Le crédit de la pisciculture d’Estavayer remis en cause

Contenu réservé aux abonnés

La commission des finances du Parlement fribourgeois s’oppose au crédit d’engagement de 3,5 millions pour le redémarrage de la pisciculture d’Estavayer-le-Lac.

Si le crédit de 3,5 millions de francs passe le Grand Conseil, la pisciculture pourrait être mise en service en novembre 2025. © Alain Wicht-archives

Si le crédit de 3,5 millions de francs passe le Grand Conseil, la pisciculture pourrait être mise en service en novembre 2025. © Alain Wicht-archives

Publié le 24/06/2024

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Par 14 voix contre une, la Commission des finances et de gestion (CFG) du Grand Conseil de Fribourg propose de rejeter le crédit d’engagement de 3,5 millions de francs pour le redémarrage de la pisciculture d’Estavayer-le-Lac qui sera présenté jeudi aux députés. .

Les membres du CFG s’interrogent sur l’utilité de ces aménagements alors que l’Etat doit se serrer la ceinture. Du côté des députés Broyard membres de la commission ad hoc qui a largement voté en faveur du décret, il reste encore de l’espoir compte tenu du long chemin déjà parcouru.

« Il existe d’autres priorités pour l’utilisation de l’argent public »
Claude Brodard

Rappelons que la pisciculture, inaugurée en 2016 pour 2,4 millions de francs, avait fonctionné très peu de temps en raison de problèmes de conception entraînant la perte de milliers d’œufs. Suite à cette débâcle, le canton a décidé en 2019 de sous-traiter l’élevage à la pisciculture intercantonale de Colombier (NE). Cependant, le dépôt d’une motion populaire rassemblant environ 2 500 signatures demandant le redémarrage des installations staviacoise a été validé par le Conseil d’État puis par le Grand Conseil à l’automne 2021, avec 87 voix contre, 10 et 9 abstentions. Une commission d’enquête parlementaire, constituée en 2020, a rendu à la même période un rapport également favorable à la réintégration. Deux ans plus tard, le projet a été mis en examen sans susciter d’opposition.

“Pas nécessaire”

Aujourd’hui, les avis semblent moins unanimes. Pour le CFG, dont le président libéral-radical Claude Brodard (Le Mouret) est le porte-parole, « l’investissement n’est pas nécessaire pour garantir la production de fretins. La collaboration actuelle avec la pisciculture de Colombier est satisfaisante, il ne s’agit pas de faire face à une pénurie, ou à une production qui serait inexistante. Il y a donc d’autres priorités quant à l’utilisation de l’argent public, d’autant que ce projet, estimé à 1,5 million, coûte actuellement 3,5 millions de francs et que les coûts de fonctionnement futurs seront plus importants qu’aujourd’hui.»

L’état des finances du canton a également pesé beaucoup dans la balance, le CFG ayant été invité à une séance à ce sujet avec une délégation de l’exécutif cantonal, indique Claude Brodard. « Nous avons été informés que la préparation des budgets est très compliquée. Les défis seront tels que chaque investissement devra être soigneusement étudié même si la somme n’est pas significative. Le message du Conseil d’État accompagnant le décret est également étonnamment clair à ce sujet et indique la non-nécessité de cette dépense.

La pisciculture coûtera plus cher

En effet, dans le document, l’utilité d’avoir une maternité poisson à Estavayer-le-Lac est remise en cause. Il est écrit que «le projet n’augmentera pas le nombre d’alevins relâchés dans les eaux du lac de Neuchâtel et ne contribuera pas à la défense des intérêts de la pêche. En revanche, l’assainissement de la pisciculture entraîne une augmentation des coûts de production sans aucune valeur ajoutée piscicole. Ainsi, les capacités de production à Colombier comme à Estavayer-le-Lac seraient surdimensionnées, le nombre de reproducteurs capturés par les pêcheurs restant faible. Les coûts ont également augmenté afin de respecter diverses normes imposées, notamment celles de l’Établissement cantonal d’assurance des bâtiments pour faire face aux inondations exceptionnelles, précise encore le message.

« Le vote sera serré »

A noter que ces difficultés liées à la friture faisaient déjà partie des éléments présentés en 2021 par le Conseil d’Etat, note le député centriste Eric Collomb (Lully), membre de la commission ad hoc (CAH). « Il n’y a pas eu d’élément nouveau depuis 2021. Si nous avons construit une telle installation à Estavayer-le-Lac, c’est pour éviter de mettre tous nos œufs dans le même panier au cas où il y aurait un problème dans une des piscicultures et c’est toujours valable aujourd’hui. Et d’ajouter : « Il y a trois ans, 87 députés disaient oui et plus de 2 000 signatures ont été récoltées pour la motion populaire. Je ne comprends pas pourquoi il y a un tel débat sur les 3,5 millions de francs et je doute que le vote aille dans une direction totalement opposée, mais il faut s’attendre à tout.»

“Il y a eu des pétitions, des manifestations, une motion populaire, il ne faut pas l’oublier”
Nadia Savary-Moser

Un avis partagé par la députée libérale-radicale Nadia Savary-Moser (Vesin), membre du CAH. Elle souligne qu’elle compte se battre jusqu’au bout et qu’elle prépare déjà son discours en plénière. « Nous avons bon espoir. Nous nous attendons à un vote très serré, mais nous allons garder notre ligne qui est la même depuis le début.» Elle n’est cependant pas surprise du vote du CFG : « C’est leur rôle d’aborder cette question sous l’angle financier, surtout quand on voit le message du Conseil d’Etat. Ils ont juste fait leur travail. Elle note cependant que « tout projet qui dure comme celui de la pisciculture est soumis à l’inflation ou aux nouvelles normes, il n’y a rien d’étonnant à cela, il fallait s’y attendre ».

Pour le député Broyarde, il est important de rappeler l’histoire qui a conduit à ce projet. Une histoire que tous les députés ne connaissent pas ou peu, estime-t-elle. « Certains sont nouveaux et ne connaissent pas toutes les démarches entreprises, les hauts et les bas et les conséquences. Il y a eu des pétitions, des manifestations, une motion populaire, il ne faut pas l’oublier. Personne ne s’arrête à 41 anse kilomètre dans un marathon, et je ferai ce dernier kilomètre la tête haute. L’avenir de la pisciculture sera donc décidé jeudi : si le crédit d’engagement passe la rampe, sa mise en service est prévue pour novembre 2025. Dans le cas contraire, le dossier sera définitivement enterré.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Une star victime d’abus racistes après sa défaite en Copa America – .
NEXT Labrune tend enfin la main à Canal+