Alors que la Cour pénale internationale a émis un mandat d’arrêt contre Benjamin Netanyahu, la France est coincée entre ses obligations envers la CPI et la volonté d’améliorer ses relations avec Israël. Le gouvernement semble avoir trouvé une solution.
Entre ses relations avec Israël, encore tendues jusqu’il y a peu, et ses devoirs envers la Cour pénale internationale (CPI), la France joue avec adresse. Après avoir entretenu le flou, elle a tranché ce mercredi 27 quant à sa position. « La France appliquera rigoureusement, comme elle l’a toujours fait, les obligations qui lui incombent en vertu du droit international », avait déclaré la veille Michel Barnier devant l’Assemblée nationale, sans toutefois préciser si le pays allait ou non arrêter Benyamin Netanyahu. Et pour cause, le gouvernement semble avoir trouvé une pirouette expliquée par le ministère des Affaires étrangères ce mercredi. Jean-Noël Barrot a soulevé des « questions d’immunité » prévues dans le traité de Rome et dont peuvent bénéficier certains dirigeants, notamment ceux qui ne reconnaissent pas la CPI, comme il l’a fait savoir sur Franceinfo. “De telles immunités s’appliquent au Premier ministre Netanyahou et aux autres ministres concernés et devront être prises en considération si la CPI venait à nous demander leur arrestation et leur remise”, écrit le Quai d’Orsay dans un communiqué. Le ministère a également indiqué « travailler en étroite collaboration » avec Benjamin Netanyahu « pour parvenir à la paix et à la sécurité pour tous au Moyen-Orient ».
Le Premier ministre israélien fait l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la CPI, jeudi 21 novembre, aux côtés de son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant et du chef du Hamas Mohammed Deïf. Depuis cette date, la France, comme les 123 autres pays signataires du traité de Rome et reconnus la CPI, sont théoriquement tenues d’arrêter ces trois personnes si elles mettent le pied sur leur sol. La décision de justice n’a plus d’impact sur l’État hébreu, le dirigeant ayant rappelé qu’« aucune décision anti-israélienne scandaleuse ne nous empêchera – et surtout pas moi – de continuer à défendre notre pays de quelque manière que ce soit ». . D’autres représentants israéliens ont dénoncé une décision « antisémite ».
Les réactions à l’émission de mandats d’arrêt internationaux ont été fortes, nombreuses et diverses. Outre Israël, les États-Unis ont rejeté la décision « scandaleuse » de la CPI, mais cette dernière n’a jamais reconnu l’autorité de l’instance. Il n’en reste pas moins que parmi les 124 pays reconnaissant la CPI, plusieurs ont refusé de se plier à son autorité et d’arrêter Benjamin Netanyahu s’il se rendait sur leur territoire comme la Hongrie ou l’Autriche. D’autres ont en revanche assuré qu’ils respecteraient scrupuleusement les mandats d’arrêt, comme l’Italie ou le Royaume-Uni.
L’appel de Netanyahou à Macron
Après les annonces de la CPI, le Premier ministre israélien a téléphoné à Emmanuel Macron selon les informations du Parisien pour pousser les autorités françaises à ne pas respecter les mandats d’arrêt. Le chef de l’État aurait tenu ces dernières heures un discours similaire à celui de son gouvernement : la France respectera le droit international, mais l’immunité pourrait être accordée aux chefs d’État. D’autres représentants israéliens ont adressé des messages similaires au gouvernement et au président français, notamment l’ambassadeur d’Israël en France qui a dénoncé le 22 novembre une décision de justice « totalement arbitraire » visant à « empêcher » Israël de se défendre au micro. de Franceinfo. L’homme a appelé Emmanuel Macron à “suivre l’exemple qui a été donné par les Etats-Unis, par le président américain et par d’autres pays de l’Union européenne comme la Hongrie, l’Autriche et la République tchèque, qui ont déploré cette résolution”.
Selon nos informations, Benyamin Netanyahu a téléphoné à Emmanuel Macron « la semaine dernière » selon l’Élysée, pour lui exprimer sa colère face à la décision de la CPI et chercher à influencer Paris pour ne pas l’appliquer contre lui. Le président français aurait répondu que la France respectait le droit international, mais que le juge pouvait décider d’accorder l’immunité aux chefs d’État.
Dernières mises à jour
18h59 – Israël fera appel de la décision de la CPI
Moins d’une semaine après l’émission de mandats d’arrêt internationaux par la Cour pénale internationale (CPI) contre son Premier ministre Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant pour crimes de guerre, Israël annonce son intention de faire appel de la décision de la Cour. Dans l’attente d’une décision sur le fond, Israël a également demandé à la CPI de suspendre l’exécution de ces deux mandats d’arrêt, a indiqué le bureau du Premier ministre israélien dans un communiqué.
15:39 – La gauche critique l’immunité accordée à Benjamin Netanyahu
L’annonce de l’immunité accordée à Benyamin Netanyahou a fait sursauter certains responsables politiques de gauche. « La France se plie une fois de plus aux exigences de Benyamin Netanyahou en le choisissant plutôt que la justice internationale » a déploré la patronne des Écologistes, Marine Tondelier sur X. La décision du ministère est « une honte » à ses yeux. Elle va jusqu’à soupçonner un « deal » si bien que la France est citée parmi les acteurs ayant permis un cessez-le-feu entre Israël et le Liban. Le coordinateur de France Insoumise, Manuel Bompard, a quant à lui demandé si le terme « immunité » n’avait pas été confondu avec celui d’« impunité ».
15h30 – La France accorde l’immunité à Benjamin Netanyahu malgré le mandat d’arrêt de la CPI
La France a décidé ce mercredi de la conduite à adopter concernant le mandat d’arrêt émis par la CPI contre Benjamin Netanyahu. Si la France entend respecter « rigoureusement » ses obligations vis-à-vis de la CPI comme Michel Barnier l’a déclaré hier aux députés, le ministre des Affaires étrangères a précisé ce mercredi que le Premier ministre de la Cour pénale internationale bénéficie d’une « immunité » qui “doit être pris en considération” malgré le mandat d’arrêt. Dans un communiqué, le ministère invoque les obligations prévues par le droit international liées aux « immunités des États non parties à la CPI », ce qui est le cas d’Israël. Il ajoute que « de telles immunités s’appliquent au Premier ministre Netanyahu et aux autres ministres concernés » par un mandat d’arrêt du tribunal.