langue mohawk »

Marc Miller cultivait déjà sans tambour ni trompette cette curiosité pour les cultures et les langues autochtones, souligne Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador.

« Je me souviens qu’il avait pris l’initiative de me contacter, alors qu’il n’était qu’un simple député. Il m’avait proposé une rencontre avec presque tout le caucus libéral », raconte-t-il.

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES DE LA PRESSE CANADIENNE

Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador

J’ai trouvé cela tout à fait exceptionnel. Je n’avais jamais vu cela dans aucun gouvernement auparavant. C’est le genre de personne qu’il est. C’est un homme authentique.

Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador

L’amour de Marc Miller pour les questions autochtones est toujours présent dans son bureau d’Ottawa. Des médaillons en perles et des œuvres d’art autochtones ornent les murs. Sur son bureau se trouve une pile de livres d’apprentissage de la langue kanyen’kéya.

Car oui, il continue à y travailler. C’est un peu grâce à son épouse Elin, qui l’a mis au défi d’aller plus loin que ce discours, repris dans des publications comme le New York Times et le Gardien.

“Je lisais les articles de journaux à ce sujet, et quand je suis rentré à la maison, je l’ai montré à ma femme, j’étais fier de moi et tout ça, et elle m’a dit : ‘Tu es plein de merde si tu ne le fais pas.’ continuez vos cours. Alors j’ai continué mes cours », raconte-t-il en riant.

Grand-père polyglotte

Pour Marc Miller, le Mohawk pimente un bouillon linguistique déjà riche.

Car à la maison, on parle français, anglais et suédois. Un mélange dans lequel baigne le benjamin du clan : Magnus, 3 ans, qui a fait du ministre un jeune grand-père en mars 2021. « Je lui parle presque exclusivement en suédois, car c’est la langue la plus fragile, évidemment, en Suède. Canada. Il me répond en anglais, mais il comprend le suédois », précise le ministre.

La langue suédoise entre dans sa vie un soir à l’Université McGill, où il rencontre celle qui deviendra sa femme, Elin Sandberg. Il la suit à Stockholm, puis tous deux se rendent à New York avant de s’installer à Montréal, puis à Ottawa.

 
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